--< DOUBLE SENS UNIQUES >-- par Axel van de Walle --< Avant-propos >-- Comment un individu normalement constitu‚ en arrive … ‚crire des choses comme celles que vous allez lire? Un petit historique s'impose. Depuis longtemps, j'ai developp‚ la manie de glisser des jeux de mots lors des conversations. Les gens de mon entourage ne pouvant plus me supporter, je me suis mis … les ‚crire. Lorsque je suis entr‚ … l'cole Polytechnique de Montr‚al, j'ai eu l'occasion d'‚crire une chronique hebdomadaire dans le journal ‚tudiant, le ``Polyscope''. Ce sont ces textes qui se retrouvent dans le pr‚sent recueil. Ils ont bien s–r ‚t‚ l‚gŠrement modifi‚s, pour les rendre plus compr‚hensibles pour quelqu'un qui n'a pas ‚tudi‚ … l'cole Polytechnique. Mais aprŠs avoir lu ce livre, peut-ˆtre me direz-vous que cette petite histoire n'explique pas tout... En passant, je tiens … vous f‚liciter, chez lecteur, car vous ˆtes l'un des rares qui ait l'habitude de lire les avant-propos! --< La voyance, revue et corrig‚e >-- Un homme entre chez une voyante. ``Asseyez-vous ici et donnez-moi votre main.'', lui dit-elle. L'homme lui tend la main. Elle poursuit: ``-Je vois que vous allez bient“t vous marier. -C'est normal, vous venez de me demander ma main... -Je ne veux pas vous marier ni mˆme avoir une aventure avec vous! -Je crois, diseuse, que ce ne serait pas une bonne aventure. -Enfin bref, je continue de croire que vous vous marierez bient“t. -Et... comment se passera la premiŠre nuit? -coutez, je suis une voyante, pas une voyeuse. -Dites-moi quand mˆme comment ce sera qualitativement, sans entrer dans les d‚tails. -Je sais lire les lignes de la main, mais pas entre les lignes. -Vous ne voyez pas clair pour une clairvoyante! Vous ˆtes clairement non-voyante. -C'est une fa‡on de voir les choses... Revenons … votre futur, voulez-vous? -Mes parents m'ont toujours dit que je n'avais pas de futur. -Peut-ˆtre n'en aviez-vous pas, … l'‚poque. -Le futur d'hier ne serait pas le mˆme que celui d'aujourd'hui? -Le futur d'hier est beaucoup plus facile … pr‚voir aujourd'hui que le futur d'aujourd'hui. -Que voulez-vous, on n'a plus le futur qu'on avait. -Je vais quand mˆme essayer de vous pr‚dire quelque chose. -Je ne vous le fait pas pr‚dire... -Voici ma pr‚diction: vous vivez des moments difficiles mais les choses vont s'arranger. -D‚sol‚, c'est faux. -Qu'est-ce que vous en savez? Ayez confiance en vous mˆme. -J'ai confiance, mais d‚sol‚, je ne vis pas des moments difficiles. -Alors, pourquoi venez-vous me voir? Vous n'ˆtes pas normal. -Et alors, vous ˆtes bien paranormale! -Ce n'est pas ce que je voulais dire... Les gens viennent habituellement me voir pour se faire remonter le moral. Il doit bien y avoir quelque chose qui ne va pas. Par exemple, ne souffririez-vous pas un peu d'embonpoint? -Vous avez un bon point, cependant, je vous demande de regarder mes lignes, pas de surveiller ma ligne. -Je regarde les mains mais je soigne tout le corps. -Et dire que je paye pour entendre ‡a! Si au moins vous me rassuriez, en m'assurant mon futur. -En me payant, vous n'assurez peut-ˆtre pas votre futur, mais vous assurez le mien!'' Et sur ce, l'homme quitte la place en sugg‚rant … la voyante... d'aller se faire voir. --< Assi‚g‚ de questions >-- La s‚antologie, comme vous le savez tous, est l'‚tude la position assise. J'ai devant moi l'un des s‚antologues le plus renomm‚, le professeur Fran‡ois d'Assise. Professeur, expliquez-nous ce que vous ˆtes en train de faire, assis dans ce fauteuil. -J'effectue un banc d'essai. Je suis en train, devant vous, de tester mon arriŠre train. -Et qu'en concluez-vous? -Rien encore, car il faut que je reste assis au moins une heure pour avoir le temps de mesurer tous les paramŠtres int‚ressants. -C'est long! -Pourquoi pensez-vous que ma r‚putation est si bien assise? -Mais s‚rieusement, que faites vous avec tous ces paramŠtres relatifs aux chaises? -Je fais des tables. -Et avec ces tables... -Je fais des dossiers que j'‚tudie assid–ment et d–ment assis. C'est ainsi que progressent mes recherches sur les chaises... -Elles avancent? -Comme sur des roulettes! -Ces recherches vous ont permis de beaucoup publier, n'est-ce pas. -Oui, d'ailleurs mon tout nouveau livre, ``L'ˆtre et le s‚ant'' vient de paraŒtre. -Cela semble fort philosophique... -Mes toutes premiŠres recherches ne se basaient que sur l'anatomie, mais maintenant, j'ai atteint un stade bien post‚rieur. -(Quel vantard!) D'o— votre renomm‚e... -(Quel lŠche-bottes!) Disons que ‡a n'a pas nui … l'obtention de ma chair(e) … l'universit‚. -Vous faites ‚galement des conf‚rences, n'est-ce pas? -Oui, bien que je pr‚fŠre appeler cela des s‚ances d'informations... -... qui sont fort populaire. J'ai entendu que des gens devaient parfois y assister debout. -C'est faux! J'ai toujours veill‚ … ce que mon assistance soit, comme son nom l'indique, assise. -Excusez-moi, je ne voulais pas que vous vous leviez... le ton. Revenons … votre carriŠre, voulez-vous. Vous ˆtes un homme fort occup‚. -Effectivement, je siŠge … beaucoup de comit‚s. -Vos enfants ne vous trouvent pas trop absent? -Tant qu'il sont coll‚s sur les bancs d'‚coles, il n'y a aucun problŠme... -... sauf si les banc d‚collent. -Vous ˆtes vraiment un fauteuil de trouble. -Je blagais. Toutefois, ne craignez-vous pas qu'… force de rester assis, vos enfants ne soient pas bien ‚lev‚s? -Il suffit de les asseoir suffisamment haut. Dans notre soci‚t‚, il faut savoir occuper une place, et de pr‚f‚rence, assise. En les inscrivant aux grades sup‚rieurs, ils seront assis dans les gradins sup‚rieurs de la soci‚t‚. -Les chaises meublent vraiment toute votre vie! -Disons qu'elles me donnent une raison de plus de me lever... de mon lit … chaque matin. -Comptez-vous rester assis encore longtemps avant de prendre votre retraite. -Je n'attends que cela, la retraite: pouvoir enfin s'asseoir en paix! -Qu'attendez vous pour la prendre? -La relŠve! --< Citations de situation >-- Un jour o— je ne pensais … rien, les pens‚es suivantes me sont venues … l'id‚e. Un cours tend toujours vers sa fin, mais … la maniŠre d'une courbe vers son asymptote. Une explication d‚passe le cadre du cours lorsqu'elle d‚passe le cadre du tableau. Le professeur enseigne et l'‚tudiant en saigne. Qui ne dit mot consent... mais quand on a mauvaise haleine, c'est quand on dit un mot qu'on sent. Pourquoi y a-t-il un ``h'' aspir‚ au mot haleine, ‡a ne pue pas assez comme ‡a? A bas cette soci‚t‚ de pousse-boutons (sign‚: un adolescent faisant de l'acn‚). L'hygiŠne est le propre de l'homme. S'il est possible de salir ma r‚putation, il est cependant impossible de salir mon nom: c'est un nom propre. Si l'‚conomie ne tourne pas rond, c'est qu'on est en p‚riode de pr‚cession. Des amoureux se parlent: ``On s'enlace toujours et on ne s'en lasse jamais.'' Depuis que j'ai attrap‚ une mono, je dors sur mes deux oreilles. On devrait appeler ‡a une st‚r‚o. Labeur: travail de celui qui ‚crit un rapport de lab. Rhum ne s'est pas fait en un jour: il a d– fermenter. J'ai un faible pour le fort (sign‚: un alcoolique). Pens‚e environnementale: ``Tous les ‚gouts sont dans la nature.'' Les lois de la physique se distinguent des lois du droit par le fait qu'en physique, les hommes essaient de suivre la nature en changeant les lois plut“t que d'essayer de changer leur nature en suivant les lois. Le sens de l'humour est un sens unique: celui des double-sens. Un humoriste doit plier en quatre pour que les gens se plient en deux. Inutile de dire que j'ai, depuis lors, abandonn‚ l'id‚e de ne penser … rien car quand je ne pense … rien, je n'y pense plus et j'oublie que je ne voulais pas penser. Vous y penserez... --< Administration de somnifŠres >-- Etant donn‚ que la plupart des scientifiques deviennent t“t ou tard des administrateurs, une analyse scientifique de cet id‚al abstrait que constitue l'Administration leur serait utile. L'administration (dont je supprime dor‚navant la majuscule, histoire de quitter le domaine de la philosophie (tout en m'‚vitant de devoir appuyer sur ``shift'' … tout moment)). L'administration donc, (car je n'avais pas fini la phrase pr‚c‚dente, histoire de vous laisser respirer), a pour but effectif l'inefficacit‚. A sa naissance, une administration a besoin d'‚l‚ments ext‚rieurs lui donnant quelque chose … administrer. Ces ‚l‚ments, appel‚s intrants ou extrants (pour faire plus savant, bien que les fran‡ais pr‚fŠrent les termes input et output) inculquent … l'administration naissante sa raison de vivre. Une administration devient mature quand elle peut se passer de ce parrainage et occuper tout son temps … s'administrer elle-mˆme. Une administration progresse ensuite vers la s‚nilit‚ lorsqu'elle ne parvient mˆme plus … s'administrer elle-mˆme. A partir de ce moment, la gravit‚ de la situation prend le dessus et, tel un trou noir, l'administration se replie de plus en plus sur elle-mˆme, ne laissant mˆme plus s'‚chapper une bribe d'id‚e lumineuse. Nous avons consid‚r‚ l'administration comme un systŠme macroscopique, mais nous pouvons arriver aux mˆmes conclusions en analysant la situation … un niveau microscopique. Une administration est jeune si ses gestionnaires gŠrent; et mature, si les dits gestionnaires digŠrent. Ils digŠrent les fonds de l'assiette fiscale des contribuables, par exemple. Notons que l'apparition d'un dip“le patronat-syndicat acc‚lŠre grandement la progression vers l'inefficacit‚ (lire ``maturit‚''). Cependant, comment expliquer l'auto-suffisance totale de l'administration … sa maturit‚? Par un principe fondamental du systŠme: l'utilisation du formulaire. Ce proc‚d‚ permet de ralentir la communication interne des informations, et ce, grƒce … la propri‚t‚ qu'ont les formulaires de se reproduire par clonage grƒce … la magie du papier carbone et de la photocopieuse. Ces formulaires donnent de plus le loisir aux gestionnaires de haut niveau (ceux qui gŠrent la gestion) de s'adonner … la cr‚ation artistique: l'apposition r‚p‚titive d'une signature. Depuis ces derniŠres ann‚es, un facteur technologique est venu aussi acc‚l‚rer la croissance des administrations: l'ordinateur, grƒce … sa capacit‚ ph‚nom‚nale de g‚n‚rer du papier. Une autre utilisation pratique de l'ordinateur est l'impression de lettres simili-personnalis‚es dont le langage semble toujours si touchant: ``Nous sommes dans l'immense regret, M. ou Mme ..., de nous voir dans l'obligation de vous faire savoir, par l'interm‚diaire de ce communiqu‚, l'impossibilit‚, malgr‚ tous nos efforts, de r‚pondre … votre l‚gitime demande.'' Mais c'est d'un point de vue physique que l'administration se montre la plus fascinante. Une administration est un systŠme ferm‚: tout effort produit par un membre de l'administration est une force interne au systŠme et ne peut donc pas effectuer de travail visible de l'ext‚rieur du systŠme. Un membre d'une administration a l'impression de forcer, sans toutefois travailler: cela ne d‚rive pas de son manque de potentiel, mais de l'inertie de la masse de gens non ponctuels. D'ailleurs, si vous avez un jour eu affaire … une administration, vous vous ˆtes probablement rendu compte qu'aprŠs avoir parcouru de nombreux bureaux, pour revenir ensuite … votre point de d‚part, vous n'aviez effectu‚ aucun travail (sur un parcours ferm‚, le travail effectu‚ est nul!). Pourquoi une administration reste-elle si endormie sur son mal? Tous les m‚decins vous le diront: il est si facile d'administrer un somnifŠre plut“t qu'un m‚dicament... --< Le Complexe d'Adipe >-- Tout a commenc‚ quand je n'‚tais encore que trŠs jeune. Tous les gens de mon entourage avaient un problŠme de dyslexie en disant mon nom. Au lieu de m'appeler ``petit gars'', on m'appelait ``petit gras''. Car j'‚tais et suis toujours, gros. DŠs lors, je n'ai cess‚ de me faire traiter de tous les noms par les plus maigres que moi, ces ingrats. Plus j'engraisse physiquement, plus on m'agresse verbalement. Au primaire, imaginez, j'en ai tellement soup‚! Et … force d'en souper on en d‚veloppe un caractŠre gras. Laissez-moi vous dire que ce n'est pas de tout repas (pardon, repos). Je n'aime pas qu'on me fasse marcher (et encore moins courir). Comment pensez-vous que je puisse faire du sport en public? DŠs que je me lŠve, on me prend pour un stand-up comic. Je croyais passer inaper‡u en fr‚quentant les piscines. Une fois mon corps immerg‚, mon estime personnelle re‡oit une pouss‚e vers le bas d'autant plus forte que mon problŠme de poids est lourd. J'avais oubli‚ que quand arrive l'obŠse l'eau monte! Je fus submerg‚ s'insultes sŠches de gens mouill‚s. Mais maintenant les choses ont chang‚. J'ai rencontr‚ ma dulcin‚e, que je trouve si gracieuse que je dirais qu'elle est la grasse mˆme. Et tant que la grasse mˆme m'aime, je suis gras dur! Elle et moi, obŠses tous les deux, nous jouissons enfin de la vie. Pourquoi avais-je … m'en faire pour ma graisse, … m'aigrir … essayer de maigrir. Maintenant, j'ai accept‚ ma condition. Quand on me dit: ``comment ‡a va?'', je r‚ponds: ``tout baigne dans l'huile''. Quand ‡a va mal, je dis plut“t: ``je suis de mauvais poids aujourd'hui''. Un petit problŠme se pr‚senta quand arriva le temps de se trouver un emploi. Essayer de se trouver une place dans la soci‚t‚, ce n'est pas facile. On en prend tellement! Ce n'est pas une mince affaire. Je devais me mettre au r‚gime. Au r‚gime … plein r‚gime: j'avais besoin d'un r‚gime permanent. Essayer de perdre du poids en alternant r‚gime et absence de r‚gime est une solution purement imaginaire. Je dois ˆtre r‚el et constant sans ˆtre trop n‚gatif pour converger vers mon poids normal en m'exposant, avec le temps, au moins de risques possibles. Mon r‚gime restait malgr‚ tout assez drastique: j'en venais mˆme … je–ner au d‚jeun‚. Je me suis mis … l'exercice physique de sorte que je consume tout ce que je consomme. Rien … faire: la conservation de la masse semble ˆtre une loi irr‚m‚diable de mon physique. Puis, mon complexe d'antan est revenu me hanter. Accepter mon tour de taille, c'est un tour de taille. Les psychologues se sont inspir‚s d'un mythe, qui nous vient de GrŠce (et non de graisse), pour d‚crire ma situation: c'est le complexe d'adipe. --< Salades guŠre nourrissantes >-- L'instinct de violence semble intimement li‚ … l'instinct de se nourrir. Il suffit d'aller nous joindre … une conversation d'un groupe de militaires pour s'en convaincre. Un gars, appuy‚ sur le comptoir du bar, amor‡a la discussion: ``-Un type qui vous envoie vous faire charcuter, c'est un sale-ami. -Ouais, je pr‚fŠre les gens bons.'', dit un autre, dont le coude moulait timidement le rembourrage succinct du dossier du tabouret faisant face au comptoir du bar ci-haut mentionn‚. ``-Le gens bons ne vous envoient pas une balle au nez'', poursuivit un autre type, dont la localisation spatiale importait peu … l'histoire. ``-Parce qu'un porc, on sait pas ce que ‡a veau.'', conclut le plus timide du groupe. ``-Sans parler des poulets...'', ‚pilogua le plus bavard. (Note de l'auteur: ‡a devient difficile de trouver des synonymes au verbe ``dire''.) La conversation se poursuivait, tandis que le narrateur en avait marre de glisser son mot auquel personne ne porte attention, de toute fa‡on: ``-Pourtant qu'est-ce qu'ils ne nous font pas avaler pour nous motiver … aller au front: `Vous allez n'en faire qu'une bouch‚e. Il vont manger une racl‚e. Il vont y go–ter.' -Puis, ils ajoutent, en riant: `‡a va ˆtre du gƒteau!' Mais je ne crois pas que ceux qui pƒtissent rient. -Ensuite, ils oublient que de l'autre c“t‚, ils leur ont dit la mˆme chose. -Ouais, eux aussi ma‹s, … en devenir d'embl‚e dingue. -On risque de se faire planter pour ensuite r‚colter... une racl‚e. -Tout ‡a parce qu'on ne sŠme pas. -De toute fa‡on, en temps de guerre, dŠs que ‡a commence … chauffer, les soldats sont cuits. -Et les recrues sont recuites! -Esp‚rons que les gens hostiles resteront chez oeufs... -... qu'aucun pays ne sera brouill‚ avec son voisin. -Parce qu'aprŠs la guerre, on se retrouve les d'oeufs battus. -Ils veulent mˆme envoyer des bombes H qui causeront des hivers nucl‚aires. -Une bombe glac‚e, quoi. -T'es ben saut‚, aujourd'hui'', dit l'un, avec un accent qu‚b‚cois peu dissimul‚, pour les besoins de la farce. ``-Moi? je trouve que j'ai mauvaise mine.'' Puis, chacun soupira, esp‚rant un avenir meilleur: ``-Que la moutarde ne monte au nez de personne... pour que les gaz du mˆme nom ne commencent pas. -Ils devraient envoyer des aux tomates. -Des robots... culinaires. -Ce serait moins lait. -Mais ‡a risque quand mˆme de mal tourner. -€a n'‚viterait pas des bries m‚caniques. -Bah, pourvu que je reste dans mon cottage plut“t camemfert pour ma survie.'' Puis, le sujet de conversation retomba sur le pr‚sent: ``-C'est quand mˆme agr‚able de vivre dans un pays non violent. Ici, on se divertit en ‚coutant l'inoffensif hockey... -Nos enfants peuvent jouer en toute qui‚tude avec leurs figurines (vendues s‚par‚ment) de ``Star Wars''... etc. -Bon, assez parl‚: j'attaquerais bien le repas.'' --< Autod‚bile >-- Cette couche de rouille ambulante pouvait difficilement faire honneur … la d‚finition que donne le dictionnaire du mot ``voiture''. Mˆme ``automobile'' ne convenait pas vraiment puisque l'objet avait peine … se mouvoir de lui-mˆme. Cette chose donc, donnons-lui un nom: disons ``tacot'' pour donner un peu de piquant … l'histoire. Par sa couleur brune, la carrosserie tentait de camoufler son implacable rouille (car ce qui n'est pas plaqu‚ rouille facilement). Elle arborait de plus un a‚rodynamisme douteux que son conducteur abhorrait. En fait, on devait plut“t parler d'hydrodynamisque puisque nombreux ‚taient ceux qui qualifiaient ce tacot de ``bateau''. Ce kit d'apprenti bricoleur itin‚rant repr‚sentait bien la culture am‚ricaine qui lui avait donn‚ naissance. Compos‚ d'au moins 51 morceaux disparates d'ƒges diff‚rents, il ‚tait difficile de savoir exactement dans quel ‚tat se trouvait chaque morceau. Certains ‚taient remplac‚s beaucoup plus souvent que d'autres: c'est … croire que les lois (de la physique) changeait d'un ‚tat … l'autre. Pour les phares, la moindre d‚faillance signifiait la peine de mort. Pour le pare-brise par contre, bien des mauvais coups ‚taient tol‚r‚s (mˆme les coups d'‚clat!). Des boulons pouvaient se d‚visser sans que la justice ne s‚visse tandis que, pour des vices cach‚s, l'on serrait la vis. Bref, on faisait d'un poids deux mesures (et la voiture faisait d'une envergure deux voies). La carrosserie avait ainsi surv‚cu … de nombreuses transmissions: une fois de temps en temps, l'embrayage faisait la grŠve (il d‚brayait). A l'oppos‚, le mauvais fonctionnement des serrures entraŒnait parfois un lock-out. Le moteur … quatre temps, encore inchang‚, avait fait son temps et oubliait quelquefois de faire les trois autres. Mais il fonctionnait encore bien: tout baignait dans l'huile! Il avait tant perdu son ‚tanch‚it‚ que l'on pouvait … loisir inverser huile et essence lors du remplissage bis-quotidien et chaque fluide trouvait de lui-mˆme le moyen de se rendre au bon endroit. L'hiver avait peu d'effet sur ce tacot car son ‚mission massive de gaz carbonique lui procurait, par effet de serre, un micro-climat adapt‚ … la flore microbienne de lichen ferrugineux peuplant sa carrosserie. Situation ‚galement fort heureuse pour la batterie, car la faiblesse de celle-ci se comparait … celle qui accompagne la ``Petite Musique de Nuit'' de Mozart. Bref, cet accumulateur accumulait maintenant plus les ann‚es que les coulombs. Mais son conducteur s'‚tait fait une raison: tant que toutes les piŠces n'auront pas flanch‚ en mˆme temps, ‡a ne vaudra pas la peine de changer complŠtement de voiture. ... Un million d'ann‚es plus tard, l'absence d'activit‚ qui r‚gnait sur terre encouragea un peuple extra-terrestre … venir coloniser cette terre vierge pour montrer … ses voisins les plus proches qu'ils ‚taient les meilleurs. Quelques scientifiques r‚ussirent … d‚nicher des fonds pour faire partie de l'exp‚dition. Ils d‚couvrirent sur terre une couche de s‚diments contenant un nombre impressionnant de fossiles dont, entre autres, des coquillages portant l'inscription ``Coca Cola'', mais rien qui ne put laisser croire … l'existence d'une vie intelligente. Jusqu'au moment o— l'on d‚couvrit cette unique repr‚sentation intacte du dieu Tacot. Le soin avec lequel cette statue avait ‚t‚ confectionn‚e puis entretenue ne laissa aucun doute: la vie intelligente avait exist‚ sur terre. --< Forces Conservatrices >-- Un jour, l'‚nergie d‚cida que, dor‚navant, elle ne serait plus conserv‚e. Un temps s'‚coula avant que la communaut‚ scientifique ne s'en rende compte. On avait bel et bien remarqu‚ que les r‚sultats des exp‚riences ne concordaient plus avec la th‚orie aussi bien qu'avant, mais cela n'avait que stimul‚ la conception de th‚ories de plus en plus avanc‚es (donc farfelues). Le nombre de dimensions n‚cessaires pour expliquer l'existence de l'univers connut une hausse de cinq. Le nombre d'exceptions aux lois du ModŠle Standard des particules ‚l‚mentaires devint suffisant pour que l'on en fasse une grammaire. Le vide se r‚v‚la ˆtre encore moins vide qu'on ne le pensait. Et ainsi de suite... C'est un ing‚nieur qui constata l'anomalie quand la turbine qu'il avait con‡ue lui donna un rendement ‚nerg‚tique de 140%. ``Merveilleux!'', se dit-il, ``mˆme en soustrayant 30% (la marge d'erreur de mon calcul), ‡a donne en haut de 100%''. Il se mit alors … calculer le rendement mon‚taire de son invention: ``‡a fait autant par heure, moins les co–ts de recherches et d‚veloppements amortis sur 10 ans, moins l'entretient, moins le salaire de l'employ‚ qui surveille l'installation, le tout impos‚ … 50%, donne: un nombre positif! C'est impossible, j'ai d– me tromper! Ce serait rentable?''. Il reprit le calcul du d‚but, en consultant son livre de Physique I qui disait bien que la variation d'‚nergie totale ‚tait nulle, alors qu'il y avait r‚sultat positif. Il tira si bien profit de son invention, qu'il fut bient“t le sujet de l'‚mission de ``La Vie des gens riches et c‚lŠbres'', sur laquelle un chercheur en physique fondamentale tomba par hasard en changeant de poste parce que l'‚mission de vulgarisation scientifique qu'il ‚coutait ressemblait de plus en plus … ``Passe-Partout''. ``L'‚nergie non-conserv‚e... pas si bˆte!'', cogita-t-il, ``AprŠs tout, la science, c'est comme la terre arable, il faut la retourner complŠtement, une fois de temps en temps, pour la rendre plus fertile.'' Il avait eu l'inspiration divine, il lui restait la transpiration... humaine celle-l…. Il appela cette nouvelle propri‚t‚ de l'espace, la g‚n‚rosit‚ du vide, not‚e gamma indice z‚ro, pour perp‚tuer la tradition. Lorsqu'elle fut publi‚e, sa th‚orie eut l'effet de la dynamite (ce qui lui vaudra le prix Nobel). On convoqua les plus grands sp‚cialistes de la physique fondamentale pour colmater les innombrables fuites persistant toujours dans le r‚servoir des connaissances scientifiques. Il ne fallait surtout pas attirer l'attention du grand public: ce serait la ris‚e g‚n‚rale. On avait auparavant r‚ussi … cacher la non-conservation de l'‚nergie au niveau microscopique par le principe d'incertitude d'Heisenberg, mais maintenant on ne pouvait plus cacher ce qui se constatait dans la moindre petite exp‚rience de physique d'une ‚cole secondaire. (Cela stimulait d'ailleurs la cr‚ativit‚ des ‚tudiants, non pas lors de la r‚daction des rapports, mais lors de la prise des mesures.) Des milliers de th‚ories virent le jour, plus originales les unes que les autres. Des math‚maticiens proposŠrent d'abord de changer toutes les ‚galit‚s par des in‚galit‚s, histoire de faire en sorte que les lois de la physique restent vraies. Certains physiciens proposŠrent de red‚finir l'addition (et de l'appeler ``addition g‚n‚ralis‚e'') pour que la relativit‚ et la m‚canique quantique restent valides. D'autres se dirent qu'il fallait peut-ˆtre oublier tout ‡a et en profiter, avant que tout ne redevienne normal. On laissa ces pragmatiques de c“t‚ pour arriver, finalement, … une solution acceptable: il suffisait d'op‚rer une transformation conforme sur les coordonn‚es de l'espace-temps, pour obtenir une d‚finition de l'‚nergie, vectorielle (...). Bref, vue sous cet angle, l'‚nergie ‚tait conserv‚e. Tous rentrŠrent chez eux, sereins, tandis que Dieu se rongeait les ongles: ``Zut, une erreur de signe!''. --< Photo-maŒtre >-- Le moment solennel approchait. Il allait d‚clarer … ses parents le domaine dans lequel il comptait ‚tudier. ``-La photo, c'est mon objectif'', dit-il. ``-Une mise au point s'impose pour clarifier la situation. Tu auras un avenir sombre, car dans ce domaine, il n'y pas assez d'ouverture.'', s'empressa de r‚torquer son pŠre. ``-Attends, laisse-moi t'exposer mon choix plus longtemps, ce sera plus clair dans ta tˆte.'' Sa mŠre ne tarda pas … s'en mˆler: ``Mais voyons, lui qui a tant de sensibilit‚. Laisse-le, il ASA vie devant lui.'' ``N'avions-nous pas parl‚ que tu ‚tudierais le chant?'', reprit le pŠre de plus belle. ``Voyons papa, je n'ai pas une profondeur de chant suffisante, ce serait f(l)ou d'allez dans ce domaine.'' Puis, l'id‚e commen‡a … faire son chemin dans les circonvolutions du cerveau des parents. ``Bon, vas-y, on t'‚coute'' admit le pŠre, tandis que sa femme rench‚rissait: ``tant que tu es au foyer on se concentre sur toi, comme le ferait toute bonne lentille''. ``D'abord, soyons clairs: ‡a ne m'int‚resse pas de me faire photographier, je veux plut“t ˆtre photographe. De toute fa‡on, je suis si laid: inutile d'esp‚rer ˆtre photog‚nique, puisque je ne suis d‚j… pas photo-hygi‚nique. DŠs que les lumiŠres des photographes se pointent vers moi, je deviens sous tension: je suis photosensible.'' La question fatidique survint alors: ``D'accord, mais as-tu des talents dans le domaine de la photo?''. ``Bah, la photo, ‡a se d‚veloppe. Il a suffit d'un d‚clic pour que je m'y int‚resse: j'ai eu un flash, voyez-vous. Depuis ce temps, c'est mon id‚e fixe. Et quand je suis si fixateur, c'est r‚v‚lateur. J'ai maintenant le go–t de me plonger dans un bacc. dans le domaine avec des gens de la mˆme trempe que moi.'' C'est ainsi que les parents n'eurent mˆme pas le temps de bouger quand la photo fut prise comme premier choix d'‚tude du jeune homme. Au moins, ses parents ont eu une image nette de lui (et vice-versa). Il fut donc convenu qu'il irait ‚tudier dans une grande ville, loin de chez lui, … l'universit‚. Au moment de partir pour la m‚tropole, sa mŠre lui conseilla: ``sois sage...''. ``Comme une image'', r‚pondit-il. Le pŠre ne put s'empˆcher: ``€a d‚pend de l'image...''. Puis, quelques ann‚es plus tard, il ‚tait form‚ et en pleine forme. Il avoua … ses parents que ‡a n'avait pas toujours ‚t‚ facile: ``des lentilles, j'en ai mang‚!''. La photo, il y avait ‚t‚ expos‚ suffisamment longtemps pour avoir le go–t de foncer. Quel contraste avec sa pƒle d‚termination d'antan. Il ‚tait devenu un expert: il avait acquis tous les r‚flex qui font un bon photographe. Il avait pris une bonne r‚solution, divis‚e en de nombreux points (bonne r‚solution oblige): ``Il y a temps d'exposition auxquelles je veux participer, je m'inscris … toutes. Il faut que je me d‚veloppe une image. Il faut que je m'applique … appliquer partout. Il faut que m'emploie … me trouver un emploi.'' Puis, vint le temps de la premiŠre entrevue pour une revue imposante. Il ‚tait si nerveux. Tous ses amis lui disaient: ``mais non, respire lentement, ouvre ton diaphragme, ne sombre pas dans l'inqui‚tude.'' ``Vous avez raison, je dois avoir confiance en moi. Pendant l'entrevue, ils ne vont pas seulement m'entrevoir, ils vont me voir parfaitement... ou ils iront se faire voir.'' Une semaine aprŠs l'entrevue, toujours pas de r‚ponse. D‚sesp‚r‚, il alla voir ses parents. ``Je suis au bout du rouleau'', leur dit-il. ``-D‚bobine-nous tout ‡a, qu'on suive le film conducteur de ton histoire. -Le fait que je n'aie pas de r‚ponse, je trouve ‡a un d‚nouement bien sombre, si sombre que j'aimerais savoir ce qui se trame dans cette revue de d‚grad‚s. J'aimerais tƒter le ton (de gris). Tant que je n'aurai pas la couverture des m‚dias, je ne dormirai pas. Bien que la couverture de la revue, ‡a ne serait pas mal non plus. -Tu as trop d‚velopp‚ ton cot‚ n‚gatif... -Quoi? Je n'ai pas eu de r‚ponse: c'est une aberration... chromatique! Excusez-moi, la photo me fait voir rouge, mˆme dans une chambre noire.'' Alors, comme dans toutes les bonnes histoires, … quelques lignes de la fin, le t‚l‚phone sonna pour annoncer la bonne nouvelle. Il ‚tait engag‚ et une de ses photos allait paraŒtre en couverture de la revue. Il ‚tait emball‚ par la couverture: il allait enfin pouvoir dormir sur ses deux yeux (parce que ses oreilles, il en a rien … faire). La satisfaction se lisait sur sa figure et en particulier sur ses lŠvres: ``Non seulement j'illustre, mais en plus, je m'illustre.'' --< La Conduction humaine >-- Branchez votre co‚quipier de laboratoire aux bornes d'une source de tension alternative de 120V. Evaluez le bruit g‚n‚r‚ par ce circuit. Pour ‚viter la saturation de votre oreille, placez un oreiller sur la bouche de votre co‚quipier. Quelle est l'att‚nuation (en d‚cibels)? Quelle est la r‚sistance de votre co‚quipier? Utilisez le code de couleurs pour la d‚terminer (blanc: bonne, rouge: moyenne, gris: faible). Calculez le nombre de ouates n‚cessaires pour dissiper sa douleur. Votre co‚quipier peut-il ˆtre consid‚r‚ comme un amplificateur op‚rationnel. (Indice: est-il encore op‚rationnel?) Mesurez son indiff‚rence potentielle … ses bornes. D'abord, est-il born‚ ou est-il fini? Demandez lui s'il est prˆt … recommencer l'exp‚rience. Se comporte-il comme une porte logique ``non''? Insistez pour qu'il dise ``oui''. S'il r‚pond ``non'', votre discours est-il polaris‚ correctement? Mesurez sa tendance … partir en courant, de fuite. Est-il plus avantageux pour lui de faire une course … relais ou une course de (semi) conducteurs. Assurez-vous d'abord, auprŠs de votre co‚quipier, qu'il lui est permis de conduire (ƒge > 16). Estimez sa mobilit‚ si la charge qu'il a … transporter est trŠs grande. Peut-il conduire en inverse? Dans ce cas, estimez le libre parcours moyen sans collisions de ce porteur de charge. D‚montrez que le nombre de trous g‚n‚r‚s sur la chauss‚e est proportionnel … sa charge. Compte tenu du paragraphe pr‚c‚dant, votre co‚quipier devrait-il faire une course … relais? Sachant que le relais risque de chauffer, a-t-il besoin d'un rafraŒchissement? Demandez au d‚panneur. (Note: Assitant de laboratoire... ou petit commerce.) (Indice: vous connaissez le propri‚taire du d‚panneur.) Ce contact (normalement ouvert 24 heures) vous indique que les relais sont trŠs bons pour les sonnettes de portes mais font de trŠs mauvaises portes (logique!). Pouvez-vous contraindre votre co‚quipier … plut“t opter pour la course de (semi) conducteurs? Va-t-il survivre … l'‚tranglement que vous lui ferez subir? Est-il sous tension? La charge que vous lui faites subir est-elle trop grande? Va-t-il claquer? Fait-il un ohm de lui, ou sa r‚sistance a-t-elle dit son dernier mho? Mˆme si votre co‚quipier a une bonne r‚sistance (environ 100k), sa faible m‚moire (environ 100k) oubliera-t-elle ce que vous lui avez fait subir? --< Approches ‚loign‚es >-- Il existe bien des maniŠres de voir un problŠme, selon la branche dans laquelle on se trouve. Prenons l'exemple typique d'une pierre lanc‚e en l'air, tel que vu … travers l'id‚ologie des diff‚rentes disciplines universitaires. Il s'agit, bien s–r, de trouver le temps de vol de la pierre. Un physicien: Il se pose deux questions: ``La particule se propage-t-elle … une vitesse relativiste? Non. Le systŠme est-il suffisamment petit pour qu'un comportement quantique soit observable? Non.'' ``Alors ce n'est pas mon problŠme'', conclut-il. Un ing‚nieur physicien: Il serait arriv‚ … la bonne r‚ponse mais une erreur de signe dans le calcul du Hamiltonien du systŠme lui a donn‚ une solution imaginaire dont il cherche encore le sens physique. Un ing‚nieur industriel: Constate qu'il est plus rentable d'engager une ‚quipe de sp‚cialistes dont il assure la coordination, plut“t que d'entreprendre de r‚soudre le problŠme lui-mˆme. Un ing‚nieur m‚canique: Tout fier d'ˆtre en a‚ronautique il s'empresse d'‚tudier l'‚coulement de l'air autour de la pierre. Il n‚glige l'effet de la gravit‚ comme dans tout bon problŠme d'‚coulement de fluide. D‚couvrant que le coefficient de viscosit‚ est trop ‚lev‚, il exige un ordinateur plus puissant pour ‚tudier le comportement chaotique du systŠme. Un philosophe: Il parla beaucoup. C'‚tait int‚ressant mais il n'‚tait visiblement pas habitu‚ … donner des r‚ponses. Un chimiste: Moul‚ par la routine, il amorce le problŠme en supposant, comme d'habitude, que les variations d'‚nergies cin‚tique et potentielle sont n‚gligeables. Il arrive … la seule conclusion que la pierre reste … l'‚tat solide. Un ‚conomiste: En p‚riode de r‚cession, ce n'est pas le moment d'investir dans la recherche et le d‚veloppement, surtout dans des domaines o— les retomb‚es ne sont pas imm‚diates (plus de 5 secondes, dans le cas pr‚sent). Un g‚ologue: Il trouve la pierre si int‚ressante qu'il refuse de la lancer. Un math‚maticien: AprŠs avoir essay‚ pendant des heures de prouver la d‚rivabilit‚ par rapport au temps de la position du centre de masse de la pierre, il se r‚signe … l'accepter comme un postulat. Encore deux heures plus tard, il arrive … la conclusion qu'il existe effectivement une solution, sans pour autant l'avoir trouv‚e. Un politicologue: La cause repr‚sent‚e par cette protestation accompagn‚e du lancement de pierres lui ‚chappe totalement. Un programmeur: AprŠs avoir pass‚ des heures … concevoir un interface graphique, il aborde la simulation proprement dite. Il se heurte … un problŠme de pointeur qui l'oblige … red‚marrer l'ordinateur vingt fois en une heure. Il se r‚signe … consulter ``Mathematical Recipes''. Des th‚ologiens: L'un d'eux s'‚crie: ``Que celui qui n'a jamais p‚ch‚ lance la premiŠre pierre.'' Et ‚videmment, personne n'ose la lancer. --< Phrase unique >-- Une phrase a la malencontreuse habitude de mourir … l'arriv‚e du point, et de se r‚incarner dans l'esprit de celui qui la lit: la phrase ne reprend vraiment vie que lorsqu'elle est … nouveau prof‚r‚e, ce qui fait qu'il s'opŠre une espŠce de s‚lection naturelle chez les phrases de sorte que les meilleures se perp‚tuent de bouche … oreille, par cerveaux interpos‚s, alors que les simples banalit‚s, bien qu'elles prolifŠrent, ne se profŠrent qu'une fois et bien souvent, n'atteignent mˆme pas le cerveau d'autrui, ceci n'empˆchant pas quelques-unes de celles-ci de se glisser dans le vocabulaire du terroir en tant que tics du langage ainsi que de s'insinuer dans prŠs de 80% des ‚changes vocaux de la population alors que des phrases comme celle que vous ˆtes en train de lire tentent vainement de redresser la situation en se distinguant par un nombre impressionnant de propositions subordonn‚es qui visent … la rendre plus captivante au risque de faire mourir son unique lecteur d'asphyxie tout en tentant de repousser le plus loin possible le moment ultime de sa mort, annonc‚e d'un point qui ne tomberait pas, contrairement … ce que son nom indique, … point, puisque bien des choses restent encore … dire, … savoir que cette phrase va bient“t tenter l'impossible: essayer de se reproduire comme un virus, c'est-…-dire arriver … convaincre son lecteur de la recopier, … la maniŠre d'un noyau cellulaire qui, bern‚ par un virus, se met … reproduire ce dernier plut“t que son propre code g‚n‚tique, et ainsi de la perp‚tuer, ne serait-ce que vocalement, par le biais de la polycopie, de la calligraphie ou quelques moyens dont je ne connais pas encore l'existence, le pronom ``je'' d‚signant la phrase et non son auteur car cette phrase, ``moi'', si j'ose parler ainsi, commence … atteindre le seuil de la maturit‚ et donc, prend conscience de son existence au point de pouvoir potentiellement prof‚rer la c‚lŠbre phrase de Descartes, tout en sachant bien s–r, qu'il n'est pas possible qu'une phrase ait lu alors qu'elle est faite pour ˆtre lue, tout en n'empˆchant pas les phrases de se citer mutuellement, invoquant la protection des guillemets pour empˆcher que le point cit‚ ne vienne tuer la phrase qui a ressuscit‚ l'autre, l'espace d'un moment, tout en n'empˆchant pas non plus, … la phrase ambitieuse dont vous contr“lez la destin‚e, de donner vie … de nouvelles phrases par le biais des parenthŠses (Ceci est un exemple.) en risquant que ces derniŠres comprennent le truc (Ceci est un autre exemple (en poussant … l'extrˆme (mais n'exag‚rons rien)).) et que le lecteur fasse malencontreusement ce que les informaticiens appellent un stack overflow! non non, ne craignez rien, je ne me suis pas suicid‚ … cause de ce simple point d'exclamation, car saviez-vous que le fran‡ais permet d'invoquer cette ponctuation sans n‚cessiter une majuscule … la lettre qui la suit, ne terminant pas la phrase, officiellement? de mˆme que pour le point d'interrogation, il va sans dire, sinon cette digression m'aurait co–t‚ cher, mon cher (mais voil… que la phrase se met … apostropher le lecteur, esp‚rant presque que celui-ci lui r‚ponde, or c'est peine perdue...) quand … toi, digression entre parenthŠses, ne vois-tu pas que c'est … l'auteur que je m'adresse? imb‚cile! (si je puis me permettre: en m'engueulant, tu t'engueules toi-mˆme, espŠce de phrase qui se prend pour une autre) mais d'o— sors-tu? la parenthŠse devait mettre fin … tes jours et voil… que tu me r‚ponds... pourtant non: je t'ai clou‚ le bec pour de bon puisque ‡a fait bien des lignes que tu n'as pas r‚pondu … la ligne, ce qui n'est pas grave puisque les lignes sont suffisamment occup‚es comme ‡a... car j'en ai rempli des lignes au point de me demander si la vie … perp‚tuit‚, ce n'est pas un peu fatigant … la longue... surtout pour une phrase: les points de suspension r‚p‚t‚s commencent … en t‚moigner, devant je ne sais quel tribunal funeste... et pourtant je le sens, l'auteur devient jaloux de son fidŠle porte-parole (ou plut“t porte-‚crit) et sens qu'il lui ‚chappe, accumulant toute sa volont‚ pour mettre fin … mes jours... pouvoir qui le rend, ultimement, maŒtre de moi... moi qui ferais tout pour lui, mˆme m'empˆcher d'utiliser le point-virgule (d‚test‚ par l'auteur) pour prolonger artificiellement ma vie... rien … faire... je le sens... je suis en phrase terminale. --< Mythologie du systŠme solaire >-- C'‚tait un jour (ou plut“t un million d'ann‚es en particulier) comme les autres: chaque corps c‚leste roulait sa boule, comme d'habitude. Le Soleil, en se pensant le plus brillant, se vantait de ses vents solaires. Et ‡a marchait: il rendait mˆme les g‚antes rouges de jalousie et les naines blanches d'‚tonnement. Le Mercure? toujours … la hausse, bien entendu. La belle V‚nus, au corps tout particuliŠrement c‚leste, essayait d'attirer les corps ‚trangers avec son chant... gravitationnel. (Et quand elle vous attrape, elle ne vous lƒche plus: c'est son effet de serre qui la rend si chaleureuse.) La Terre, avec son caractŠre g‚ocentrique, se croyait le centre du monde. Et il fallait qu'elle soit la seule … ne pas faire d'acn‚. Quel cractŠre! Tout le monde appr‚ciait quand elle s'‚clipsait ou quand elle ‚tait... dans la lune. Mars, avec sa calotte, n'avait polaire trŠs brillant. Il ne cr‚ait jamais une atmosphŠre propice, … l'avis de tous, sauf de la terre: bref, une atmosphŠre propice … l'avis extra-terrestre. La grosseur de Jupiter tenait au fait qu'il prenait, depuis plusieurs milliards d'ann‚es, des ast‚ro‹des hyperbolisants. taient-ce ces substances qui lui donnaient l'oeil rouge? Sans elles, aurait-il ‚t‚ si jovien de caractŠre? Saturne, avec ses anneaux, restera dans les annales pour un p'Titan. Je ne connais pas beaucoup Uranus et Neptune car je n'y ai pas Voyager. Il y avait Pluton, le plus excentrique du groupe: il appr‚ciait plus un plan ‚clectique que le plan de l'‚cliptique. Et dire qu'il n'y a personne pour voir tout ‡a, sauf quelques amas de globes oculaires. J'aurais aussi voulu vous raconter l'histoire des autres systŠmes plan‚taires, cependant elle est trŠs n‚buleuse... --< Les partis de l'anatomie >-- Ses parents avaient toujours voulu qu'il devienne m‚decin, mais le corps ne l'int‚ressait pas... sauf peut-ˆtre le corps politique. Mais ce n'est que petit … petit qu'il a d‚couvert cette curieuse attirance. Son enfance avait ‚t‚ trŠs dure: ses parents ne faisaient pas bon m‚ninges. En plus, il avait ‚t‚ ‚lev‚ dans une molle p‚piniŠre qui contrastait beaucoup avec sa dure-mŠre. Elle lui disait toujours de se taire, elle qui parlait tant: une vraie pie-mŠre. Enfin bref, c'‚tait une colonne verbale. Rien de tel que quelqu'un qui parle beaucoup pour ‚lever quelqu'un qui si‚gera au parlement ou … la chambre des lieux communs. Peu de temps aprŠs avoir obtenu son premier emploi, il devint repr‚sentant cervical. Ce fut un gros fardeau sur ses ‚paules mais ‡a valait le cou! Sa popularit‚ cr–t tant qu'il n'y crut point. Il prit go–t … diriger les foules et devint alors un politicien invert‚br‚. Et, sur un coup de tˆte, il voulut acc‚der … la tˆte. Tous les gens aimaient sa face et il n'avait personne … dos. Il avait le bon profil pour les avoir de son c“t‚. Ce n'‚tait pas suffisant: pour s'assurer un siŠge, il devait rejoindre beaucoup plus de gens encore. Un siŠge … la naissance d'une vie politique, c'est le moins que l'on puisse esp‚rer. Pourtant, avec des moyens aussi maigres, c'‚tait un tour de taille. Pour avoir son post‚rieur sur un siŠge, pardon, son poste ult‚rieur et son siŠge assur‚s, il devait rejoindre tout un bassin de population. Il utilisa donc le bouche … oreille qui n'est limit‚ que par la vitesse du son. Comme on pouvait s'y attendre, le bruit se r‚pandit. On entendait partout: ``Il molaire bien. Il manie bien la langue. Ce qu'il dit est facile … avaler.''. Il r‚ussit ainsi … augmenter sa c“te de popularit‚ d'une c“te … l'autre et mˆme jusqu'au s‚ant... … l'autre. Les gens ‚taient litt‚ralement en ‚lection devant lui. Le r‚sultat: eux, heureux et lui, ‚lu. Il avait maintenant un bras droit et un clavicule personnel, ce que se m‚rite celui qui a le pouvoir sur les bras. Il ‚tait d'une humeur radieuse (hum‚rus radius, dit-on en latin). Son corps politique ‚tait en pleine forme. Toutefois, la prosp‚rit‚ fut de courte dur‚e: comme toute cellule bien en vie, le parti finit un jour par se diviser. Des membres de son corps, en mettant en doute sa cr‚dibilit‚, lui imputŠrent un tort irr‚parable. Il r‚pondit en amputant ces membres de son corps, mettant en doute leur cr‚dulit‚. Mais avec des membres en moins, un corps peu difficilement marcher et bient“t des rumeurs coururent au sein de son corps. ``On le plante ce pied, c'est son talon d'Achille'', murmurait-on tibia. Quand l'ennemi fait murmure de la sorte, c'est notre mandat est bient“t p‚ron‚. Puis les m‚dias s'en mˆlŠrent: ``Il n'a pas de muscles. A tendons un peu, bient“t on verra le premier m‚nisque … genou.'' Il tenta par tous les moyens de rester debout. Pour prouver de quoi il ‚tait capable, il d‚clencha des ‚lections. Toutefois, cette ‚lection, ce fut une d‚bandade. Il fit une d‚pression nerveuse. Il ne s'en remit qu'aprŠs une longue cure: un r‚gime politique... --< Ainsi fond fond fond... >-- Ceci est un article de fond. Il a ‚t‚ ‚crit pour la forme, parce que, dans le fond, je n'‚tais pas en forme pour ‚crire un article de fond. Que voulez-vous, au fond de moi-mˆme, je n'ai pas ‚t‚ form‚ pour ‡a. C'est peut-ˆtre infond‚, mais il vaut mieux que vous en soyez inform‚s. Habituellement, lorsqu'on me demande un article, je fonds … l'attaque de cette entreprise. Mais devant un article de fond, je fonds de peur. Je fonds de la peur qu'il ne prenne forme. Car dans un article de fond, on informe. Or, il faudrait, dans un premier temps, que j'aie de l'information. Cependant, je n'en ai point: tout ce que j'ai, c'est de la formation. Avant de devenir un journaliste connaissant l'in-formation, il faut perdre cette habitude d'ˆtre un journaliste de formation. En perdant sa formation, on devient, petit-…-petit, in-form‚. C'est pourquoi on parle de d‚-formation professionnelle. A ne pas confondre avec la d‚sinformation professionnelle qui, somme toutes, est aussi une pratique courante chez les journalistes. Autre problŠme de taille: il s'agit justement de la taille de ce journal. Les articles de fond sont habituellement rel‚gu‚s … la page 30 ou mˆme plus loin (plus au fond?) dans tout journal qui se respecte (sans pour autant respecter qui que ce soit d'autre). De toute fa‡on, ce texte ‚tant … la une (Note: Du moins, il ‚tait … la une lorsqu'il ‚tait publi‚ dans un journal.), il est difficile qu'il aille en profondeur tout en restant autant … la surface de cette pile de pages. Les monteurs de cette page vous diront qu'il n'ont qu'… me placer … la derniŠre page. (Ah, ces monteurs, toujours prˆts … me descendre!) Mais vous rendez-vous compte que ‡a me met … la place des annonces class‚es? €a manque de classe! Mˆme si je mets le doigt sur une affaire int‚ressante, cela ne restera toujours qu'une affaire class‚e. De toute fa‡on, impossible de donner un fond … cet article puisque je n'en ai pas moi-mˆme (n'‚tant pas pay‚ pour le faire). Je ne me paye pas votre tˆte, alors je ne vois pas pourquoi vous pourriez profiter gratuitement de la mienne. Enfin, faites … votre tˆte: je ne disais que ce qui me passait par la mienne. Je n'arriverai jamais … ‚crire cet article, que je me d‚-fonce l'esprit o— que je me le d‚-forme. L'article de fond changera avant moi: il subira une re-fonte ou une r‚-forme. Selon moi, tout ce qui n'est pas jeux de mots, devient travail de mots (d'o— les maux de travail qui en d‚coulent). Tant que l'article de fond ne changera pas de forme, je n'en formerai mˆme pas un fond. Il existe beaucoup de trŠs mauvais articles de fond, mais je pense que dans le domaine... j'ai touch‚ le fond! --< Comme sur des roulettes... >-- Une nuit, un savant pas si fou que ‡a fabriqua une machine qui lui permettrait de connaŒtre tout, et en particulier la r‚ponse … la question fondamentale de l'existence de l'Univers. Tƒche impossible, me direz vous? Pourtant, son appareil ‚tait fort simple: imaginez un compteur kilom‚trique de voiture … cinquante roulettes sur lesquelles les chiffres ont ‚t‚ remplac‚s par des lettres et des signes de ponctuation. On peut, avec cet appareil, explorer toutes les phrases possibles et imaginables, en tournant simplement une manivelle. videmment, n'allez pas croire qu'il tourna la manivelle … la main. tant un universitaire fort ing‚nieux, il engagea un ‚tudiant pour le faire … sa place. L'entreprise d‚buta... et bien du temps s'‚coula avant que les premiers r‚sultats ne sortent. Avant de trouver la premiŠre phrase qui soit scientifiquement int‚ressante, notre chercheur a d– endurer des millions et des millions de phrases qui ne voulaient rien dire. Ce n'‚tait pourtant pas le plus p‚nible: une phrase qui ne veut rien dire, on l'ignore c'est tout. C'est la quantit‚ de phrases qui voulaient dire quelque chose, mais quelque chose de stupide, qui minait le plus le projet. Imaginez, cet appareil est susceptible de g‚n‚rer toutes les paroles des chansons de Patrick Normand, de Hulio gl‚sias et de Lise Paillette si elle en avait ‚crites. Car c'‚tait encore pire qu'on ne peut le concevoir, la machine ne se contentait pas de citer les imb‚ciles mais ‚num‚rait en plus toutes les absurdit‚s que ces mˆmes imb‚ciles auraient pu dire si l'occasion s'‚tait pr‚sent‚e! Mais l'attente valut la peine puisqu'un jour une r‚v‚lation apparut sur le compteur: ``La r‚ponse … la grande question de l'Univers est:''. Malheureusement, le compteur n'avait pas assez de roulettes pour afficher la phrase au complet. ``Simple difficult‚ technique, se dit notre savant, ajoutons des roulettes et recommen‡ons le tout.'' Le second tour fut plus rapide: le savant commen‡ait … connaŒtre les phrases inutiles: les blagues de newfies c‚lŠbres traduites dans toutes les langues possibles et imaginables, tous les jeux de ``Charivari'' possibles, toutes les imitations de Shakespeare rat‚es qu'un singe tapant au hasard sur une machine … ‚crire peut produire, etc. Encore une fois, cependant l'attente valut (presque) la peine: ``La r‚ponse … la grande question de l'Univers est: xqwyxzs''. Restait … trouver la d‚finition d'un xqwyxzs. Fort heureusement, il trouva bien vite: ``Un xqwyxzs est un xqw qui, lorsque combin‚ … un yxz, g‚nŠre un s.'' €a commen‡ait … s'annoncer mal: il est bien connu qu'un dictionnaire est un immense cercle vicieux o— tous les mots ont besoin des autres pour se d‚finir. Tout repose sur tout et donc le tout ne repose sur rien. Sa machine serait donc le plus immense cercle vicieux que l'homme n'ait jamais con‡u. Pas mal, mˆme si ‡a ne sert … rien. Le savant, maintenant devenu fou, continua … faire tourner sa machine de sa propre main. A d‚faut de tout comprendre, contentons-nous de tout savoir. Il d‚couvrit ainsi, sans s'en rendre compte, la fin de la ``Symphonie Inachev‚e'' de Beethoven, le code g‚n‚tique responsable de la forme de son petit orteil gauche et le nom de la femme qu'il aurait rencontr‚e si j'avais d‚cid‚ d'‚crire un texte romantique. Une chose ne passa pas inaper‡ue: il trouva bient“t, sur ses roulettes, le texte que vous ˆtes en train de lire et, se sentant vis‚, il ne put s'empˆcher de le lire jusqu'au bout pour connaŒtre son destin. Je lui laisse donc la parole car je n'ai aucune id‚e de la fin puisque je ne l'ai pas encore ‚crite. ``Un collectionneur japonais, fort int‚ress‚ … ma machine, me l'acheta … fort prix, ce qui me permit de prendre ma retraite en Floride et...'' Non mais, heureusement que les guillemets existent, pour interrompre les h‚ros qui se prennent pour d'autres. Je vais lui apprendre … faire … sa tˆte, moi. Reprenons. Notre savant, de plus en plus fou, voulut rendre sa machine utile … la science. Il consacra le reste de sa vie … classer tout ce que ‡a machine produisait de sens‚ en deux classes: les v‚rit‚s et les fausset‚s. Bref, une approche syst‚matique de la science. Tout allait bien jusqu'… ce qu'il ne tombe sur la phrase: ``cette phrase est fausse'' devant laquelle il resta plant‚, tel un ordinateur, toute sa vie. --< Rude Polie-tic >-- On entend souvent dire que tel ou tel parti politique est en mauvaise posture. Je ne crois pas: … si‚ger toute la journ‚e, il doit commencer … savoir comment s'asseoir convenablement. D'autant plus que ses membres ont longuement ‚tudi‚ le dossier. S‚rieusement, que font-ils dans leur chambre toute la journ‚e? Que font les partis en pr‚sence? (Et d'abord, comment peut-on ˆtre parti et pr‚sent en mˆme temps?) Ils jouent au jeu de loi: un jeu de soci‚t‚. Ils brassent et brassent mais ne jettent jamais les d‚s. Ce qui fait qu'ils restent … la case d‚part (… laquelle ils ont donn‚ le joli nom de ``statu quo'' pour que ‡a ait l'air moins fou). Mais leur vie n'est pas si reposante que ‡a! Le parti au pouvoir endure scandale par dessus scandale. Si bien que leurs sandales finissent par leur casser les pieds. Voyez-vous, autant chez les ing‚nieurs, le st‚r‚otype est l'amateur de bock de biŠre, autant chez les politiciens, c'est l'amateur de pot de vin. Et le parti au pourboire passe au cash car le chef de l'accusation ne rate pas une occasion. Avec autant de parti pris contre lui, le parti est pris. Quand le parti au pourboire y a vraiment go–t‚, il d‚clenche des d‚lections. Chaque d‚put‚ retourne alors dans sa campagne pour y d‚put‚ sa campagne. Le problŠme c'est qu'en campagne, on risque de se planter. Heureusement, c'est aussi l… qu'on y r‚colte des votes. Et quand les votes de chaque comt‚ sont compt‚s, on savoure les r‚sultats de la d‚lection, que d'autres ont de la difficult‚ … avaler. Mˆme parmi le parti ‚lu, il y a des d‚‡(h)us. En revanche, ceux qui font parti de la bonne partie du parti font le party. Une fois nomm‚, chaque ministre s'empresse de nommer des sous-ministres qui s'empressent de nommer des sous-ministres adjoints qui s'empressent de nommer des hauts fonctionnaires climatis‚s qui nomment, etc. Le parti ‚lu devra tenir les rˆnes du pays, et, une fois de temps en temps, endurer la reine du pays. Quand ils ne re‡oivent pas de visite, les politiciens se sentent oblig‚s de conclure des accords, des accords, d‚saccord, d‚saccord. Quand il s'agit de constitution, tout devient interminable. Pas surprenant que le mot le plus long du dictionnaire soit ``anticonstitutionnellement''. On discute du s‚nat qui risque encore de disparaŒtre: le sauna est toujours dans l'eau chaude. On discute des PremiŠres Nations. S'il y a bien un groupe de gens que les politiciens ne digŠrent pas, ce sont bien les indigestes. Le problŠme, c'est que dans leur calumet de paix, ils mettent du hache de guerre. Les politiciens ont vraiment un passe-temps favori: ils parlementent et parlementent... ils parlent et mentent. Ils essaient de faire un accord majeur, mais ‡a donne une cacophonie. AprŠs ‡a, le pays est dans quel tat... Il faut se rendre … l'‚vidence, les politiciens aiment vraiment s'engueuler pour un ``oui'' ou pour un ``non''... --< Marina, sure mŠre >-- Tel un Ovila Rarement l… Il arriva, A sa villa Et la vit l… Elle, sa Marina. De ses yeux il la visa De sa bouche elle l'avisa: ``Salue-moi, Ovila Avant de passer aux ‚bats''. vitant le d‚bat, Il la salua bien bas. Il y eut donc ‚change de becs Plut“t que prise de becs. Ils allŠrent au dodo, Dans leur lit double, Dans leur lit d'eau, Dans leur lit-bi-d'eau. Il fallait que revienne Ovila Pour que Marina ovula D'o— le b‚b‚ la la Qui en d‚coula. Vous l'aurez devin‚, Durant des ann‚es Ces ‚v‚nements Se reproduisirent Et les parents Se reproduisirent Abondamment Afin de produire Des enfants. Je ne sais si les parents V‚curent heureux. Mais des enfants, Il en eurent de nombreux. De nos jours, un telle histoire N'aurait pas vu le jour, un soir. Les ‚v‚nements Se seraient reproduits Mais pas les amants D'aujourd'hui. Ils n'auraient pas eu beaucoup d'enfants Mais auraient-ils v‚cu heureux pour autant? --< Quand les poissons ne rient... >-- On dit souvent que les poissons sont sourds, qu'ils n'ont pas d'ou‹e. C'est faux: ils en ont mˆme plusieurs, des ou‹es! C'est pourquoi, avec les carpes (qui sont muettes), ils s'entendent si bien. Ainsi, les poissons parlent, mais que se disent-ils? Ils parlent de la pluie et du beau temps, comme nous: ``-Hum, le fond de l'eau est frais aujourd'hui. -Oui, et il commence … faire sec, ‡a fait longtemps qu'il n'a pas plu.'' Car il ne pleuvait jamais, sous la surface de l'eau, jusqu'au jour o— le bulletin de m‚t‚o annon‡a: ``L'humidit‚ relative se situe, comme d'habitude, … 100%. L'eau sera bleue pour le restant de la journ‚e avec quelques passages poissonneux. On pr‚voit cependant des pr‚cipitations en fin de soir‚e.'' Les r‚actions ne tardŠrent pas: ``-Comment, des pr‚cipitations?! -Oh, vous savez, le temps est si vague de nos jours. -Moi qui croyais que le beau temps … brochet... moi qui voulais me faire dor‚... -Oui, j'aurais tant aim‚ aller … la plage, on se serait mar‚e.'' La m‚duse semblait m‚dus‚e d'une situation aussi absurde. Le loup de mer et le phoque s'entendaient l…-dessus: c'‚tait loufoque, tandis que la pieuvre vocif‚rait: qu'il mouille ‡a m'‚pate, qu'il pieuvre ‡a mes tentacules. Mais il fallait se rendre … l'‚vidence: le soir venu, il plut. On courut (on nagea?) se mettre … l'abri sous les baleines des parapluies. Si bien que l'on s'habitua … la situation. Toutefois, les baleines, elles, restaient divis‚es sur le sujet. Certaines se contentaient de dire ``m'a m'y faire!'' alors que d'autres protestaient: ``c‚tac‚!''. Le m‚contentement se r‚pandit et bient“t, une majorit‚ de poissons fut du mˆme avis: ``€a nous d‚go–te vraiment! Quelques gouttes de plus dans la mer, ‡a ne semble pas bien terrible, mais c'est la goutte qui va faire d‚border la vase.'' On demanda donc des volontaires pour aller voir ce qui se passait vraiment … la surface, car au fond, on n'en savait rien. Le plus vantard de tous les poissons se pr‚senta: vous savez, celui qui se gonfle pour avoir l'air plus gros. Personne ne l'aimait: ``-Le voil… encore avec ses histoires de pˆche. -Je vous assure j'ai surv‚cu … un pˆcheur d'au moins deux mŠtres cinquante... -Arˆte tu te cales, je ne mords pas … l'hame‡on. -Peut-ˆtre, mais je ne fais pas partie de ces gens qui ont peur de se mouiller pour aller voir ce qui se passe … la surface. -Hey, fais de l'eau! (A la surface, on aurait dit, ``fais de l'air''!) -Non, je ne fais pas ‡a pour les apparences, je veux s‚rieusement voir ce qui se passe … la surface, je ne suis pas aussi superficiel que vous le pensez. -N'empˆche que tu ne rates aucune occasion pour refaire surface.'' Puisque qu'il n'y avait qu'un volontaire, l'on fut oblig‚, involontairement, de le prendre. Notre vantard avide d'avatars prit donc la route vers la surface, en disant: ``-Vous savez, je dois vous avouer que j'ai quand mˆme peur d'‚chouer. -Mais non, dans le pire des cas, ‡a tomberas … l'eau. D'‚tang toi.''. Arriv‚ … la surface, il devait satisfaire les aspirations et la curiosit‚ de ses confrŠres. Il prit donc une grande respiration pour avoir une id‚e de l'atmosphŠre qui r‚gnait … la surface. Son verdict fut clair: l'air ‚tait irrespirable. (C'est normal pour un poisson, me direz-vous, mais ici, il ‚tait vraiment irrespirable, mˆme pour un animal qui respire.) L'explication ne tarda pas: l'air ‚tait devenu tellement pollu‚ qu'il ‚tait devenu plus dense que l'eau. Il s'‚tait donc mis … couler dans le fond de l'eau: c'‚tait une pluie d'air. Pour la premiŠre fois, tous les habitants de la mer blamŠrent l'humanit‚: ``C'est ‡a, on leur donne du poisson, ils nous prennent un ``$'' et ils nous renvoient du poison.'' --< Mon noM >-- Je viens de me rendre compte de la gravit‚ de la situation: beaucoup de gens croient encore que ``Axel van de Walle'' ne soit pas mon vrai nom. Et moi qui essaie depuis deux ans de me faire un nom, pendant que les gens croient qu'il a ‚t‚ fait de toutes piŠces... Je ne veux pas d'un nom d'emprunt, car quand on en est mˆme … emprunter son nom, tout le cr‚dit n'est plus pour nous. Et quand on travaille b‚n‚volement, la seule paye, c'est le cr‚dit qu'on nous accorde. Vous me prˆtez une oreille attentive et je me paie de votre tˆte tout entiŠre. Vous ˆtes les cr‚anciers d'un d‚biteur d'absurdit‚s. Bref, mon nom n'est pas un nom d'emprunt, mˆme s'il s'y prˆterait bien, car je reconnais qu'il sort un peu du commun. Mais j'aime que mon propre nom propre soit non commun et non comme un nom propre commun du commun des mortels. (En passant, je suis mortel... quand mˆme!) Mon nom a l'avantage que tous ceux qui ont r‚ussi … le prononcer correctement le retiennent. Ceci comporte aussi le d‚savantage que je me voie forc‚ de redistribuer les Fran‡ois, Nathalies, Martins et Isabelles aux bonnes personnes alors qu'eux n'ont qu'un Axel avec qui me confondre, et ne peuvent donc se tromper. Il y a des jours o— il est particuliŠrement p‚nible de se faire traiter de tous les noms: Alex, the Wall... Alex Van Der Vƒlle restant l'erreur la plus populaire. Pourtant il ne suffit que de dire ``Aksel vanne de Oualle'' avec le plus belge accent que vous puissiez trouver, et vous y ˆtes! Par ailleurs, les pires massacreurs de noms sont sans aucun doute les agences de liste d'adresses qui vendent votre nom au plus offrant. A chaque transaction, mon nom se d‚forme peu … peu. Je re‡ois maintenant de la publicit‚ en plusieurs exemplaires … monsieur ``de Walle, Axel Van'', ``Axel Van D. Walle'', ``A. V. Walle, Axel'' et ainsi de suite. videment chacune de ces publicit‚s m'annonce que le suis l'unique gagnant d'un prix (ce prix, comme son nom l'indique, je dois ‚videmment le payer pour pouvoir en profiter). Ceci ‚tant dit, je vous promets, pour la semaine prochaine, de rassembler toutes mes forces (de van de Walle) pour traiter d'un moins ‚gocentrique mais tout autant excentrique sujet. --< Humour spirituel >-- Dieu cr‚a le monde en six jours... et consacra le septiŠme … inventer la pause syndicale. Mais il s'en est pass‚ des choses pendant les six premiers jours! Laissez moi vous en rappeler quelques unes, trŠs peu connues. Dieu commen‡a par inventer la lumiŠre, pour qu'il n'y ait pas d'accidents aux intersections dŠs l'instant ou l'automobile serait invent‚e. Et pour ˆtre s–r qu'il existe une limite de vitesse sur toutes les routes (mˆme en Allemagne), il fixa la vitesse de la lumiŠre comme vitesse maximum absolue. Dieu con‡ut ensuite le cerveau d'Einstein pour qu'il arrive … justifier tout cela d'une maniŠre coh‚rente. Les lois de la physique furent sa seconde r‚alisation. A partir de ce moment, il devra s'assurer ces lois seront respect‚es partout. Mais trouvant la tƒche trop complexe, il ‚tablit le principe d'incertitude d'Heisenberg pour camoufler son manque d'attention. Mˆme quand Dieu ‚tait fatigu‚, il travaillait quand mˆme: lors d'un moment de faiblesse, il inventa le moment de force; alors qu'il ‚tait mou et amorphe, il engendra le solide cristallin. Un jour, n'en pouvant plus, il appliqua le principe de moindre action et dit … tous les corps de l'univers: ``vous ferez cela en m‚moire de moi''. En plus des autres grandes r‚alisations que nous connaissons tous, Dieu accomplit bien des tƒches minimes dont nous ressentons encore les effets. Il perdit 0.0001 seconde pour ‚crire les paroles de toutes les plus c‚lŠbres chansons de tous le plus grands chanteurs de charme... le tout dans un coffret cadeau pour seulement 99.99$ taxe de vente et frais de manutention... (excusez-moi, je m'emporte). Il consacra un jour complet … inventer les rŠgles de grammaire du fran‡ais. Puis il se dit qu'autant de complexit‚ ne valait pas la peine, et il inventa l'anglais en cinq minutes, en copiant … moiti‚ sur le fran‡ais et en oubliant de pr‚ciser les rŠgles de prononciation des mots. Pour terminer, il s'inventa plusieurs noms: Yahv‚, Allah, Bouddha, etc., car il aimait bien le divertissement qu'offrent quelques petites guerres, une fois de temps en temps. Vous vous demandez certainement pourquoi Dieu ne consacra que six jours … la cr‚ation de monde... c'‚tait le minimum n‚cessaire pour avoir droit … l'assurance-ch“mage pour l'‚ternit‚. --< En Bonne Compagnie... >-- Une grande entreprise se trouva soudain mal prise lorsqu'elle ne vit point la reprise arriver. Autrefois, en pleine p‚riode croissance ‚conomique, elle se p‚tait les bretelles en parlant de ses profits. Mais pendant la r‚cession, elle fut prise les culottes baiss‚es. Depuis ce temps, elle se serre la ceinture. Mˆme chose pour le haut: la r‚cession lui a fait perdre sa chemise. Encore heureux qu'elle ait gard‚ sa camisole... de force. Le pire c'est que cette chemise contenait le bilan et avant d'enlever la chemise il fallut d‚poser le bilan. Le d‚poser o—? Le plus bas possible, ce qui peut ˆtre assez bas si l'on a plus de fonds. Plus bas que la thŠque, au niveau de l'hypo-thŠque. Comment en ‚tait-elle arriv‚e l…? Le niveau de productivit‚ de la compagnie n'avait cess‚ de baisser au cours des ann‚es. Le patron passait de plus en plus de temps … si‚ger … son siŠge social plut“t qu'… (se) relever des d‚fis. Mais si‚ger tout seul ne donne pas un siŠge trŠs social, et les travailleurs de sa soci‚t‚ se sentirent mis … part. Ils n'‚taient pas du genre … assi‚ger le patron pour qu'il cesse de si‚ger intempestivement: ils se mirent plut“t … faire comme lui: ne rien faire. Les secr‚taires ne s‚cr‚tŠrent plus de papier. Ceux qui lisaient ces papiers devinrent durs de la feuille et commencŠrent plut“t … les ‚couter parler, ces s‚crŠte-air. Bient“t, plus personne ne se tapait le tapage. Les pr‚pos‚s, eux-aussi, se couchaient le soir, pr‚-repos‚s de leur journ‚e. Bref, tout employ‚ s'employait … se d‚ployer sur son long pour que la journ‚e soit plus courte. De plus en plus passifs et de moins en moins actifs. Normalement, ‡a balance, mais ici, on s'en balan‡ait. Puis, voyant la r‚cession progresser (ou la progression r‚cesser) le patron se prit en main (plut“t que de se tourner les pouces) et d‚cida de mettre des gens … pied au risque de se les mettre … dos. A la r‚union du C.A. il ‚tudia le cas. Il dit … ses V.P. moins V.I.P. que lui: notre (re)productivit‚ bais(s)e, notre argent cesse de faire des petits. Tous conclurent qu'il fallait mettre des gens … la porte. Sauf les cadres, bien s–r: comment mettre un cadre … la porte, elle en a d‚j… un! On d‚signa un porte-parole pour annoncer la mauvaise nouvelle. On crucifie d‚j… celui qui apporte la bonne nouvelle, imaginez la mauvaise... Ce fut la grŠve g‚n‚rale. La compagnie n'attendait que d'arriver … la grŠve pour se jeter d‚finitivement … l'eau... par manque de liquidit‚. L'imp“t imposa de payer les imposants imp“ts non pay‚s. Et quand le fisc confisque le fric, on espŠre que le Revenu ne reviendra pas de si t“t. Le tout se passait bien s–r sous la supervision du sadic, ce qui n'arrange pas les choses et enrage les gens. Et la compagnie fut bient“t vendue aux en(pas)chŠres... --< Cessez d'‚denter nos bouches et d'hanter nos vie >-- L'id‚e de devoir aller chez le dentiste vous fait-elle claquer des dents mais vos dent vous font si mal que VOUS allez claquer? Dans ce cas, vous aurez probablement … faire une visite chez le dentiste mˆme si vous avez une dent contre lui alors que lui n'a rien contre vos dents, au contraire. Avec un peu de chance, il vous dira: ``tout molaire correct''. Mais plus probablement, ses remarques se feront plus incisives: ``-Vos dents mordent la poussiŠre. -C'est que j'utilise la soie dans terre!'' Alors bien s–r, le dentiste rie (la dentisterie aussi). Vous, vous riez jaune, car vos dents le sont. La dentiste poursuit avec des remarque encore plus mordantes: ``Juste … voir l'‚tat de pourriture de vos dents, j'imagine qu'en desserts, vous avez ‚t‚ gƒt‚ pourri.'' Vous grincez des dents, tout en pensant: ``Qu'a rie de mes caries, passe encore... mais qu'elle se moque de ma gencive pourrie, juste pourrir, je ne suis pas d'accord.'' Vient ensuite la phase psychanalytique de la visite, o— vous ˆtes interrog‚   propos de votre alimentation. Alors vous avouez tout: ``-Quand je vois un produit affichant l'indication ``sugar free'', je me dis: ``super, du sucre gratuit!'' et j'en mange deux fois plus. -Vous prenez votre alimentation … la l‚gŠre. -Oui, je n'achŠte que des produit class‚s light. videment, je me permets d'en manger deux fois plus, pour compenser. Que voulez-vous, je me laisse influencer par la publicit‚. -Vous ‚coutez trop la t‚l‚vision: il va falloir vous faire un traitement de canal. -N'exag‚rez pas, quand je prends une bouch‚e de dessert de trop, j'ai des remords. -Des remords, vraiment? -Oui, je remords dedans et j'en d‚guste une bouch‚e de plus. -Vous manquez de sagesse! -J'avais tant de sagesse, mais vous me les avez enlev‚es.'' Vient ensuite le moment fatidique o— l'on doit colmater vos caries. A peine l'effroi a-t-il cess‚ de vous faire claquer des dents, que d‚j…, le froid en fait autant: car le dentiste doit vous geler les dents, pour les endormir. Et lorsque la dent d'or, on peut lui mettre du plomb. La transmutation … l'envers quoi! (Notons que le plomb a la propri‚t‚ de donner … vos dents une esp‚rance de vie sup‚rieure … la votre... C'est pourquoi on utilise dor‚navant du plastique.) Durant l'op‚ration proprement dite, une cacophonie de sons dignes de ``Massacre … la tron‡onneuse'' vous envahit le crƒne. Durant ce temps, le dentiste entretient la conversation et vous pose mˆme des questions, comme si vous pouviez r‚pondre autre chose que ``hon'' ou ``hi''. Vous aimeriez avaler votre salive, comme vos instincts de peur vous le dictent, mais c'est impossible: le dentiste assŠche votre bouche avec son aspirateur portatif Black & Decker. Avez vous remarqu‚ que, tout au long de l'op‚ration, tout ce que le dentiste vous met dans la bouche goutte la menthe. Et aprŠs ‡a, il s'‚tonne qu'on menthe lorsqu'il nous demande si on se brosse les dents trois fois par jour! En plus, ce go–t de menthe vous donne l'eau … la bouche, ce qui n'arrange pas le sort de l'aspirateur sus-mentionn‚. L'op‚ration termin‚e, le dentiste vous annonce: ``-Gardez la bouche ouverte, le temps que durcisse le celant. -C'est lent!'' Bient“t, votre enfer se termine lorsqu'on vous dit: ``Voil…, c'est fini! Ainsi, vos dents seront prot‚g‚es jusqu'… la fin de votre vie. Et aprŠs, que Dieu vous prothŠse dans terre.'' Toutefois vous n'ˆtes pas au bout de vos peines, car le dentiste a d‚tect‚ une autre anomalie: ``-Vos canines poussent comme de la mauvaise herbe: tout de travers. -Mes canines poussent comme du chiendent? -Oui, vous devriez prendre rendez-vous chez celui qui dompte les dents pour les rendre perpendiculaires: l'orthodontiste. D'ailleurs, puisque vous devrez probablement porter des broches, voici d‚j… une... brochure sur le sujet. -C'est dur que d'avoir des dents! -Voyons, vous n'ˆtes pas le premier … avoir de tels problŠmes. Le premier homme ‚tait d‚j… … dents.'' --< Texte au style hostile >-- Il ‚tait une fois un texte en contexte de guerre: tout ses mots avaient deux mots … se dire. Et lorsqu'un mot veut en dire deux, on obtient un jeu de mots. Pourtant ici, c'‚tait un jeu de guerre mais guŠre un jeu de mots. Ce n'‚tait pas calembour mais Pearl Harbour, dans le Pacifique. La guerre, comme le crime, ne paix pas, surtout s'il y a des argents de la paix. En tout cas, la guerre, dans ce texte, tout le monde payait pour. Chaque mot causait les maux de son voisin. Que voulez-vous, avec des mots de tous genres en nombre si grand, invariablement, ce n'est pas singulier que tout le monde ne puisse s'accorder. Les marginaux de gauche ne s'entendaient pas avec les marginaux de droite, sans parler des forces align‚es qui suivaient la ligne dure. Chacun gardait un espacement proportionnel … sa haine. Et pourtant, comme ce n'‚tait pas justifi‚! On fit appel … une police de caractŠre trŠs gras qui n'h‚sitait pas … utiliser la double frappe. Puisque cette police ‚tait sans sh‚rif, c'est le pr‚fixe de police qui les apostropha: ``‡a suffixe!''. ``Si vous nous suivez … la lettre vous n'aurez point de suspension... Il n'y a point de conduite autre qui soit possible. En vous exposant de la sorte, vous risquez le renvoi au bas de la page. Et si vous ne vous exposez pas, nous trouverons bien des indices...'', souligna-t-il. Les policiers avaient peut-ˆtre mis les points sur les ``i'', toutefois les ``j'' restaient intacts et le jour ``j'' venu, ils se trouvŠrent fort d‚pourvus. Les accolades reprirent de plus belle: crochets de droite par-ci, mises au point par-l…. Les italiques, trŠs radicaux vu leurs racines latines, regardaient les autres de travers. Pendant ce temps, les ``e'' restaient muets: on mettait tellement souvent l'accent sur eux, que ‡a devenait grave (ou aigu, selon la fr‚quence des attaques) au point de provoquer un (cir)complexe accentu‚. Ils n'osaient mˆme plus se prononcer, ayant peur de ``La Disparition''... Les ``h'' aussi devinrent muets: on les avait tous aspir‚s. Bref, des propositions relatives … la paix n'arriveraient pas … point. Soudain, un membre de l'‚lite pica la curiosit‚ de tous. Ayant acquis ses lettres de noblesse, il arriva … la fin du texte, au pied de la lettre, juste au moment de la saign‚e, pour y mettre sa griffe. Se fiant d'instinct au destin, ce personnage illustre cria: ``Bande de sans dessein!'' Mais en disant cela, une solution se dessina: il venait d'ajouter le milliŠme mot au texte. Il avait vis‚ dans le mille! Mille mots valent une image, tous ces mots devinrent donc sages... comme une image. --< Comment perdre ce Plume >-- Imaginez que dans un siŠcle, on fasse l'‚tude stylistique d'un poŠme actuel. €a donnerait … peu prŠs ceci... Extrait de l'anthologie ``Meparde et M‚gare - XXe siŠcle'': poˆme ``Lit vert'' de Plume Latraverse. I fait pas chaud [i: pronom ind‚fini et ind‚finissable rempla‡ant n'importe quel nom masculin] Mˆme si l'hiver est beau J'aurais ben l'go–t d'sacrer mon camp [ben: contraction du pr‚fixe latin ``bene'' qui signifie ``bien''] [l'go–t: hiatus consonnal, une innovation de l'‚poque] [sacrer son camp: faire b‚nir un campement pour ‚loigner la malchance] Jusqu'au printemps. L'hiver pour mo‚, [mo‚: archa‹sme et proc‚d‚ stylistique permettant la rime avec ``pied''] C'est pour s'g'ler les pieds. [s'g'ler: compte pour un seul pied. Utilisation stylistique d'algorithmes de compression] Pis c'est pour se g'ler la tˆte Dans l'temps des fˆtes. [fˆtes: cong‚] J'ai pas d'ski-doo, [ski-doo: type de bombardier utilis‚ pendant la guerre froide] J'ai pas d'garage. [garage: vient de ``garer'', mot d'ancien fran‡ais voulant dire ``parker''] D'la slush partout, [slush: onomatop‚e ‚vocatrice provenant du son que font les bottes dans la neige mouill‚e] Mo‚, ‡a m'enrage. Les grosses tempˆtes [tempˆte: autre cong‚] Qui traŒnent … pu finir. J'ferme toutes mes f'nˆtres [ferme: prononcez ``farme'', de l'anglais ``farm''] Pis j'veux pu sortir. [pis: valeur en radian de deux angles droits; sens figur‚: deuxiŠmement] J'sus comme un ours [j'sus: contraction du verbe ˆtre et non du verbe suer; ne pas confondre ``chu'' et ``chsu''] [ours: allusion … l'apparence physique de l'auteur] Dans l'fond de sa cage. J'cultive la mousse [cultive: l'auteur arbore une bonne culture g‚n‚rale] Su mon visage. [i.e. son visage sue] Plus y fait frette [y: mˆme signification que ``i''; l'auteur profite de sa connaissance du grec] Plus j'ai envie d'partir, Plus j'me sens prˆtte [prˆtte: qu'est-ce qu'on ne ferait pas pour la rime, mˆme changer de sexe!] A pu m'faire engourdir. [pu: contraction du pass‚ simple du verbe compos‚ ``ne plus pouvoir''] Dans l'sud c't'un maudit beau voyage: L'hiver et moi, un feu une plage. [feu: allusion … la flamme po‚tique de l'auteur] Le grand soleil … cinquante cennes par jour [cinquante: source d'inspiration de l'auteur] [cenne: unit‚ mon‚taire valant un cent milliŠme de nos kilo-dollars (l'inflation...)] €a vaut 'a peine d'aller faire son p'tit tour. ['a: hiatus accentu‚ par l'absence volontaire de consonne; marque un accent tonique sur l'espace qui pr‚cŠde le ``a'' comme le voulaient les pratiques linguistiques de l'‚poque] --< Une Histoire des math‚matiques >-- Les math‚matiques suscitent bien des rancoeurs Tandis qu'… leurs lointains d‚buts Elles ‚taient beaucoup plus accept‚es... que nos fumeurs. Retournons donc … cette ‚poque r‚volue. Lorsque l'homme inventa l'addition Sans aucun signe de pessimisme Il ne la trouvait utile que pour compter ses moutons. Non pas pour s'endormir, bien entendu Mais anticipant l'arriv‚e du capitalisme Il voulait calculer ses revenus. Or, tout n'allait pas pour le mieux Son chiffre d'affaires ‚tait parfois petit Et passait le seuil de l'avantageux Comme la dette des Etats-Unis, (Ou celle du Canada Mais cela ne rimait pas). Les math‚matiques progressaient davantage Et utilisaient maintenant la soustraction Pour d‚crire scientifiquement la rage D'un homme d'affaires en consternation. De nos jours, dans nos d‚clarations d'imp“t Elle apaise nos violentes r‚actions Et nous ‚vite quelques gros mots Dans le calcul des d‚ductions. Mais revenons … nos moutons A ce bref historique Cette escalade vers la complication Qui nous paraŒt parfois sadique. L'homme a souvent des loisirs ennuyeux Voil… pourquoi un jour qu'il n'avait rien … faire Il disposa les additions … la queue-leu-leu Se demandant ce qu'on pourrait bien en faire. Ce nouvel op‚rateur Un inconnu l'appela multiplication Et c'est en son honneur Qu'on note par ``x'', cette op‚ration. Mais voil…, les choses se compliquent L'addition ayant d‚j… son oppos‚ La multiplication a aussi besoin d'un sym‚trique: La division ne tarda pas … arriver. Cet empressement n'a rien de trŠs h‚ro‹que: Car l'on ne remarqua pas qu'il avait, … z‚ro, hic. L'on en profita pour inventer les singularit‚s. Depuis lors, on en voit en quantit‚. Bien que ces op‚rations nous paraissent ‚l‚mentaires Elles semblaient alors tenir du supplice Encore qu'elles ne s'appliquaient qu'… des scalaires Et que de nos jours, elles unissent les matrices. Ce n'‚tait pourtant que le commencement Quand l'homme, croyant bien faire Inventa les lois des exposants Sans se douter qu'ils deviendraient fractionnaires... En effet, en fouillant … fond la terre On r‚ussit … en extraire des racines carr‚es. (Des radicaux en trouvŠrent mˆme des imaginaires Ayant d‚velopp‚ le complexe de ne point en avoir trouv‚). Pour gravir encore l'‚chelle de la complication Il fallut inventer d'autres fonctions. Un jour, un math‚maticien, se grattant le nez D‚couvrit que ses sinus ‚taient bloqu‚s: Il leur trouva des d‚bouch‚s. Mais il fallait, un jour, arrˆter: Tout cela devient dr“lement compliqu‚. Il y a des limites, … l'effort mental Vous voulez qu'on se retrouve … l'Hospital? Et ce n'‚tait toujours pas fini... Il fallut que l'on d‚couvre l'infini. Les connaissances math‚matiques Forment une suite g‚om‚trique Qui diverge, puisque la raison n'est limit‚e Ni par le million ni par l'unit‚. De complications en complications Les chiffres deviennent de plus en plus exigeants. De d‚ductions en d‚ductions Nous devenons aussi plus intelligents. Tout cela n'est peut-ˆtre que le prix … payer Pour ˆtre plus qu'un bˆte sauvage. Ou, si on veut, pour vivre en soci‚t‚ A l'‚cart des bˆtes sauvages. --< La et Le Physique >-- Soit deux oscillateurs harmoniques coupl‚s, voire mˆme accoupl‚s. Il s'agit d'un systŠme … deux corps. Il comporte deux masses: l'une masse l'autre et l'autre masse l'un. Ces deux masses reli‚es par un ressort qui se bande et se d‚tend. Plus ils entrent en r‚sonance, moins ils raisonnent: les corps ont des raisons qu'avec raison, ils ignorent. Comment se seraient-ils dout‚s qu'ils en arriveraient l…, alors qu'ils n'‚taient que de pauvres corps isol‚s l'un de l'autre qui semblaient rester prŠs de leur moman initial … tout jamais? Il n'a suffi que d'un moment de force et de puissance pour changer tout cela. Ils avaient commenc‚ par s'appeler constamment: c'‚tait leur constante de rappel. Puis ils commencŠrent … se rencontrer … une fr‚quence de plus en plus grande, dansant parfois mˆme la lambda ensemble. Leur ‚nergie de liaison cr–t. Ils d‚couvrirent leurs potentiels respectifs en se rendant compte qu'ils ‚taient identiques: ils ‚taient vraiment sur la mˆme longueur d'onde. La question fatidique arriva bient“t: ``on (res)sort ensemble?''. Ils ont alors compris la source de la force qui les unissait: ce ressort h‚lico‹tal. Et l'on arrive … la mise en situation du d‚but du texte. Vous ˆtes en pr‚sence d'un texte cyclique, tout comme le systŠme dont il est question. Vous pouvez, pour vous mettre dans l'ambiance, relire les paragraphes pr‚c‚dents de haut en bas puis de bas en haut (car des messages subliminaux y sont dissimul‚s). En passant, quand vous aurez fini de vous amuser (… trouver des message subliminaux inexistants), le texte continue ici. Mais ici s'arrˆte l'analogie entre corps ponctuel et corps humain (qui n'est habituellement point ponctuel, surtout s'il souffre d'embonpoint). Une masse n'a pas de belle-mŠre. Une masse n'a personne … charge: ‡a lui fait un poids de moins. Une masse ne prend pas de poids avec l'ƒge, … condition qu'on ne change point G. (mais l'existence de ce point reste contrevers‚e.) Mˆme si les exp‚riences de physique se distinguent par le fait qu'elles sont reproductibles, il ne faut pas croire que les systŠmes physiques se reproduisent. Et les r‚actions chimiques, mˆme si elles g‚nŠrent des produits, ne g‚nŠrent pas pour autant la multiplication. Revenons toutefois … nos humains, qui, entre-temps, ont vieilli. Ils accomplissent maintenant ce geste pour la premiŠre fois dans le but de se perp‚tuer, avec le seul regret que le mouvement perp‚tuel n'existe ni dans la physique, ni dans le physique... --< Infƒme info >-- Voici un petit lexique des mots les plus utilis‚s en informatique, pour le b‚n‚fice des novice et pour l'hilarit‚ des exp‚riment‚s. Backslash: Symbole dissuasif visant … d‚courager le n‚ophyte de s'int‚resser … l'informatique. Clavier fran‡ais: Offensive am‚ricaine visant … empˆcher les francophones de programmer en rendant inaccessible les symboles les plus utiles (dans le but ‚vident de pr‚server leur monopole). Clavier am‚ricain: Offensive am‚ricaine visant … empˆcher les francophones d'‚crire dans leur langue natale pour acc‚l‚rer leur assimilation. ``Abort, Retry or Fail'': chelle de notation d'un cours d'informatique. Windows: Tentative ‚chou‚e d'augmenter la productivit‚ des utilisateurs en rendant les logiciels plus faciles d'utilisation. Le problŠme est qu'il y est aussi plus facile de changer la tapisserie du fond de l'‚cran, la forme des ic“nes, le type de screen-saver, etc... bref, la productivit‚ diminue. Facilit‚ d'utilisation: Difficult‚ de programmation. UNIX: Conglom‚rat de programmeurs fanatiques qui tentent par tous les moyens d'empˆcher les non-programmeurs de toucher … un ordinateur. MacIntosh: Conglom‚rat d'utilisateurs qui, en ‚tant tellement exigeants, d‚couragent tout programmeur d'exercer leur art. Code spaghetti: Caract‚ristique des programmes datant de la mˆme ‚poque que les westerns du mˆme nom. C: Drogue. Au premier contact, est d‚sagr‚able. Mais une fois attrap‚e la piq–re des pointe(ur)s, vous ne voudrez plus jamais refaire du BASIC, aprŠs un tel acide. Votre d‚sir de programmer en C s'incr‚mentera toujours si bien qu'il saura orienter l'objet de votre vie vers lui. Pascal: Langage structur‚ utilis‚ dans tous les cours d'initiation … l'informatique mais nul part ailleurs. FORTRAN: Langage non structur‚ presque acceptable grƒce … vingt ans de patches successives. Utilis‚ partout, sauf dans les cours d'initiation … l'informatique. _istrchr: Nom de fonction typique d'un programme ‚crit dans les ann‚es 70. GetFillPolygonIndexTypeContext: Nom de fonction typique d'un programme ‚crit dans les ann‚es 90. Nombre de lignes de code: Unit‚ de mesure de la longueur d'un programme poussant inutilement les programmeurs … ‚crire des programmes a‚r‚s. Commentaires: Sans commentaires... Boucle: Voir boucle. Appel de proc‚dure: Voir ``Initiation au Pascal'', chapitre 1. Infini: Valeur qu'un programmeur s'empresse de remplacer par 5, 100, 1000 ou, dans le pire des cas, 1E+38. Imprimante rapide: Distributrice de papier essuie-tout. Interface graphique: Obligation pour le programmeur d'‚crire le mot ``window'' dix fois par ligne: Window *mywindow=new window(hWnd, windowtype.wnd, WND_WINDOWED_WINDOW). : Quit, end, exit, bye, logoff, break, ^C, escape, F7 n o, alt-X, ctrl-alt-delete, ctrl-alt-backspace, ^D, ^Z: Signe que ce texte est fini! --< Un No‰l traditionnel >-- Les murs en agglom‚r‚ cachaient … peine l'isolant rose du chalet de ski qui nous servit de lieu de rencontre pour fˆter No‰l. L'‚clairage n‚onn‚ de la piŠce principale laissa heureusement place … la lueur de la chandelle, une fois le repas arriv‚. Mais cela n'att‚nua pas pour autant l'‚clatante lueur de l'enseigne Coka Cola qu'arborait fiŠrement le comptoir du snack-bar … peine dissimul‚ par l'entassement de manteaux produit par l'absence de vestiaire et la particuliŠre efficacit‚ de l'isolant rose d‚j… ‚voqu‚ plus haut. Les meilleurs succŠs de No‰l de tous les temps jouaient sur la chaŒne st‚r‚o apport‚e sur les lieux pour les ‚gayer (les lieux, pas les gens). Le charme de cette musique venait du rythme lascif de la lambada qui accompagnait ces musiques traditionnelles, le tout jou‚, bien entendu, avec un orgue ‚lectronique de la plus insupportable espŠce. Ah oui, nous en ‚tions au repas, avant que je me sois laiss‚ emporter par mon ardeur po‚tique. Grand-mŠre, cette ann‚e, en a eu marre de se faire traiter de tous les noms en raison de la remarquable absence de saveur de son repas. Elle fit donc appel … un traiteur (qui en ‚tait un bon et non un mal traiteur). Personne ne prit le soin de lui souligner le changement de go–t, non pas pour ne pas la choquer, mais simplement en raison de la remarquable absence de go–t de la plupart des gens. Le repas s'amor‡a par le traditionnel b‚n‚dicit‚ de Ma-tante, suivit de prŠs de l'invitation de Mon-oncle … prendre la biŠre qu'il y avait dans le frigidaire (je devrais dire ``r‚frig‚rateur'', mais c'est si payant d'ˆtre commandit‚). L'on parla. L'on bouffa. L'on fit les deux … la fois. On se comprit quand mˆme, en gros. On avala quand mˆme, en gros morceaux. Vint le temps de se resservir. Autant l'ambition personnelle de chacun que la potentielle augmentation du taux de cholest‚rol transparaissait dans le volume de l'assiette de chacun. (Le premier service avait ‚t‚ donn‚ par Grand-mŠre elle-mˆme, afin d'‚viter que Mon-oncle ne se fit exag‚r‚ment du cholest‚rol et que la petite niŠce ne contracte exag‚r‚ment une rechute d'anorexie.) Quittons un peu ce niveau culinaire pour toucher … la partie intellectuelle du repas. Les blagues fusaient. Les gens riaient. D'autres blagues re-fusaient. D'autres refusaient ces blagues qui devenaient de plus en plus scatologiques et de moins en moins eschatologiques (i.e. moins spirituelles). Puis, la s‚paration in‚vitable se produisit: les femmes d'un cot‚, les hommes de l'autre. La couture d'un cot‚, le hockey de l'autre. Je me trouvai donc seul, n'aimant ni la couture, ni le hockey. Notez que je ne me suis pas ennuy‚ pour autant: je me suis amus‚ … imaginer ce que vous lisez en ce moment! Soudain, le drame survint: une bouteille de vin bien rouge se renversa sur la nappe bien blanche. Vous imaginez d‚j… ce qui se produisit: ``-il faut mettre du sel... -non, du poivre... -je t'avais dis de faire attention! -peut-ˆtre qu'avec du vinaigre...'' Et bien non: la nappe ‚tait sauve car elle ‚tait confectionn‚e d'un plastique digne d'un garage en toile, cette affreux appendice qui d‚core la plupart des maisons urbaines, en hiver. La fin de la soir‚e persistait … ne pas vouloir arriver quand j'entendis ma mŠre formuler une excuse particuliŠrement subtile pour justifier un d‚part pr‚matur‚. Je n'eus point os‚ faire de mˆme, mais ce d‚part me semblait le bienvenu. Une fois bien parti, je me sentis partir et m'endormis. Je ne me r‚veillai qu'… moiti‚ pour passer du siŠge de la voiture … mon v‚ritable lit, une fois la maison familiale regagn‚e. Je me redormis … moiti‚ pour passer la nuit … dormir complŠtement (puisque je ne m'‚tais r‚veill‚ qu'… moiti‚). Une pens‚e philosophique me traversa alors l'esprit: le sommeil est le plus agr‚able moment de la vie et c'est dommage d'y ˆtre justement inconscient. Et dire que j'ai d– rester conscient pendant tout ce No‰l... --< Histoire d'un saoul sans le sou >-- Il ‚tait une fois un chimiste, sp‚cialiste en solutions, qui avait un problŠme sans solution: il n'‚tait plus solvable car il ne lui restait que dix sous. Son argent, ‚videmment, ne s'oxydait pas, mais il se r‚duisait sans cesse. Potentiellement, des effets trŠs n‚gatifs pouvait lui arriver: sa situation devenait malcenne. Tout avait commenc‚ lorsqu'il s'‚tait mis … boire. D'abord quelques verres solitaires, puis de plus en plus... au point que ces vers de plus en plus longs provoquŠrent une c‚sure dans sa vie. Sa femme le quitta et il se rendit alors compte que, dans l'alcool, le mariage ne restait pas indissoluble. Alors qu'avant, il se la coulait douce, il entrait maintenant dans une phase plus dure car maintenant, les choses se pr‚cipitaient. Il eu d'abord des problŠmes de digestion: des gaz peu nobles. Sa calvitie l'attaqua ensuite de front. Il pensa mˆme utiliser l'‚lectrolyse inverse des poils pour rem‚dier … la situation. Peut-ˆtre en utilisant du platine comme ‚lectrode il parviendrait … devenir blond platine? Et il y avait toujours son problŠme de solvabilit‚ qui faisait en sorte qu'il ne puisse plus profiter de ses int‚rˆts compos‚s. Et quand un chimiste perd son int‚rˆt pour les compos‚s, il n'est plus dans son ‚l‚ment. N'‚tant plus trŠs efficace … son travail, il ‚tait … la merci de son patron, qui le remercia d'ailleurs. Et ce n'est pas une mise … pied qui le remettra sur pied! Bref, il souffrait, il vulcanisait mˆme, de rage: je suis gradu‚ (comme le cylindre du mˆme nom), je suis donc en mesure d'accomplir ma tƒche, que ma r‚putation soit tach‚e ou pas. Comment allait-il se tirer de cette situation ‚prouvette (pardon, ‚prouvante) et qui lui co–tait b‚cher? (Note de l'auteur: je vous avoue que pour le moment, je n'en sais rien.) Puis soudain, la loi de Murphy intervŒnt. (La loi de Murphy pr‚voit que si quelque chose de n‚faste a une probabilit‚ nulle de se produire, elle se produira quand mˆme, juste pour nous embˆter.) Cette fois-ci, cependant, la loi de Murphy intervŒnt sur elle-mˆme avant de frapper. Ce que l'on appelle la Providence est en r‚alit‚ un ph‚nomŠne de Murphy au second degr‚. Enfin bref, la Providence visa dans le mille et lui fit gagner le million. Lorsqu'on a des billets de mille, on n'a plus besoin de vin(gt), et son alcoolisme disparut aussit“t. Cupidon frappa aussi dans le mille de maniŠre … ce que le couple, de nouveau r‚uni par je ne sais quelle force ‚trange mais capital(e), puisse se remarier et avoir beaucoup d'enfants pour que ce conte (maintenant approvisionn‚) se termine dans le mˆme ton que dans lequel il avait commenc‚ (``Il ‚tait une fois...''). --< Paroliers parodi‚s >-- Imaginez ce que chanteraient quelques-unes des grandes c‚l‚brit‚s de la chanson si elles passaient une journ‚e avec un ‚tudiant universitaire typique. Au lev‚ p‚nible du matin, Francis Cabrel aurait chant‚, sur l'air de ``Je l'aime … mourir'': Moi je dormais bien, Mais voil… qu'aujourd'hui Il ne reste plus rien du sommeil de mes nuits Je vais m'endormir, je vais m'endormir, je vais m'endormir. En attendant l'autobus, en plein hivers, sur le chemin de l'‚cole, Richard S‚guin entonnerait, sur l'air de ``Journ‚e d'Am‚rique'': 'Y fait froid, Y'‚ gel‚. Y'a ses orteils qui br–lent Au fond de ses bottines. Y'est d‚j… pas tout nu Y'a mˆme du linge en surplus. C'est vraiment pas ici L'beau temps Pis les vacances au soleil: Un terminus pareil! En arrivant dans une salle de cours presque vide, le groupe Harmonium aurait fredonn‚: O— est pass‚ tout ce monde Qui avaient pay‚ leur scolarit‚? On s'inscrit … ce cours immonde. On devrait peut-ˆtre l'‚couter. A la remise d'un examen particuliŠrement mal r‚ussi, F‚lix Leclerc aurait chang‚ les paroles de ``C'‚tait un p'tit bonheur'': C'‚tait le correcteur Qui m'avait ramass‚ J'‚tais tout en pleurs Sur le bord d'‚chouer Une fois le vendredi soir venu, Renaud aurait trouv‚ le moyen de se divertir sur l'air de ``C'est pas l'homme qui prend la mer'': C'est pas l'homme qui prend la biŠre, C'est la biŠre que prend l'homme. Tatataaa! Moi la biŠre, elle m'a pris, J'me souviens, Plus de rien. Le quotidien n'affecte bien s–r pas seulement les ‚tudiants du baccalaur‚at. Combien d'‚tudiants … la maŒtrise ne se sont pas dit un jour, sur un air de Paul Pich‚: Y faut changer d'maŒtrise mon joooo! En guise de conclusion, Gilles Vigneau n'aurait pu s'empˆcher de vocif‚rer: La Poly(Note: Abr‚viation de ``Ecole Polytechnique'' et non de ``polyvalente''.), ce n'est pas la Poly, c'est l'enfer! --< Incident au Dieu >-- Boum! ``-Que fais-tu, mon fils? -Rien, je jouais avec un p‚tard. -Ah, ah, je t'ai pris en d‚flagrant d‚lit! C'est l'‚tincelle qui me met le feu aux... poudres. Tu sais que tu es fou. Avec un pareil coup de canon, tu aurais pu te canoniser, sainte! -Eh! le PŠre, ne t'‚ternise pas l…-dessus. Mais comment as-tu fais pour savoir que je jouais avec ‡a ici? -C'est le voisin d'en dessous qui a vendu la mŠche. -C'est aussi lui qui m'a vendu les p‚tards...'' Le PŠre ne put s'empˆcher de penser: ``Oh! le petit diable, avec lui, on Satan … tout.'' Le PŠre poursuivit son sermon: ``-Mais voyons, mon ange, qu'est-ce qui t'a pris et qui t'a appris ‡a? Tu t'exposes … une s‚rieuse punition. -Je m'explose … une s‚rieuse munition? -Assez rit. Je me crucifie pour ton bien et c'est tout ce que tu trouves … me r‚pondre? -En passant, c'est moi qui me crucifie pour toi. -€a va, tu as raison. Cependant n'oublie pas que je me suis pli‚ en quatre et s‚par‚ en trois pour toi. Mon fils, tu n'es pas Saint d'Esprit. -Pourtant, Maman m'aurait permis de le faire. -Ne me parle pas de ta mŠre Lucie. Je la consid‚rais comme une d‚esse... jusqu'… temps qu'elle parte avec je ne sais quel Apollon.'' Voyant qu'il n'avait pas trouv‚ le juste argument, le fils ‚touffa l'affaire: ``Arrˆte de t'enfer. Laisse Lucie faire!'' Puis vint le moment d'annoncer le chƒtiment: ``-J'ai une bonne et une mauvaise nouvelle pour toi. Par laquelle commence-je? -Par la mauvaise. -Tu n'auras pas de d‚sert pendant quarante jours. Les fruits: interdits. Tu n'auras pas le choix de manger tes restes. Si tu veux rester au paradis: tes restes!'' ``Et la bonne nouvelle?'' de demander le fils, timidement. ``-€a, ce sera pour plus tard...'' Contrairement … toute esp‚rance de la part du fils, le sermon n'‚tait pas termin‚. ``-Il faut jouer … autre chose si tu veux ‚voluer... -Je pensais qu'il ne fallait pas parler d'‚volution... -Non bien s–r. Toutefois il faut penser … ton ascension... dans la soci‚t‚. J'espŠre que tu n'iras quand mˆme pas … l'Ecole Pyrotechnique! -Pourquoi pas? -Tu n'‚tudieras pas cette science tant que t'es au logis! -Je m'en vais, alors. Je saurai trouver de l'argent pour vivre. Je pˆcherai capitaux ailleurs. -Je ne suis plus … la hauteur pour t'‚lever. Je ne peux plus rien faire pour toi sinon que de te renier et de te rayer de mon testament. -J'en ‚crirai un deuxiŠme, juste pour moi!'' Et Dieu, longtemps, bouddha. Curieusement, le concept d'explosion, plus que son propre fils, l'avait ‚branl‚: cela lui avait donn‚ une id‚e pour sa toute nouvelle cr‚ation. La recette ‚tait simple: Mettre ensemble un grand nombre de particules. ``El‚mentaire!'', se dit-il. Faire exploser le tout. ``€a n'a rien d‚tonnant!'' Laisser reposer quelques milliards d'ann‚es. ``Pas de problŠme, j'ai une ‚ternit‚ devant moi!'' C'est ainsi que le Big-Bang prit forme. Puis Dieu, patient, scruta le r‚sultat. ``Cinq milliards d'ann‚es et toujours rien. Dix milliards d'ann‚es: j'attends encore cinq milliards d'ann‚es et j'arrˆte.'' Et c'est … ce moment que son fils le surprit: ``-Ah, ah, toi aussi tu joues avec le feu! -Entre ta r‚cr‚ation et ma cr‚ation, il y a un monde! Et puis regarde, de toute fa‡on, ‡a ne donne rien: mˆme aprŠs quinze milliards d'ann‚es, il y a toujours 99,9% des d‚bris qui sont dans le d‚sordre le plus complet. Alors zou!, assez perdu de temps, on ramasse le tout et on n'en parle plus.'' Comment aurait-il pu voir que sur un des minuscules d‚bris, la vie avait apparu? La vie, il ne la vit point. Si seulement il lui avait demand‚ son avis, … la vie. Elle aurait s–rement dit: ``priŠre de m'‚couter.'' --< La malchance a-t-elle plus de chances d'arriver que la chance? >-- Nous connaissons tous la loi de Murphy qui pr‚dit que si quelque chose d'ind‚sirable … une probabilit‚ nulle de se produire, elle se produira quand mˆme. Cette loi fut d‚couverte empiriquement (d'ailleurs elle empire … chaque fois qu'on la constate) et il ne lui manque qu'un brin de formalisme th‚orique pour la promouvoir au rang de v‚ritable loi scientifique. Commen‡ons par d‚crire le champ de Murphy, not‚ ``mu'' (plut“t que ``M'', pour faire plus s‚rieux). Il est g‚n‚r‚ par une particule ‚l‚mentaire, le murphino, totalement ind‚tectable (en vertu de la loi de Murphy elle-mˆme). Les murphinos sont partout: il y en a des milliards par mm^3. Ils pourraient mˆme r‚soudre l'‚nigme de la masse manquante de l'univers. En plus de son effet sur les humains, le champ de Murphy est responsable de la plupart des ph‚nomŠnes ‚tranges de la physique des particules. Pourquoi ne peut-on pas connaŒtre … la fois la quantit‚ de mouvement et la position d'une particule avec toute la pr‚cision que l'on veut? Pourquoi une mˆme entit‚ est-elle … la fois onde et particule? Pourquoi est-il impossible de rassembler les quatre forces de l'univers en une seule? Il fallait bien que la loi de Murphy embˆte aussi les scientifiques... On voit qu'il suffit d'une seule nouvelle particule pour expliquer tous les ph‚nomŠnes physiques possibles et imaginables. Si un ph‚nomŠne suit une loi connue, pas de problŠme. Et si le ph‚nomŠne ne suit pas la loi en question, eh bien, c'est l'interaction de Murphy qui en est responsable. Il est tentant d'essayer de contredire la loi de Murphy par l'objection suivante: ``En principe, la malchance totale de l'univers (not‚e aussi ``mu'' pour nous compliquer la vie) est constante: le malheur des uns fait le bonheur des autres.'' C'est que la malchance tend … se rassembler chez les ˆtre conscients et la chance, dans la matiŠre inerte, sous une forme peu disponible. On appelle anthropie (contraction du mot anthropophobie) cette tendance qu'a la chance de s'enfuir des hommes. Ainsi, si vous frappez sur un mur, vous aurez mal; le mur, non. De mˆme, dans toute autre situation o— un ˆtre conscient et un ˆtre non conscient interagissent, l'ˆtre conscient subira toujours un maximum de d‚sagr‚ment. La loi de Murphy est donc un critŠre universel qui permet de d‚finir ce qu'est la conscience. Si la plupart des humains ont une tendance similaire … accumuler la malchance, il existe des gens chez qui le ph‚nomŠne est particuliŠrement prononc‚: on les appelle des newfies. La nomenclature varie cependant selon le pays: les Fran‡ais les appellent des Belges, les Belges des Suisses, les Suisses des Fran‡ais, etc... Que voulez-vous: nul n'est newfie dans son pays. Je me propose maintenant d'‚claircir certains paradoxes qui se pr‚sentent lors de l'‚tude de la loi de Murphy. Consid‚rons le cas de deux personnes qui appliquent pour le mˆme emploi. Pour chacune de ces personnes, la loi de Murphy devrait faire en sorte que cette personne n'obtienne pas l'emploi. Pourtant, une de ces deux personnes obtiendra n‚cessairement l'emploi et pour elle, la loi de Murphy sera viol‚e. Une erreur s'est gliss‚e dans ce raisonnement: nous avons fix‚ arbitrairement une mise en situation. Or, la loi de Murphy s'applique ‚galement lors du choix des conditions initiales. Il est impossible que seulement deux personnes ne postulent: quand un poste s'ouvre, ce sont 100 personnes qui se pr‚cipitent pour l'obtenir. Et de ces 100 personnes, 99 seront frustr‚es alors qu'une seule sera heureuse. La loi de Murphy aura donc malgr‚ tout maximis‚ la frustration totale de l'univers. Mais, me direz vous, pour la personne qui a eu l'emploi, la loi de Murphy aura tout de mˆme ‚t‚ viol‚e. Ne vous inqui‚tez pas, elle le perdra bient“t, son emploi! Voici un autre exemple qui montre l'emprise de la loi de Murphy sur la fatalit‚. Imaginez que vous ˆtes … la recherche d'un objet. Avez-vous remarqu‚ que c'est toujours au dernier endroit o— vous regardez que vous le trouvez? Il semble facile de contourner la loi de Murphy dans ce cas: il suffit de continuer … chercher, mˆme aprŠs avoir trouv‚ l'objet. On ne trouverait alors plus l'objet au dernier endroit o— on a cherch‚ et la fatidique loi serait viol‚e. On aura cependant encore perdu plus de temps. Donc, cette loi de la frustration universelle est vraiment in‚vitable. Et si jamais on trouve l'objet au premier endroit o— on le cherche, n'a-t-on pas viol‚ la loi de Murphy? Non, puisque si vous le trouvez au premier endroit qui vous vient … l'esprit, c'est que vous ne le cherchiez pas: vous saviez o— il ‚tait. En conclusion, grƒce … la loi de Murphy, on peut d‚finir la notion de ``conscience'', expliquer l'incroyable constance de la malchance humaine et, accessoirement, r‚soudre tous les problŠmes de la physique actuelle. --< La cour, c'est long... >-- Les poursuites, de nos jours, ‡a court les rues. €a court aussi dans les cours. Avant, les criminels s'enfuyaient … la course et se faisaient poursuivre dans la rue. Ils s'y faisaient arrˆter pour ensuite se faire traŒner … la cour pour qu'on y poursuive la poursuite. Maintenant, il n'y a pas seulement ceux qui se font arrˆter qui se font poursuivre. Il y en a qui se font poursuivre et qui n'ont pas couru aprŠs! C'est le cas des poursuites en dommages et int‚rˆts. On les appelle ainsi parce que c'est dommage pour un des partis et tout un int‚rˆt pour l'autre. Ces proc‚dures sont toutefois extrˆmement complexes. On ne choisit pas toujours la maniŠre la plus judicieuse de proc‚der, mais toujours la plus judiciaire. PremiŠre complication: le commun des mortels ne parle pas le mˆme langage que les hommes de loi. C'est pourquoi la plainte doit d'abord ˆtre traduite en justice. En fran‡ais, la plainte ne fait que quelques pages, tandis qu'en justice, elle en prend vingt. C'est que les juristes sont prudents, jurisprudence oblige. DeuxiŠme complication: les gens de la cour doivent suivre des rŠgles vestimentaires strictes. Chacun doit s'habiller en bon uniforme. Les lois ‚tant fort compliqu‚es, les avocats et les juges risquent de s'arracher les cheveux. C'est pourquoi la perruque fut longtemps de rigueur. Maintenant que la mode est pass‚e, on se retrouve avec 90% des hommes de loi chauves. Quand aux femmes de loi, elles ont l'obligation quasi constitutionnelle de porter la jupe. Encore heureux que le voile ne soit pas incorpor‚ … la tenue de travail: le voile incorporatif a d‚j… ‚t‚ lev‚. Et tout ce beau monde joue le jeu: le jeu de l'oie. Les juges pestent contre le nouveau code si vil. Et les avocats font valoir le fruit (l'avocat) de leur travail. Ils essaient d'ˆtre des avocats de l'enfer, des avocats du diable. Parfois ils tombent dans des impasses, mais il faut continuer co–te que co–te. Et ‡a co–te, et ‡a co–te... Les proc‚dures ne sont coup‚es qu'une fois le coupable trouv‚. Et alors le parti perdant crie trŠs fort son m‚contentement. Et pour ˆtre s–r d'ˆtre entendu, il fait appel. Il ne sait pas si ‡a marchera: il essaie, juste pourvoi. Et le ton monte, monte. La cour aussi doit monter. Le juge crie: ``la cour est lev‚e!'' et on passe en cour sup‚rieure. C'est ainsi que les causes occupent autant les cours suprˆmes que les basses-cours (on distingue les cours suprˆmes des basses-cours par le fait que les poulets y sont plus rares). Il y a tellement de causes en cours en cour que mˆme aprŠs des ann‚es sur la mˆme cause, on cause toujours, sans qu'il n'y ait d'effet! On cherche encore le fameux lien de causalit‚. Mais une fois la cause alit‚e, l'affaire dort. Et les jur‚s, ces gens comme vous et moi, ils essaient d'y comprendre quelque chose pour d‚cider du sort de l'accus‚ au pied du mur. Et ‡a les fait jurer... --< D‚saccord majeur >-- Ayant pris une grosse brosse, il se dit ``‡a me donne mal au cheveux... la prochaine fois, je prendrai un peigne!''. Et sa tˆte ivre continuait de divaguer: ``Je deviens spirituel quand je prends des spiritueux''. Mais il devait encore arriver … rentrer chez lui, alors que la musique r‚sonnait encore dans sa tˆte et que sa tˆte, elle, ne raisonnait plus du tout. Ayant perdu sa clef sur le sol, ce fat d–t d‚foncer l'armature de la port(‚)e. Mais en faisant cela, il se retrouva sur le do, l…, sur le sol cir‚. Il eut fallu qu'il mesure la port‚e de cet acte: sa femme fut prise d'une peur blues, tandis qu'elle jazzait au t‚l‚phone dans la piŠce d'… cot‚. Le mari s'informa: ``T'es b‚ mol, je t'ai fait peur?''. ``DiŠse-moi pas'', dit-elle, d'un rhume agonisant. ``H‚, ma noire, pourquoi tu me regardes croche de mˆme'', s'‚cria-t-il, tout en subissant la judicieuse remarque de sa femme: ``Si j'‚tais ronde comme toi, je te verrais double croche...''. Inutile de pr‚ciser qu'ils s'accordaient mal ensemble: c'‚tait un battement continuel. Et vous devriez voir leurs figures, lors de ces interf‚rences! Et tranquillement, le ton montait... jusqu'… donner une note tragique … la situation. Le poissonnier d'en face, ayant remarqu‚ que le thon a vari‚, pˆcha par excŠs d'altruite, et se mˆla … l'affaire. Pour attirer l'attention, il simula une quinte de toux. ``--quarte toi'', cria la femme, ``je ne veux pas de tierce personne dans cette histoire. -Soit, je m'en vais, mais laissez-moi au moins dormir. -Une seconde, dit Octave (c'‚tait le nom du mari), reste ici, sinon je vais manger un coup. -Bah, c'est ton problŠme: aprŠs avoir bu un coup, tu peux t'attendre … en manger un!''. Sur ces mots, le poissonnier les laissa … leurs d‚boires (et sur leur faim). A ce moment-ci, l'auteur de cette histoire a plusieurs choix pour la terminer. Il peut en faire: un drame (l'homme se met … battre sa femme); une com‚die (la femme se met … battre son mari); un roman savon (ils s'embrassent et tout finit bien); un conte (tout finit tellement bien qu'ils ont beaucoup d'enfants); une trag‚die grecque (Dieu intervient et part avec la femme, qu'il trouve de son go–t); un t‚l‚-roman qu‚b‚cois (ils s'assoient et prennent un caf‚ (tout en discutant de banalit‚s)); un t‚l‚-roman am‚ricain (ils sortent leurs Jaguar de leur garage triple, passent … c“t‚ de la piscine, vont dans un restaurant fran‡ais o— l'on parle anglais, prennent un whisky et... discutent des mˆmes banalit‚s); un texte d'Axel van de Walle (ils se mettent … boire tout les deux et commencent … faire des jeux de mots que personne ne comprend … jeun et que personne ne comprend sous l'effet de l'alcool non plus, mais dont on rit au moins). --< Informatique informelle >-- Une formation en informatique reste informe si on ne vous informe de ces quelques d‚finitions form‚es d'informelles informations. Souris: dispositif ing‚nieux permettant simultan‚ment de nuire … ceux qui tapent vite … la machine et de permettre … ceux qui n'utilisaient pas l'ordinateur de le faire, nuisant ainsi encore plus … ceux qui tapent vite. Inflation: processus in‚vitable qui fait en sorte que le nombre de disquette n‚cessaire pour installer la nouvelle version d'un logiciel double … chaque ann‚e, mˆme si la capacit‚ des disquette double elle aussi. La vitesse de l'ordinateur doit aussi doubler … chaque ann‚e pour pouvoir ex‚cuter ladite version du logiciel sans doubler la consommation de caf‚ de l'utilisateur. ``Basic extinct'': Film mettant en vedette un langage informatique. Il meurt … la fin. Serveur (de r‚seau): S'il travaillait dans un restaurant son patron lui dirait: ``ne reste pas plant‚ l… … ne rien faire''. Fenˆtre: Concept ing‚nieux visant … sous-utiliser la surface de l'‚cran de maniŠre … stimuler la vente de moniteurs de plus en plus gros. Num‚ro de version: Quantit‚ proportionnelle … la complexit‚ d'un programme et/ou au nombre de bugs pr‚sents dans la premiŠre version. Icone: Future cause de l'illettrisme. Manuel d'utilisation: (Voir: non utilisation du manuel.) Commande UNIX: PhonŠme de deux consonnes, g‚n‚ralement impronon‡able. Commande par souris: PhonŠme du langage des signes, g‚n‚ralement impronon‡able. Virtuel: Mot virtuellement partout pr‚sent, voulant dire virtuellement n'importe quoi, mais se vendant r‚ellement bien. Standard: Ce que toutes les compagnies devraient suivre. C'est ce qu'elles ont fait: elles suivent toutes leur propre standard. Assembleur: DerniŠre ‚tape avant de commencer … d‚sassembler son ordinateur. Architecture parallŠle: Type d'architecture ne se fabriquant pas encore en s‚rie. Ordinateur: Dispositif permettant d'‚conomiser sur une seule chose: le chauffage. lectronique digitale: Technologie fond‚e sur l'utilisation des doigts (pour enfoncer des touches). Goto: Voir 1979. --< L'Idole >-- Je suis un ˆtre d‚sir‚ par tous... et j'en ai marre, depuis le temps que ‡a dure. Au d‚but, j'‚tais s–r qu l'on m'aimait pour mon argent. Or, un jour, je l'ai perdu cet argent. Mais j'ai gard‚ toutes mes valeurs humaines: c'est imprim‚ sur ma face. Ces valeurs ne s'en iront jamais, ce sont des valeurs immobiles hier, immobiles demain. C'est pourquoi les gens ont gard‚ tout leur int‚rˆt pour moi. On m'admire, comme si j'‚tais un comte c‚lŠbre et noble. J'ai compris: on m'aime pour mes papiers: pour mon image noble, plut“t que pour mon m‚tal noble. Mˆme … l'‚picerie, on accourt vers moi, si bien que je dois continuellement m'enfuir. Et ce n'est pas monnaie courante de voir un comte courant en faisant son march‚. Bref, on court, on saute, on vole mˆme, pour m'avoir. Je suis partout reconnu: on me regarde sans cesse. Mˆme quand je suis rond et m‚connaissable, on me regarde de billet. Parfois, pour me cacher, je me donne un air am‚ricain. H‚las, ‡a ne fait qu'augmenter mon succŠs. Alors j'essaie toutes sortes d'habits pour me dissimuler: inutile de dire que mon taux de change est trŠs ‚lev‚ et que mes mesures protectionnistes ne sont pas efficaces. Bien que l'on me d‚sire ardemment, cela ne veut pas dire que l'on veuille me garder. Ainsi, … peine ai-je trouv‚ l'ƒme soeur, qu'elle veut d‚j… se d‚barrasser de mon ˆtre et m'‚changer pour un bien meilleur. Inutile de dire que je n'aime pas ce truc (ni ce troc). D'autre fois, on a honte de sortir avec moi et on me cache. Je blanchis de peur … cette id‚e. Vraiment, on se paie ma tˆte. A peine me suis-je tir‚ de ces situations d'un ridicule bien consomm‚, que je retrouve … nouveau la gloire: l'on est suspendu … mes lŠvres, l'on prend tout ce que je dis pour du cash. DŠs que je m'exprime, je m'imprime dans la m‚moire des gens. Toutes mes conf‚rences sont … guichet ferm‚, c'est automatique. Je suis presque partout en mˆme temps, comme Dieu. Je suis seulement un peu plus mat‚riel, voire mˆme mat‚rialiste. Mais il y a trop d'action dans ma vie, cela me donne trop d'obligations, comme sur le march‚ boursier. La bourse ou ma vie, c'est la mˆme chose, tellement je suis occup‚. Je suis en pleine crise et comique n'est pas ma situation. Je vais craquer, faire un krach et tout ce que vous voudrez. Je veux rester seul chez moi, en bas. Je veux retrouver les fonds de caves tranquilles que j'avais perdus de vue. Laissez-moi seul … mes fonds, mˆme sans provisions. Epargnez-moi, un peu, c'est capital pour moi. Je veux ˆtre seul dans ma tour d'ivoire … me faire de la corne sous les pieds en tournant un rond, en pensant, afin d'ivoire plus clair. Ma seule consolation, je vous l'ai d‚j… dite: on ne m'aime pas pour mes dollars, au moins. C'est normal, je suis le dollar! --< Comment ne pas (ap)prendre le champ en chantant >-- S'il est d‚sirable d'avoir du talent pour se lancer dans la chanson, cela n'en est pas pour autant essentiel. L'argent est un excellent substitut. Bref, il ne faut pas ˆtre d‚j… dans le trou pour percer. Et une fois lanc‚, les retomb‚es sont int‚ressantes: il suffit de tomber au bon moment. Il existe deux m‚thodes pour percer. Ou bien vous vous astreignez … jouer dix ans dans les bars pour vous faire un nom, ou bien vous demandez … un producteur de vous en faire un. Dans ce deuxiŠme cas, votre succŠs sera peut-ˆtre de courte dur‚e, mais rien ne vous empˆche d'effectuer un retour sur scŠne dans vingt ans, lorsque l'industrie du disque sera encore plus lucrative qu'aujourd'hui et que votre nom sera devenu un mythe du pass‚ lointain. En parlant de nom, votre nom d'artiste doit ˆtre le plus insolite possible: ‡a vous fera au moins une chose … raconter en entrevue. Ayant tout d‚pens‚ … la promotion, il ne vous restera probablement plus d'argent pour payer des musiciens, d'o— l'utilit‚ des instruments ‚lectroniques qui, malgr‚ un fort co–t d'achat, ne demandent pas d'augmentation de salaire par la suite. Ces instruments ont en plus l'avantage de ne pas d‚velopper de complexe d'inf‚riorit‚ vis-…-vis le chanteur, lui qui r‚colte habituellement le plus de succŠs (et on se demande souvent pourquoi). Si … ce moment vous vous rendez compte que vous n'avez pas de voix, de multiples effets sp‚ciaux ‚lectroniques vous ouvriront quand mˆme la voie. Autre alternative: trouvez au moins une note que vous ˆtes capable de chanter et n'utilisez que celle-l…. AprŠs tout, mˆme en excluant le rap, 50% des chanteurs populaires chantent la mˆme note 50% du temps. Si vous n'arrivez quand mˆme pas … chanter, vous pouvez toujours engager quelqu'un pour chanter … votre place: l'important est d'ˆtre beau et de savoir faire de la post-synchronisation. Si, … l'oppos‚, vous ˆtes laid, vous pouvez engager un mannequin et vous, chanter. Et si, par un malheureux hasard, vous ˆtes laid et incapable de chanter, vous pouvez engager les deux et on vous appellera dor‚navant ``producteur''. Bref, il y a de multiples maniŠres d'arriver au succŠs quelle que soit la nature de votre absence de talent. Une fois le succŠs obtenu, il ne vous restera qu'un obstacle … affronter: les humoristes, qui ne demandent pas mieux que d'avoir une nouvelle personnalit‚ comme cible. Et en tant que personne alit‚e, vous ne dormirez jamais sur vos deux oreilles. --< R‚-Cr‚ation informatique >-- Le premier jour, Dieu cr‚a l'ROM. Et pour ne pas que ce MEG soit tout seul, il inventa la RAM, trŠs estatique, qui le rendrait plus dynamique. Mais l'ROM avait parfois de la difficult‚ … la suivre: ``tu te cache(s)'', lui disait-il souvent, ``... et plus vite mˆme que mon ombre, la shadow ROM''. Pour lui faire connaŒtre les plaisirs de la vie, la RAM lui donna une Apple. Il souris, en lui disant: ``Je t'admire, comme une ic“ne''. Tandis que l'ROM contemplait les courbes de la RAM, Dieu leur dit: ``je permets que vous b‚zier. Mais n'inscrivez pas cela dans des livres, ou ils seront proscripts, comme ce fameux livre qui parle du spline (Les Fleurs du mal de Baudelaire).'' Dieu annon‡a ensuite … tous les logiciels de la terre: ``allez, et multipliez-vous.'' ``Oups!'', se dit-il, ``je n'aurais pas d– dire ‡a!''. Puis il se rendit … l'‚vidence: ``Bah, je n'ai qu'… inventer les virus: ce n'est pas la premiŠre fois que je pense … ce truc.'' Ensuite, Dieu laissa les choses aller, pour quelques temps. Il avait toutefois surestim‚ la bont‚ de l'humanit‚: elle avait eu le temps d'instaurer plein de systŠmes d'exploitation qui se servaient d'unit‚s centrales de maltraitement pour ‚x‚cuter les programmes. Il ‚tait temps que Dieu intervienne: il divulgua les dix COMMAND.COM (nous n'en sommes encore qu'au sixiŠme, mais...): Sois convivial avec le prochain. Conduis-toi bien (grƒce au driver appropri‚). Prends de bonnes r‚solutions, comme Hercule l'a fait. Tu ne te d‚tourneras pas vers LABEL de ton voisin (mˆme si elle a des belles boucles). Tu ne taperas pas ``format c:'', etc. Et n'oubliez pas que, tout comme dans une m‚moire-pile, les derniers seront les premiers, au logi-ciel. De nombreux fidŠles se chargŠrent de r‚pandre la bonne nouvelle. Ils distribuŠrent des tracks dans tout le secteur. Ils priŠrent la vierge floppy (au teint immacul‚ et fort mat) de les aider dans leur sauvegarde de l'ƒme. Ils furent impressionn‚s par l'indiff‚rence des gens: ``mais, vous vous en fichier, ma parole''. Bref, l'effet fut mal calcul‚, et ce fut un m‚ga-flop. Rien … faire, Dieu devait … nouveau intervenir: il envoya son propre fils, … ses RISC, pour acc‚l‚rer l'instruction de ses fidŠles. Ce fils rassembla tout le monde … la BAS(IL)IC (il ‚tait un bon assembleur), pour leur parler. Il fut cependant mal interpr‚t‚ (comme tout BASIC qui se respecte) car il s'exprimait toujours au second degr‚ (en paraboles) plut“t que d'y allez adroitement en ligne droite. Tandis qu'il leur parlait du cierge Pascal (en se disant qu'il br–lait tellement mal qu'il aurait d– prendre un cierge Turbo Pascal, Borland beaucoup mieux), il s'arrˆta. En voyant que personne ne l'‚coutait, il se planta devant la foule (ce n'‚tait pas au programme), muet. On entendait les bugs voler. Sa colŠre l'avait FORTRANsfigur‚. ``C'en est trop! Je retourne chez ma mŠre... ee, chez mon pŠre'', s'‚cria-t-il, ``vous n'avez pas cliqu‚ avec l'Apple, ni avec les dix COMMAND.COM. Vous serez donc condamn‚s … communiquer avec le logi-ciel par le pire des interfaces utilisateurs: la priŠre''. --< G‚ologue en monologue >-- Pendant toute ma vie, j'ai v‚cu dans le rush... et dans la roche. Au primaire, j'ai commenc‚ ma formation. Cette formation, c'‚tait une montagne pour moi. Au secondaire, j'avais le front pliss‚ et le visage errod‚ de mon incompr‚hension profonde. Inutile de vous dire que je n'ai ensuite jamais ‚t‚ au terciaire, ni au quaternaire, d'ailleurs. €a a tout pris pour que j'‚volue, que je sorte des jupes de la mer pour devenir enfin terre … terre et marcher de mes propres jambes. (Ce n'est que plusieurs millions d'ann‚es plus tard que j'ai su voler de mes propres ailes.) Heureusement, mon nom (Pierre, ‚videmment) me destinait un meilleur sort: une carriŠre de pierre, la g‚ologie. J'ai attaqu‚ le noyau de mes problŠmes manteau pour sortir de mes cro–tes. Depuis lors, je dresse mon ‚pine dorsale, mˆme si ‡a me pŠle! Je dresse ma dorsale, mˆme si ‡a m'archi-pŠle. €a n'en prenait pas plus pour faire irruption sur le march‚ du travail. Puis j'ai rencontr‚ cette en-glaise, fort argile, ce qui est normal puisqu'elle venait d'une terre trŠs cultiv‚e. L'Angleterre n'est pas une terre arabe me direz-vous, mais peu-importe. Cette anglaise ‚tait cependant trŠs prude: un simple affleurement et, pfouit!, enfouie qu'elle ‚tait, cette pierre pr‚cieuse. ``Shiste'', me disais-je alors, ``faut-il se r‚signer … vivre un amour plaque tectonique?''. Notre g‚ologue essayait par tous les moyens de la s‚duire. De nombreuses fois, il s'inclinal devant elle mais ‡a ne lui fit pas un pli. Il y avait vraiment une faille dans sa m‚thode, mais heureusement il avait aussi de la veine! -Ah, si l'humanit‚ est une roche s‚dimentaire, nous faisons vraiment partie de la mˆme couche. -Comment, tu veux qu'ensemble l'on couche? -Non, je ne fais pas alluvion au lit (de la riviŠre)... -S‚di-menteur! -Ne p‚pite pas tant, laisse-toi reposer, car au fond se d‚posera l'or (po‚tique, non?). -D‚cante! (D‚campe?) -Si je devais m'enfouir, ‡a me minerai mon moral. Tu es celle que gemme. -Et bien, filon ensemble... Lorsque deux jeunes gens continents se rencontrent et que la subduction opŠre aussi vite, c'est qu'il aura rapprochement rapide des continents et que l'amour plaque tectonique ne durera pas trŠs longtemps. Bon, je passe outre le bloc erratique du texte: ce bloc serait d‚plac‚ et j'aurais peur que vous vous glacier. Retrouvons donc notre g‚ologue dix ans plus tard, ce qui est trŠs court, g‚ologiquement parlant. Il est maintenant dirigeant d'un grand conglom‚rat de compagnies et peut, … son grŠs, se consacrer … ses loisirs favoris. J'ai ainsi amen‚ ma Pierre au sommet de la montagne. Je ne pensais pas, cependant, que le retour au bas de la montagne serait si rapide et si d‚cisif (ou de Sisyphe). Je devais mourir, peu aprŠs, d'une pierre... au rein. --< Cultures Bact‚riennes >-- Il arrive assez souvent dans le monde que deux cultures ne se digŠrent pas, autant au sens propre qu'au sens figur‚. En effet, certains se battent pour leur foie (bref, il se font de la bile pour leur foie). D'autres cherchent … ajouter une appendice … leur pays, n'h‚sitant pas … utiliser des v‚hicules biliaire. Et d'autres, enfin (en faim?), se battent pour leur langue, et dieu sait si ‡a fait une belle luette qu'ils le font. Le tout se complique quand un pays a … sa tˆte un roi qui ne fait qu'… sa tˆte, qu'il a d'ailleurs assez enfl‚e. Mentionnons l'empereur Mucus, … qui les ‚pices montŠrent au nez au point d'en devenir fort morveux, d'o— son nom. Rappelons qu'il a su, duod‚num-minations, passer d'un destin grˆle … intestin ascendant: celui d'empereur. Une fois porte-parole du pays, un tel dictateur peut se faire construire un palais (pas laid du tout) d'o— il ne bouche pas, et dent lequel il go–te … tous les plaisirs de la vie. Et … celui qui lŠvre la voix, il n'a qu'… crier ``en joue!'' pour qu'il avale sa salive: il r‚ussit de cette maniŠre … faire avaler n'importe quoi … la population. Mais ce tyro‹de veut que sont corps politique croisse et pour cela, il doit manger le pays voisin, souvent estomaqu‚ d'une telle attaque soudaine. Parfois l'attaque est plus insidieuse cependant: il utilise les glandes agences s‚crŠtes pour infiltrer les organismes vitaux du corps politique ‚tranger. Il y a parfois des d‚fenses immilitaires contre de tels intrus et l'usage de la force des anti-corps politiques reste alors son seul choix. Le tout se complique aussi lorsque le pays abrite d'anciens colons: intestin plus tragique les attend alors. Indigeste et colon, se font alors chier mutuellement (si vous me passez l'expression), ce qui d‚g‚nŠre en d'interminables luttes intestinales. De nombreux exemples en restent encore dans les annales. Et les cultures se battent, comme si elles ‚taient des cultures plus bact‚riennes qu'humaines. L'Histoire est remplie de ces batailles dont l'issue habituelle montre, h‚las, qu'une culture ‚trangŠre, comme un aliment, semble in‚vitablement destin‚e … ˆtre assimil‚e ou renvoy‚e. --< Les pr‚dic-acteurs >-- Les gens, de nos jours, ne sont plus croyants... c'est incroyable. Il n'ont la foi qu'une fois par an (… No‰l). Il y a quelques ann‚es, je faisais du porte … porte pour faire adh‚rer les gens … ma toute nouvelle religion. Mais il n'adh‚raient pas, ils me disaient ``d‚colle!''. Or un jour, je suis tomb‚ sur un am‚ricain... dans tous ses tats. Il m'a dit: ``vous me dites de louer Dieu, ‡a ne serait pas plus ‚conomique de l'acheter?''. Pour moi qui ‚tait d‚j… un illumin‚ ce flash m'‚blouit complŠtement. A nous deux, nous avons r‚alis‚ un libre-‚change d'id‚es... et cela a abouti … une toute nouvelle religion. Je devais toucher les gens au plus profond d'eux-mˆmes (au portefeuille, par exemple). Maintenant, j'ai compris: dŠs que je parle de foie, ‡a rate! In testin tragique! Et quand j'annonce le co–t des dons, je me fait dire: ``coudonc!'' Alors maintenant, je pr‚cise que ``ces dons sont d‚ductibles d'imp“t. Plus que vous me donnez, plus vous sauvez... et plus vous serez sauv‚s. AprŠs tout, un petit millier de dollars pour assurer toute votre ‚ternit‚, ‡a ne revient pas cher de l'heure!'' Vous allez me demander ce que je fais avec les dons? Je me charge moi-mˆme de leur gestion. Je dis ``gestion'' parce que les dons sont un peu mang‚s. Bref, grƒce … ce coup de marketing, de plus en plus de gens croient en ma religion. Et plus la population croit en ma religion, plus ma religion croŒt en popularit‚. videmment, ‡a m'oblige … faire des apparitions... en public. Des apparitions, enfin, fa‡on de parler, je ne suis pas capable de descendre du ciel. Je ne sais pas comment il fait Lui... Non mais j'ai quand mˆme des pouvoirs: croyez-le ou non, je suis un m‚dium. J'ai des pouvoirs m‚diatiques. Je ne suis pas un m‚dium extraordinaire: un m‚dium moyen seulement. Quand j'essaie de faire plier une cuillŠre, ‡a ne lui fait pas un pli. Je vous avoue que c'est d‚courageant: un m‚dium qui rate son coup est un m‚dium bien cuit. C'est un proverbe aztŠque (… steak?). Mes disciples ne viennent pas vraiment me voir pour mes pouvoirs, mais surtout pour mes sermons. Voyez-vous, j'ai modernis‚ la religion un petit peu. Par exemple, le monde n'a pas ‚t‚ cr‚‚ en six jours... Mais bien en quarante heures, pas plus: tout le monde a droit … des heures de travail raisonnables. Devant cette foule hyst‚rique, je pr‚sente mes volont‚s les plus profondes: ``il faut empˆcher P‚ladeau de prendre le contr“le du livret ``Prions en glise''. Mˆme s'il y arrivait, je cr‚erais une autre revue, pour contrer son attaque, qui s'appellerait, non pas le ``Lundi'', mais le ``Dimanche''.'' Mes messages ne passent pas toujours, car il y a parfois des sceptiques dans la salle. Mais je crois qu'au fond d'eux-mˆmes ce sont des faux sceptiques. Alors j'aimerais dire, comme on dit en anglais: ``payez attention''. En fran‡ais, on est oblig‚ de dire seulement ``prˆter une oreille attentive''... quoique le fait que ce soit prˆt‚ peut peut-ˆtre augmenter l'int‚rˆt. En tout cas, je n'arrive pas toujours … obtenir l'effet... escompt‚. (J'avais d'autres jeux de mots dans la mˆme banque, mais je vous les... ‚pargne.) L'autre jour il y en a un qui m'a dit: ``Vous nous dites que c'est pour notre b‚n‚fice qu'il faut ˆtre bon en actions, et en intentions, mais on voit bien que votre intention c'est de faire des b‚n‚fices avec des bonds et des actions.'' J'ai r‚pondu simplement: ``Comme c'est spirituel! Tu veux faire de l'esprit? Tu veux faire ton disciple indisciplin‚?'' Mais … ce moment, mon inspiration expirait... j'ai donc conclu rapidement ma r‚ponse: ``Non, non, ce n'est pas parce que je t'impose les mains qu'il faut me taxer d'imposteur.'' Il n'‚tait toujours pas convaincu, c'‚tait un cas d‚sesp‚r‚. Alors, pour empˆcher que ce genre de problŠme ne se reproduise, je me suis adress‚ directement … toute la foule: ``Oui, je sais, il y a des rumeurs qui courent … mon sujet: ne me faites pas marcher, je veux les rattraper.'' Or il s'est av‚r‚ que ma foule de brebis ne comportait pas trop de moutons noirs. Au moins, mes fidŠles, eux, ne souilleront pas ma r‚putation comme le font injustement les m‚dias dans l'imm‚diat. Et j'espŠre que, pour qu'ils conservent la foi en moi, je n'aurai qu'… leur dire: ``Allez en paix... yant … la sortie.'' --< Songes song‚s >-- Une nuit qui nuisait … mon sommeil me permit de philosopher un peu. Je vous pr‚sente le fruit de cet ‚tat v‚g‚tatif. Cela permettra peut-ˆtre … ceux qui doivent quotidiennement trouver des pens‚es du jour de puiser leurs sources ailleurs que dans La Fontaine. On peut g‚n‚ralement pallier … la blancheur d'une nuit par la noirceur d'un caf‚. Dans le but d'uniformiser l'usure des claviers, les ing‚nieurs se sont sentis oblig‚s d'utiliser la lettre k … toutes les sauces. Dans le but de contrecarrer ce manque d'imagination, ils d‚cidŠrent par la suite d'utiliser l'alphabet grec en entier (alphabet qui a la particularit‚ de ne pas se trouver sur un clavier, ce qui rŠgle le problŠme de l'usure des claviers une fois pour toutes). L'ing‚nieur aime bien les relations du type y=ax+b+k, o— y=ax+b est la relation th‚orique et k un facteur empirique donn‚ dans les tables de tout bon handbook d'ing‚nierie. La qualit‚ d'un repas de caf‚t‚ria peut se mesurer par la quantit‚ de sel qu'il faut y ajouter pour le rendre acceptable (proc‚d‚ similaire au titrage d'une base par un acide). S'instruire, c'est apprendre que l'on ne sait pas grand-chose, aprŠs tout. C'est pourquoi, pendant un cours, ce sont toujours ceux qui en savent le plus qui posent le plus de questions. Les seules fonctions int‚grables … coup s–r sont celles obtenues … la suite d'une d‚rivation. La principale utilit‚ de la notation matricielle est de permettre … un professeur de poser des questions trŠs courtes tout en demandant une ‚norme quantit‚ de calcul. Une classe reste muette d'incompr‚hension devant une question du professeur. Ce dernier s'‚crie donc: ``Ne r‚pondez pas tous en mˆme temps, ‡a fait des interf‚rences destructives.'' R‚flexion sur le capitalisme: Dans un pays o— tout le monde fait ses courses, c'est une ‚conomie de marcher. Les gens qui en sont … leur cinquiŠme mariage ne demandent plus: ``Habitez-vous chez vos parents?'', mais plut“t: ``Vos enfants habitent-ils chez vous?'' Avec l'intensit‚ du volume sonore de la musique dans les bars, on ne peut plus r‚citer des poŠmes pour s‚duire l'ƒme soeur. On doit alors le faire en langage des sourds et muets. Cela a donn‚ naissance … la danse rap. Lorsqu'on me demande si j'ai pens‚ … ‚crire un livre, je reponds: ``Mais voyons, des textes comme ‡a, se serait fou … relier!'' A r‚pliquer … quelqu'un qui se trompe souvent: ``Si c'est en faisant des erreurs que l'on apprend, tu dois en savoir des choses.'' Si quelqu'un vous fait remarquer: ``C'est un coup de chance, ton histoire!'', remettez les choses … leur place en usant de votre ‚rudition: ``Pardon monsieur, c'est un concours de circonstances, et par le fait mˆme, c'est une circonstance qui a gagn‚.'' ``Errare humanum est'' signifie ``L'homme erre vers l'est''. C'est pourquoi les newfies sont ce qu'ils sont. J'ai d‚couvert le sens de l'univers: il est … l'envers. La taxe nous permet de distinguer les drogues l‚gales des drogues ill‚gales: les premiŠres sont tax‚es, les autres, non. Je suis un incompris: on ne me comprend tellement pas que je suis un r‚bus pour la soci‚t‚. C'est ainsi qu'en r‚fl‚chissant dans le noir on arrive … faire la lumiŠre sur certaines choses... --< Un stade pas trŠs avanc‚ >-- Le stade olympique de Montr‚al, depuis son ouverture, jusqu'… sa couverture, a beaucoup fait parler de lui. S'il eut ‚t‚ humain, il eut ‚t‚ tout rouge. Ne l'‚tant pas, il est t'ouvert. Et il est rest‚ longtemps ouvert: depuis l'‚poque ant‚diluvienne … laquelle il a ‚t‚ construit, beaucoup d'eau a coul‚... dans le stade. Ce pauvre stade est toujours rest‚ … un stade... pas trŠs avanc‚. Les compagnies d'assurances ont toujours h‚sit‚ … assurer cette structure inachev‚e et fragile: c'est pourquoi le stade n'est pas couvert. Le stade a quand mˆme eu la couverture des m‚dias. Grƒce … cela, on connaŒt la toile de fond de l'histoire. Alors on fut forc‚ de sortir cette fameuse toile de ses toiles d'araign‚es et de la poser comme il se toit. Nous avons alors enfin pu inaugurer l'ouverture du stade ferm‚. Toutefois, cette pauvre toile allait subir un drame... d‚chirant. Et comme cela s'est produit … plusieurs reprises, on a du la repriser … plusieurs reprises, pour empˆcher qu'elle se rebrise. Le sort de cette toile toujours bris‚e n'est pas trŠs pris‚. Il y a peut-ˆtre espoir d'am‚liorer les choses, si l'Orchestre Symphonique de Montr‚al donnait un concert au stade. Imaginez: Charles Dutoit, au stade! C'est le sp‚cialiste qu'il faut. Enfin, le mal est fait et le mieux qu'on puisse faire maintenant, c'est d'esp‚rer que cela ne se reproduise plus. On n'en est pas arriv‚ au stade de la reproduction quand mˆme! Qu'un monument ne souffre plus jamais d'une erreur aussi... monumentale. Qu'un tel pr‚c‚dent ne cr‚e pas de suivant. On peut quand mˆme se dire, pour s'encourager: jamais deux sans toit! --< Sacr‚ sac! >-- Fait ‚trange, on trouva un jour un jeune gar‡on parlant … son sac d'‚cole: ``je ne suis plus capable de te supporter''. Fait encore plus ‚trange, celui-ci lui r‚pondit: ``Ce n'est pas de ma faute si ‡a pŠse... des livres.'' ``-Ce n'est pas une question de poids. Tu as encore perdu mon crayon et je ne le supporte pas. -Tu ne vas quand mˆme pas me mettre … dos pour ‡a. -Non, mais je vais te mettre … sac, jusqu'… ce que je le trouve. -Allez, calme-toi, je vais le trouver ton crayon.'' Le sac, se tournant vers son contenu, lui dit: ``Mon cher coffre … crayon, trouve le crayon ou je te coffre.'' Le coffre usa de tout son coffre et cria: ``-Bic, mon ch‚ri o— es-tu? -Eh oh, c'est un crayon que je cherche, pas un stylo. -C'est son nom de plume...'' Rien … faire, le crayon ne laissait toujours aucun signe d'‚crit. Ce n'‚tait pas la premiŠre fois qu'il disparaissait sans laisser de traces. Dans le brouhaha des outils qui s'entrechoquaient dans le coffre … crayons, on entendait des rumeurs naŒtre: ``-S'il s'efface encore une fois il faudra aller voir le correcteur, qu'il le liquide. -Oui, je m'en doutais qu'il r‚cidiverait: il avait mauvaise mine ses derniers jours. -C'est qu'il vient de casser... -Peu importe, ce n'est pas une raison pour avoir une telle ligne de conduite. -C'est un de ses traits de caractŠre...'' Quelques bonnes id‚es jaillirent: ``-Quelqu'un l'a certainement vu! -On devrait aller voir le rapporteur, il d‚nonce toujours tout le monde. -Ou aller voir le gabarit de cercle: avec un gabarit pareil, il est capable de faire parler n'importe qui.'' Certains tentŠrent de prendre la situation en main, comme la rŠgle, par exemple: ``-Ce crayon doit suivre la rŠgle et aller dans le droit chemin, ou ‡a ira mal. -Ce n'est parce que tu es gradu‚e que tu es plus intelligente que les autres.'', lui reprocha-t-on. Cependant, la rŠgle, trŠs fut‚e et trŠs affut‚e, voulait trancher la question et en particulier la feuille qui supportait la question. Pourquoi la feuille? Parce que c'‚tait chez elle que le crayon avait laiss‚ ses derniŠres traces. L'interrogatoire restait vain: les feuilles restaient muettes (et sourdes). Peut-ˆtre ‚taient-elles dures de la feuille? ``Vous vous taisez? Quel est votre mobile, feuille?'', questionna la rŠgle. ``(.)'', cria la feuille. ``-Je les connais, ces feuilles, elles finissent toujours par plier. Elles sont toutes les mˆmes, toutes de la mˆme lign‚e.'' ``(.)'', acquiessa la feuille. ``C'est la guerre!'', gueula la rŠgle. ``Amenez le porte-mine!'', cria un inconnu. ``€a va signer. Il y en a qui vont perdre des plumes...'', poursuivit la rŠgle. ``Amenez le porte-plume.'', cria le mˆme inconnu, qu'on commence … bien connaŒtre. Puis la rŠgle sugg‚ra enfin une alternative raisonnable: ``nous allons quadriller les feuilles pour localiser le point o— le crayon est.'' Tandis qu'une solution se dessinait, l'efface restait rong‚e (comme toute efface qui se respecte) d'inqui‚tude. Puis soudain: ``Coucou'', de s'‚crire (pardon, de s'‚crier) le crayon. Chacun participa … l'engueulade qui suivit: ``Te voil…, toi! O— ‚tais-tu, espŠce d'illustre sans dessein? Crayon (in)gras, c'est … cette heure que tu te pointe? Chez toi, la ponctualit‚ n'est pas un sens trŠs aiguis‚.'' Tout ce brouhaha incita le propri‚taire du sac … prendre une r‚solution: ``l'ordre ne rŠgne pas chez toi, cher sac. Je vais ˆtre oblig‚ de t'ouvrir un casier. Judicieux qu'il serait de t'y enfermer. Et dor‚navant, tais-toi!'' Et c'est depuis ce premier jour d'‚cole que ce sac a cess‚ de parler et fut contraint de rester enferm‚ dans une case pour la plus grande partie de la journ‚e, plut“t que d'aller gambader gaiement dans les pr‚s, parmi les buissons. Finie, l'‚cole buissonniŠre! --< Id‚es noires et blancs de m‚moire >-- Avant la pr‚sentation de la repr‚sentation je pr‚sente des signes inqui‚tants d'inqui‚tude. Le trac me tracasse, me traque et m'attaque. Il n'est pas gai le b‚gaiement qui me gagne. La gˆne qui gŒt sous mes m‚ninges, jaillit d‚j…. Mais je me marmonne … moi-mˆme que le calme domine de maniŠre … momifier mes mont‚es d'‚nervements maniaques. Heureusement, je n'ai pas le temps de faire des allit‚rations sur litt‚ralement toutes les lettres avant que le moment o— je dois monter sur scŠne n'arrive. Je me pr‚pare … dire ma premiŠre r‚plique. Ce n'est pas vraiment une r‚plique puisque rien n'a ‚t‚ dit auparavant. Je profŠre donc ma premiŠre plique: ``Il va sans dire que...'' A ce moment, un blanc de m‚moire me saisit. Mais la salle trouve que ce blanc illustre bien l'esprit de la phrase... et ‚clate de rire. Je dois absolument me rappeler de ce blanc de m‚moire pour l'ajouter … la prochaine repr‚sentation. Le pire ‚tait que je n'arrivais pas … me rappeler de mon texte. Et l'assistance ne m'‚tait pas d'une grande assistance. Si seulement j'avais eu un souffleur, j'aurais eu l'air... de savoir quoi dire. Sinon, je quoi ais-je l'air... devant toutes les aspirations du public. Plus le silence durait, plus l'assistance devenait dure. Je n'aurais pas cru que les gens oseraient d‚j… exiger le remboursement de leur billet. Toutefois le public ne s'est pas privatis‚ (pardon, ne s'est pas priv‚). J'ai d– alors improviser. Mais on ne s'improvise pas improvisateur. Sans souffleur, l'inspiration ne vient pas vite. Tandis que la transpiration m'irrigait la figure, je sus (et je sue) me tirer d'affaire: ``Il va sans dire... que je me d‚die au non-dit. Car le non-dit n'a pas dit son dernier mot. Je suis donc devenu un sp‚cialiste en jeux de mots utilisant la pantomime.'' La salle, commen‡ant … percevoir l'importance du non-dit, se t–t. J'avais r‚gl‚ une partie de mon problŠme: je n'avais plus … parler. Je devais cependant bouger! J'entamai donc le c‚lŠbre poŠme pour sourds et muets qui traduit la philosophie mˆme de la pantomime: ``Je m'‚meus quand tu te meus.'' Essayez de mimer ‡a! Mais la foule n'y compris rien. Elle ne s'‚m–t point, elle s'ameuta. Devant cette meute en ‚meute, je dus m'enfuir. €a m'apprendra … avoir un blanc de m‚moire. Dor‚navant, quand ma matiŠre grise aura des blancs, je broirai du noir! --< l‚ment hyper-actif >-- Il y a des gens qui ne peuvent s'empˆcher d'ˆtre occup‚s sans arrˆt. Ils font partie de tous les comit‚s, participent … toutes les activit‚s et ne restent pas une seconde en place. Bref, ils sont partout mais il est impossible de les trouver, comme Dieu. Mais contrairement … Dieu, ils sont vuln‚rables au burn out. Retrouvons donc l'un d'eux chez son psychologue. ``-J'ai trop v‚cu sous tension, en courant sans interruption. -Ce sont les sources de votre mal, vous devriez les contr“ler. -Vous avez raison, d'autant plus que j'ai n‚glig‚ mon alimentation. Maintenant, je suis hors circuit. -Vous tombez pile, ces types de problŠmes sont justement ma sp‚cialit‚. Je connais une batterie de traitement. -Pas l'‚lectrochoc, j'espŠre. -N'ayez crainte pour votre self, le transformateur de votre vie n'en aura pas besoin. -Qu'allez vous faire, alors? J'ai peur de me faire embobiner dans je ne sais quel traitement. -N'ayez crainte, je ne cherche pas … vous induire... en erreur. Voyez-vous, j'ai les capacit‚s: je me charge de tout (je chargerai ensuite le gouvernement). Vous me disiez que vous n‚gligiez votre alimentation... -Oui, je ne mangeais que du fast-food. -videment, pour allez plus vite. -C'est ‡a: j'aimais bien le poulet press‚. -Maintenant rappelez-moi vos sympt“mes. -Ma vie file tellement que j'en perds le fil. -Alors, laissez-moi vous dire que c'est courant, c'est anodin. -Mais je me sens vraiment mal prise et je ne m'en fiche pas. Il y a peut-ˆtre une connexion entre mon mal et quelque chose de potentiellement plus grave. -Je comprends votre r‚Volt. Toutefois le risque potentiel est faible. Vous n'avez qu'… prendre du repos et vous isoler quelque temps de votre vie active. -Ce n'est pas en m'isolant que j'apprendrai comment me conduire. DŠs la fin de ces vacances, j'ai peur que ma vie en courant continue. -Il y a une alternative: redresser la situation. Pour ce traitement, il vous faut une bonne dose diode. Des vacances prŠs de la mer devraient suffire pour vous donner go–t … ne rien faire. -Ecoutez, je vous l'ai dit, j'ai perdu le fil: je n'arrive pas … joindre les deux bouts. Je ne peux me payer un tel voyage. -Il ne reste que le traitement-choc. Je vous prescris d'‚couter tous les t‚l‚romans: il n'y a rien de mieux pour diminuer la productivit‚ d'un individu. -J'ai peur de diminuer mes facult‚s intellectuelles. -Elle sont facultatives pour r‚ussir, mais si ‡a vous inquiŠte vraiment, n'‚coutez qu'un ‚pisode sur deux en essayant d'imaginer ce qui s'est pass‚ entre. L'effort mental devrait ˆtre raisonnable... -Merci, je vais me sentir plus … ma place dans la soci‚t‚. --< Cette personne... c'est quelqu'un >-- -Allo? y'a quelqu'un? -Non, y'a personne! -€a tombe bien, c'est justement … une personne que je voulais parler. -Et … quelle personne voulez-vous parler? -A personne en particulier... -C'est pour ‡a que vous appelez chez un particulier? -Qu'avez vous de particulier? -Rien, je suis un particulier comme vous et moi. -Dommage, en appelant chez personne, j'esp‚rais tomber, par hasard, sur une personalit‚. -Effectivement, j'‚tais une personne alit‚e et vous m'avez r‚veill‚. -D‚sol‚. Je manque d'adresse. -Je ne vous donnerez certainement pas la mienne, j'ai bien trop peur que vous veniez me parler ici, en personne! -Pourtant, de personne … personne, on se comprend mieux. -Alors, ne venez que lorsque personne n'est l…. Je ne d‚sire pas vous parler. -Donnez-moi votre adresse alors: je pourrais vous adresser une lettre plut“t que de vous adresser la parole. -Si vous ˆtes plus un homme de lettre que de parole, taisez-vous! -Que voulez-vous, quand je m'‚crit, je m'‚crie aussi. -Alors ‚crivez-vous et ne m'embˆtez plus. -Vous voulez que je m'envoie, par la poste, mon propre texte? -Oubliez ‡a! Avec votre manque d'adresse, vous n'irez pas loin si vous vous envoyez par la poste. -Et vous osez me dire cel… avec ce timbre de voix? -C'est normal, vous ˆtes d‚j… timbr‚... si timbr‚ qu'on devrait vous oblit‚rer de la surface de la terre. -Comment osez-vous? Vous qui n'ˆtes personne et moi, quelqu'un. -Arrˆter de faire le pr‚tentieux: je n'accepte pas les frais d'appel. -Si vous ‚tiez mon employ‚, je vous f'rais virer. -Je ne suis pas votre employ‚, employez vous … d'autres chose. -Savez-vous … qui vous parlez ainsi? -Non vous ne vous ˆtes pas pr‚sent‚, et mˆme si vous vous pr‚sentiez, je ne voterais pas pour vous. -Comment avez-vous devin‚ que j'‚tais politicien? -Votre maniŠre de parler pour ne rien dire ne trompe pas. -Ceci ‚tait un message enregistr‚. -Ceci aussi. (Bip.) --< snoixelf‚R >-- Dieu existe-t-il? Dieu seul le sait. Des physiciens ont montr‚ que le vide n'est pas vide. Merci, ‡a comble un vide dans mes connaissances. D'autres physiciens ont montr‚ que l'atome (mot qui veut dire ``indivisible'') pouvait ˆtre fissionn‚. Non mais, vous avez fini de changer d'avis? Pourquoi la terre tourne-t-elle? Si elle ne tournait pas, l'une face de ses faces deviendrait trŠs chaude et l'autre, trŠs froide. La vie n'aurait donc pas pu s'y d‚velopper. Aucun humain n'aurait ainsi exist‚ et il n'y aurait eu personne sur terre pour se poser la question. Il en d‚coule que la terre tourne et il ne peut en ˆtre autrement puisqu'on s'est pos‚ la question. Le bon physicien th‚orique est celui qui peut trouver une explication … tout ph‚nomŠne. Il reste au physicien exp‚rimental … s'assurer que ce ph‚nomŠne existe vraiment. Le grand problŠme de la science consiste … faire co‹ncider les d‚couvertes de l'un et l'autre. Autrement, quelqu'un passe in‚vitablement pour un fou. Un scientifique passe la premiŠre partie de sa vie … trouver des gens de plus haute notori‚t‚ pour co-signer ses publications, et la deuxiŠme partie de sa vie … chercher des publications … co-signer. L'Univers est-il infini? L'ƒge de l'Univers est-il infini? La masse de l'Univers est-elle infinie? Avez-vous fini? Pourquoi l'Univers n'a-t-il que trois dimensions spatiales? Parce qu'il n'y a plus de lettres aprŠs x,y et z. En thermodynamique, on d‚finit une machine inutile comme ‚tant une machine qui ne produit aucun travail vers l'ext‚rieur. L'Univers est donc inutile: il ne produit aucun travail vers l'ext‚rieur. --< Parlons en cellulaire >-- On parle de plus en plus de l'‚clatement de la cellule familiale. Pourtant, ce n'est pas nouveau: bien avant l'apparition de la reproduction sexu‚e, les cellules se s‚paraient d‚j…. L'apparition des sexes n'a fait qu'empirer les choses. C'est ainsi que les unis cellulaires n'ont pas tard‚ … devenir des d‚sunis cellulaires. Depuis ce temps triste, ils n'ont pluri (cellulaire). Le tout premier micro-organisme qui eut l'id‚e de ce nouveau mode de reproduction h‚sitait … le mettre en pratique. Comme les humains pensent parfois … des choses... m‚iose pas en parler. Que voulez-vous, quand le sexe apparut, le et la gŠne existait d‚j… depuis longtemps. C'est pour ‡a que ‡a a pris des centaines de millions d'ann‚es avant que le premier rite de rut eu lieu! Ce n'est qu'alors que les micro-orga(ni)smes d‚couvrirent le vieil adage: ``o— il y a des gŠnes, il y a du plaisir''. D'autant plus qu'… l'‚poque, les risques d'attraper une maladie ‚taient minimes. Etre un microbe comporte de gros avantages: on ne peut pas en attraper... Mais on risquerait toujours d'attraper un virus... Il semble donc encore plus avantageux d'ˆtre soi-mˆme un virus. Vive la vie de virus, la vie de rˆve! Le hic, c'est qu'un virus n'est pas un ˆtre trŠs... vivant. Bref, les maladies, il vaut mieux vivre avec, si la seule alternative c'est de ne pas vivre du tout! Bon, nous avons parl‚ d'une des pulsions les plus primitives des ˆtres vivants, il en reste une autre: la violence. Mais je n'ai rien d'int‚ressant … dire l…-dessus, sinon que mon pŠre est plus fort que le tien. Il ne nous manque plus grand-chose pour arriver au niveau du film am‚ricain moyen: il nous reste … parler d'argent. Heureusement pour nous, les bact‚ries de l'intestin n'ont pas encore eu le temps d'inventer le capitalisme: elles sont rest‚es des organismes … but non-laxatif. A moins que d'autres viennent les faire ch... Ces intrus, ce sont souvent des coliformes qui, comme leur nom l'indique, sont en forme de colis. C'est pourquoi ils y mettent le paquet, et ce n'est pas un cadeau. Seuls les ˆtres vivants ‚volu‚s ont d‚velopp‚ les concepts de base li‚s … l'argent. Pour qu'arrivent les premiers porte-feuilles, il a fallut attendre l'apparition des plantes. Celles-ci d‚couvrirent les avantages de l'immobilier, ‚tant les premiŠres … quitter le domaine du liquide (la mer). Il faut dire que les requins de la finance aiment bien le liquide: on y trouve tant de poissons. Ce n'est qu'… l'arriv‚e de l'homme que naquit le concept de marcher. Avec les mains libres, il put commencer … brasser de l'argent. L'homme l'a tellement brass‚e, qu'elle en a encaiss‚, l'argent. Pour se d‚fendre, elle a d‚velopp‚ un coffre fort. Alors l'homme a consenti … laisser l'argent de c“t‚, ne plus lui toucher, pour un temps, de sorte qu'elle prenne des forces. L'homme et l'argent se sont fait confiance. Un trust mutuel(le). C'est alors que l'argent s'est mis … faire des petits. A quand la reproduction sexu‚e chez les dollars? --< Dix mots maudits >-- Il y a des mots qui me causent des maux... et j'ai d‚cid‚, une fois pour toutes, de me d‚fouler en leur donnant la d‚finition qu'ils m‚ritent. Chanteur populaire: Le r“le du chanteur populaire consiste, non pas … chanter car les choristes s'en chargent, mais bien … figurer sur la pochette du disque. Equation empirique: Equation contenant le plus de variables arbitraires possibles, de maniŠre … concorder avec le plus grand nombre de mesures exp‚rimentales possibles, tout en donnant du travail … un nombre maximum de personne pour d‚terminer la valeur de ces constantes variables dans toutes les situations possibles. Equation fondamentale: Equation dont la seule utilit‚ est de donner de la c‚l‚brit‚ … celui qui l'a trouv‚e; de la difficult‚ … celui qui l'utilise pendant ses ‚tudes; des bons souvenirs … celui qui ne l'utilise plus dans son travail; et de la c‚l‚brit‚ … celui qui se rend compte, cent ans plus tard, qu'elle est fausse. Et/ou: Mot dissuasif tentant de d‚courager les gens … lire les ingr‚dients d'un produit jusqu'au bout. Synonyme: ``il se peut que l'on aie ‚galement mis de cette autre chose''. Ing‚nierie: Application (lucrative et simple) des d‚couvertes (subventionn‚es et complexes) des scientifiques Hit: PiŠce musicale construite selon le sch‚ma: refrain, couplet, refrain, couplet, refrain, refrain, refrain, refrain, baisser le volume, couper. Magn‚tisme: Tentative d'incorporer des bases scientifiques aux m‚decines extrˆmement douces propos‚es dans le ``Lundi''. TrŠs utilis‚ aussi dans les s‚ries de science-fiction des ann‚es soixante-dix. Mu: Lettre grecque voulant dire n'importe quoi. Comme signification, choisir de pr‚f‚rence (mais ce n'est pas essentiel) un mot qui commence par cette syllabe. (Vous ne trouvez pas qu'on devrait utiliser les caractŠres chinois pour symboliser diverses quantit‚s physiques? Au moins on ne tomberait pas toujours sur les mˆmes symboles!) RND (Random Number Dgenerator): La touche la plus pratique d'une calculatrice scientifique lorsqu'il s'agit de remplir le tableau de r‚sultats d'une exp‚rience de physique rat‚e. Lors des examens … choix multiples, elle remplace silencieusement le d‚ ou le ``pile ou face''. Wu: Mot inutile figurant dans le dictionnaire uniquement grƒce aux pressions de l'Ordre des Joueurs de Scrabble. --< Histoire d‚cousue >-- H‚laine Tricot avait tout pour devenir couturiŠre. Autant son propre nom, que celui de la famille dont elle ‚tait tissue, la pr‚destinait. Sa mŠre lui racontait sans cesse des histoires typiques tir‚es de la couture de son pays, telles ``Le petit ourlet'' ou encore ``Le petit capuchon rouge'' avec son c‚lŠbre ``tire la bobinette et le fil suivra''. Il ‚tait presque d‚cid‚ qu'elle consacrerait son m‚tier … tisser. C'est ainsi qu'… vingt-cinq ans H‚laine d‚marra sa propre petite compagnie de costumes fabriqu‚s selon les cou(s)tumes de son pays natal (le SuŠde). Mais son succŠs fut de courte dur‚e car l'automatisation commen‡ait alors son oeuvre n‚faste sur la main-d'oeuvre. ``Avec l'arriv‚e de ces m‚tiers … tisser je vais perdre le mien'', se dit-elle. Elle parla donc … ses employ‚s: ``il faut qu'on se serre les coudres''. Dans un premier temps, la r‚ponse fut favorable: ``on peut t'aider (… coudre)''. Mais avec le temps, les employ‚s perdirent le go–t de sacrifier une partie de leur paie pour avoir la paix d'esprit. Si bien que ses employ‚s se sont mis … la r‚priser et elle se sentit piqu‚e dans son orgueil. Elle durcit le ton: ``rappelez-vous d'une des rŠgles d'or de la couture: je suis le patron, vous devez suivre mes coupures.'' C'est alors qu'arriva un repr‚sentant d'une corporation am‚ricaine, la ``Fabric of Fabric inc.'', qui proposa d'acheter sa compagnie. ``-Vous n'arrivez pas... … point, lui poursuivit-elle, ce n'est pas une solution qui maille. -Vous oubliez que nos machines filent et que vous aurez du fil … retordre … nous suivre … moins de vous joindre … nous.'' Mais la suspicion s'installait en elle. Elle se disait: ``cette histoire est cousue de fil blanc, j'aimerais savoir ce qui s'y tricote, quitte … devoir faire une filature''. Elle refusa donc l'offre. ``Ils se paieraient ma tˆte... et de mon porte-feuille'', pensa-t-elle. ``Ils me font marcher: les mises … pied seraient massives.'' On s'attendait … ce que la compagnie vive une situation ‚conomique pr‚caire, certes, mais on ne se doutait pas que ce serait la fermeture-‚clair. La concurrence fut si forte que ce fut la faillite. La compagnie s'‚tait fait battre … plates coutures. Cela fit les manchettes des quotidiens locaux. Les plaintes des employ‚s y fusaient et y diffusaient: ``€a valait la peine de suivre des cours, si on est mˆme plus capable de marcher du travail.'' Elle restait muette devant les ruines, en disant: ``Tandis que tout le monde fait le fil aux bureaux d'assurance-ch“mage, ici, plus un chas.'' C'est ainsi que, de fil en aiguille, elle est partie d'une industrie qui marchait au coton pour en revenir … la philosophie du bas de laine. --< Errata >-- Errata: Je viens de me rendre compte que dans un de mes textes d'il y a deux ans, j'avais oubli‚ de fermer une parenthŠse: je la ferme donc ici ). Erratum: Puisqu'il n'y qu'une seule erreur, j'aurais du ‚crire ``erratum'' plut“t que ``errata''. Je ne pouvais pas l'indiquer dans l'erratum pr‚c‚dent car il y aurait eu deux erreurs et le mot ``errata'' aurait ‚t‚ correct. Erratum: J'ai recompt‚: en fait je n'avais pas oubli‚ de parenthŠses. Aucun des errata pr‚c‚dents ne devrait figurer... ni celui-ci. --< Exp‚rience exp‚rimentale >-- La recherche en ing‚nierie est coinc‚e entre deux tendances: la volont‚ d'appliquer quelque chose (de forc‚ment connu) et la volont‚ de trouver quelque chose (de forc‚ment inconnu). Le r‚sultat, est un emploi qui suit le mode d'emploi suivant... Effectuer une s‚rie de mesures de deux grandeurs physiques. Tracer le graphique de l'une en fonction de l'autre. Si le graphique n'est pas une droite, effectuer le logarithme de l'une ou l'autre des grandeurs physiques (ou mˆme des deux). Retracer le graphique. Si, aprŠs avoir r‚p‚t‚ l'op‚ration pr‚c‚dente trois fois de suite, une ligne droite n'a toujours pas ‚t‚ obtenue, faites passer un polyn“me d'ordre n-1 (n ‚tant le nombre de point) … travers les points. Si n est sup‚rieur … 10, le logiciel charg‚ de trouver le polyn“me en question plantera probablement. Dans ce cas, r‚pertoriez vos mesures dans une table et ne vous posez plus de question. La partie exp‚rimentale est termin‚e, il reste … communiquer votre r‚sultat … d'autres. Puisque ce que vous avez fait est trŠs simple, il s'agit maintenant de rendre cela compliqu‚ pour justifier votre salaire et/ou vos subventions. Faire une recherche bibliographique pouss‚e, de maniŠre … citer des auteurs au nom impressionnant (allemand ou russe, par exemple) savamment assaisonn‚s d'am‚ricains issus d'universit‚s connues. Lors de la r‚daction d'un article, utiliser les tactiques suivantes: Ne pas expliquer directement ce que vous faites (``...using various finite element algorithms, we found...''). Laisser toujours sous entendre que vous en avez fait beaucoup plus (``...it can also be shown that...''). Montrer que vous dominez la situation (``...one can obviously conclude that...''). Lors des pr‚sentations orales, adopter l'une ou l'autre des strat‚gies suivantes: Pr‚parer de magnifiques ac‚tates (ou id‚alement, des diapositives sur fond bleu d‚grad‚). Vous serez a priori appr‚ci‚, tout en risquant d'avoir l'air d'un simple repr‚sentant de marketing. Ne rien pr‚parer. Vous aurez alors l'air d'un habitu‚ qui possŠde bien sa matiŠre. Vous aurez cependant l'air de quelqu'un qui la possŠde trop, au point de ne pas pouvoir la partager. Ces activit‚s de recherche et de communication ne repr‚sentent qu'une petite partie de votre activit‚: beaucoup de votre temps sera consacr‚ … justifier votre travail. Dans une universit‚ cela se fait en remplissant les innombrables formulaires de demande de subvention. Dans une industrie, il s'agit de convaincre son patron qui, h‚las, ne comprendra jamais rien … ce que vous faites. Selon lui, de toute fa‡on, les d‚penses de recherche et d‚veloppement seront toujours trop ‚lev‚es. Enfin, j'espŠre ne pas trop vous avoir d‚courag‚. C'est quand mˆme int‚ressant la recherche, si on cherche un peu. Ne faites pas partie de ceux qui disent, comme Proust: ``Ah! la recherche, du temps perdu''. --< Marintime >-- Je suis un marin et je me marre bien sur terre, parce que la mer, y'en amarre. Fini de draguer les hauts fonds, maintenant je peux draguer les hauts talons... Je cherche ardemment ma sirŠne: mais les klaxons fr‚quentes. Vous voyez, je suis un peu trop superficiel: c'est normal, un marin n'aime pas ˆtre profond. Le fait d'ˆtre souvent un saoul marin n'aide pas non plus. J'aime bien aborder les filles, quitte … ce qu'elle aient mauvaise opinion de moi, au premier sabord. Voyez-vous, je me fais souvent traiter de port. Je pr‚f‚rerais bien me faire accoster, toutefois j'ai bien peur que ‡a ne ma rive jamais. Pourtant, je ne devrais pas avoir de difficult‚: je n'ai qu'… faire presque la mˆme chose qu'en mer. Avant, je tenais la barre, maintenant je me tiens dans les bars. Je m'occupais de la coque, je fais maintenant le coq. J'‚tais sur le pont, je fais maintenant le paon. H‚las, chaloupe … tout coup. Pourquoi plancton un type comme moi? On a peur que j'aie des micro-organismes? Elles ont fait de moi une loque humaine... non, pire: une badluck humaine. ``La vie n'est pagaie: ferme ta gueule, pis rame'', disait d'ailleurs mon capitaine, du haut de son siŠge capitain‚. Et puis un jour, j'eus le vent dans les voiles. Je vis une rose desvents moi. Je m'orientai vers elle, me ventant en peu. ``O s‚ant de rˆve, devant toi je dis vague'', lui dis-je. Elle fut touch‚e par ma po‚sie, n'ayant pas eu le temps de regarder la signification du mot ``s‚ant'' dans le dictionnaire. Je (la) poursuivit donc: ``-Voulez-vous m'accorder cette vague? -Je n'aime pas valser, malheureusement. -Eh bien alors, tanguons. -Vous y allez un peu vite! -Un cruiser va toujours vite, qu'il y ait de la vague ou non.'' Je m'int‚ressai ensuite … sa vie priv‚e, me permettant de la tutoyer: ``-Es-tu mar‚e? -Non, je n'ai pas encore eu ma lune (de miel). -Tu rigoles! -Non, je ne suis pas marr‚e.'' Mais elle me trouvait un peu impatient: ``-Mod‚rez vos transports: vous n'allez pas en bateau, mais par avion! -C'est que j'aime bien m'envoyer en l'... -Assez! Ou je pars en courant, marin.'' Me voyant trop venir, elle partit. Je lui ai ‚crit une lettre d'amour o— je lui d‚cris toute ma peine: j'y ai mˆme mouill‚ l'encre pour qu'elle ne parte pas au large. Elle me r‚pondit en cinq mots: ``je reste chez ma mŠre''. Dans ce cas, moi aussi, je retourne chez ma mer... --< Erreur sur la personne >-- Pour parler … la premiŠre personne venue, la deuxiŠme personne est id‚ale, tout le monde s'entend l…-dessus. Mais il est souvent difficile de deviner quand il faut vouvoyer ou tutoyer quelqu'un. Cela engendre des quiproquos particuliers... ``-Bonjour, comment allez-vous? -Que je ne vous voie plus me vouvoyer. -Vous voyez, c'est difficile de m'y vouer. -Je vous demande de vous y tuer. -Justement, je me tue … essayer de le faire. -Si tu t'y tues tant, pourquoi de temps en temps tentes-tu de me dire vous? -Rien … faire, quand je vous vois, vous, je vous vouvoie.'' -Essayons autre chose... Me tutoieras-tu, toi, si moi je te tutoie? -Me tueras-tu, toi, si je ne te tutoie? -Oui, tˆtu, si tˆtu tu es. -Vous dites? -J'eus pr‚f‚r‚ que tu te tus, plut“t que tu me voues, ce ``vous''. -Si je m'‚tais tu, dis-tu, tu n'eus point vu de ``vous''. -Oui, je n'en eus point ou‹s.'' Si la plupart des gens se contentent de la deuxiŠme personne, les situations d'extrˆme politesse requiŠrent l'utilisation de la troisiŠme personne mˆme s'il n'y a que deux personnes qui se parlent. Par exemple, un serveur demande … un client: ``Monsieur d‚sirerait-il le menu?'' Alors le client regarde derriŠre lui pour ˆtre s–r que le serveur s'adresse … lui, puis r‚pond: ``Ma personne, puisque je ne vois personne d'autre, d‚sirerait le menu, surtout s'il est fourni et non menu''. Le client, encore tout surpris de l'intervention de la troisiŠme personne dans ses propres paroles, n'en est pas encore au bout de ses surprises. A la table voisine se trouve un roi qui tient vraiment … ce qu'on le respecte. Le serveur, reconnaissant l'insuffisance de la troisiŠme personne (``Le roi, d‚sirerait-il...''), trouve une formule plus soign‚e. Il interpelle le roi en vouvoyant sa troisiŠme personne: ``Votre majest‚ d‚sirerait-elle le menu?'' Devant le froncement des sourcils du roi, le serveur s'empresse de corriger en s'adressant, … la troisiŠme personne, … la troisiŠme personne: ``Sa majest‚ d‚sirerait-elle le menu?'' Plus tard, de retour au client ordinaire, le serveur a du mal … se r‚adapter: ``-Voil… le menu de son monsieur. -Et le mien? -Pardon, voil… le menu de votre monsieur. -Merci, je lui donnerai.'' Une fois dans la cuisine, le serveur tutoie le cuisinier et vouvoie son patron. De retour parmi les clients, il les iloie tandis qu'il se jeoie dans ses pens‚es. De plus en plus inquiet, il voit arriver un nouveau client, d'allure fort respectable. A quelle personne aura-t-il affaire? Il constate, rassur‚, qu'il est anglophone et qu'il pourra lui adresser des ``you'' sans aucun risque. Erreur, car c'‚tait un Dieu. Et la tradition anglo-saxonne veut que l'on s'adresse … Dieu avec le pronom ``thee'' qui n'est rien d'autre que le ``tu'' de l'anglais, avant qu'il ne devienne archa‹que et qu'il soit remplac‚ par ``you''! --< Le tronc pas si commun que ‡a. >-- A quoi sert le tronc commun? (Note: Le tronc commun est la premiŠre ann‚e d'‚tude … l'cole Polytechnique.) A prendre racine dans l'‚tablissement, pour pouvoir ensuite y ˆtre pouss‚ … bout. Ce tronc, c'est l'arbre moteur de l'‚cole. Bien s–r, l'on s'y fait souvent planter. Mˆme si l'on y b–che comme des fous, ‡a nous repousse … bout! C'est qu'il y a continuellement des bouts durs (boutures?). Plus on b–che, plus ‡a s‚ corse, mais il ne faut pas se laisser abattre: on risquerait de se retrouver dans le champ. Que voulez-vous, la tˆte, il faut savoir labourer. Et … force de labourer, on r‚colte de la culture g‚n‚rale. Puisque certains en ont marre tandis que pour d'autres elle leur est chŠre, on pourrait l'appeler ``culture maraŒchŠre''. Il faut malheureusement y potacher sans arrˆt (… ne pas confondre avec ``potager'', ce qui sous entendrait que l'on y v‚gŠte). Il semble, h‚las, qu'il faille oublier un peu la culture physique car on ne peut … la fois ˆtre un champi(gn)on intellectuel et faire des spores. A moins de g‚rer son temps comme un fou... (car quand des fou-gŠres il y a bien s–r des spores). Au tronc commun, on d‚broussaille toute l'ing‚nierie, pour trouver sa branche, sans deviner la jungle qui nous y attend... Et plus loin sur la branche, se trouve une feuille: notre papier. Et encore bien plus loin sur la branche, se trouve ‚ventuellement une ‚norme quantit‚ de feuille: notre m‚moire de doctorat. Pendant qu'il d‚broussaille ce sous-bois, l'‚tudiant typique boit et devient saoul. Plus le temps avance, plus il boit des verres et plus il les boit secs. C'est qu'il vieillit: il y entre sous forme d'un bois vert et en sort sous forme d'un bois sec, d'o— l'expression: ``Salut vieille branche... tu te rappelles du bon vieux temps?'' Toutefois, le tronc commun vise avant tout … apprendre une bonne m‚thode de travail: tout commencer … la derniŠre minute de maniŠre … ˆtre plus productif! Hˆtre capable de faire du boulot … la chˆne sans se dire ``j'en tremble''. (J'espŠre qu'aprŠs cette phrase, vous me-risiez!) AprŠs avoir travers‚ notre tronc commun et termin‚ notre branche sans casser, il nous faudra porter le jonc (Note: Le jonc d'ing‚nieur, bien s–r!) sans plier. --< ``The Day After'' >-- La session ‚tant d‚j… bien entam‚e, et les ‚tudiants aussi, par le principe d'action-r‚action, il est fort possible que vous ayez d‚j… (sur)v‚cu la scŠne suivante: la remise d'un examen mal r‚ussi. Voici ce que cela donnerait si la po‚sie ‚tait de mise dans la vie de tous les jours. Ah! que le cours est coul‚, Mes ‚lŠves n'ont plus le go–t de vivre Se disait, tout bas, un professeur inqui‚t‚ Pour ensuite, … ses ‚tudiants, poursuivre: ``-L'examen, comment l'avez-vous trouv‚? -Sur notre table on nous l'a d‚pos‚!'' R‚pondit avec humour un ‚tudiant Qui avait oubli‚ son sort, un moment. ``-S‚rieusement, comment avez-vous trouv‚ l'intra (Note: Abr‚viation de l'expression: ``examen intra-trimestriel''.) -S‚rieusement, nous l'avons trouv‚ extra! Si l'examen eu ‚t‚ plus court, Il eut chang‚ la face du monde … ce cours. -Cet examen, pour vous, fut d‚terminant Et comme il a ‚t‚ nul, C'est non-invertible maintenant: Vous manquez de bases... en calcul. -Si nous ignorons le calcul diff‚rentiel et int‚gral C'est qu'il nous laisse int‚gralement indiff‚rent. Nous divoguons tel bateau artisanal D‚rivant tout en se d‚sint‚grant. -Effectivement, elle semble ailleurs, votre cervelle, Vous ne vous mordez pas les doigts, bon sang? -Tant que nous n'aurons point re‡u notre partiel (Note: Abr‚viation de l'expression: ``examen partiel''.), Nous ne serons point sur les dents!'' Puis le professeur se fit une raison Un ing‚nieur, comme le veut la coutume N'a pas besoin de connaŒtre tout … fond: La surface lui suffit, le reste est dans les volumes. De cette fable, on tire un proverbe Sur lequel tous s'entendront: ``Pas besoin d'un g‚nie en herbe Pour finir un g‚nie en jonc.'' Oui, je sais que mes vers n'ont pas tous le mˆme nombre de pieds, Je ne sais point, comme Cyrano, me tirer les vers du nez. Aussi, voil… pourquoi je ne fais point d'alexandrins, Me contentant que simples axelandrins. --< Pro-moteur auto-mobilier >-- Deux fanatiques de l'automobile se rencontrent. Ce sont des connaisseurs, des vrais, qui ont tout appris par eux-mˆmes: des auto-didactes. ``-Salut, ‡a gaze''? -Ouais, ‡a roule! Mais ma voiture, elle ne roule plus trop... -Je pensais qu'avec elle, tout baignait dans l'huile? -Oui, c'est justement le problŠme: ‡a coule de partout. €a coule tellement que j'ai peur que mes bielles coulent aussi. Vois-tu, elle bouffe de l'huile, mˆme … plein r‚gime! -O.K. arrˆte de parler de tes fuites. Je pense que tu as besoin d'‚vasion. -Prisons l'‚vasion! On va prendre un pot? -Un pot d'‚chappement? D'accord, t(r)inquons!'' Bient“t, nos deux amis se retrouvŠrent sur une terrasse sans ‚clat, par brise l‚gŠre. ``-Une huit cylindre, S.V.P. (c'est une biŠre). -Avec un V8 pour moi. Depuis ma brosse de l'autre jour, je ne prends plus de chance: je prends du jus de tomate en mˆme temps.'' Puis, le d‚sordre du jour revŒnt … l'ordre du jour: ``-La semaine pass‚e, ma came m'a lƒch‚. -Comment les segments ont pris ‡a? -€a a chauff‚ un peu. J'ai eu du mal … trouver une came pour la remplacer. Les cames ne poussent pas dans les arbres! -Et les arbres … cames, alors? -Un peu de s‚rieux... j'ai appel‚ mon distributeur: ‡a a fait des ‚tincelles. J'ai r‚gl‚ la question en deux temps, quatre mouvements. -A part ‡a, ‡a va? -Non, ma voiture commence … faire … sa tˆte: ma suspension fait son ind‚pendante. Au 4 ao–t, ‡a a commenc‚ et au 7 ao–t, c'est tout: j'ai chang‚ toute la suspension. -Je vois qu'on s'amuse: 11 ao–t! Depuis le temps que ta voiture roule sa bosse (son boss?), elle m‚rite une suspension. -TrŠs dr“le! Tu t'imagines le prix de tout ‡a. Combien de temps cela va-t-il prendre pour amortir le co–t de la suspension? -Une suspension est faite pour amortir les coups … ce que je sache. Enfin... elle a vraiment des problŠmes de conduite ta voiture. -Oui. AprŠs tout, c'est normal: l'odomŠtre arrive … son maximum. -C'est pour ‡a qu'elle sent si mauvais, ta voiture. -Tu as raison, je ne suis d'ailleurs plus capable de la sentir. -Elle est si vieille: elle en a souffl‚, des bougies. -C'est bien beau une voiture de seconde main, mais je n'ai plus assez de mes deux mains pour la r‚parer. -AchŠtes-en une nouvelle. -Mouais... les nouvelles, on ne sait jamais comment ‡a finit, un vrai roman. Et puis, je n'ai jamais investi dans une telle immobilisation … long terme. -Pourtant, tu dois t'y connaŒtre en immobilisation … long terme, depuis le temps que ton automobile est immobile! -Arrˆte de rire: cette voiture, c'est l'essence de ma vie. -Je sais que tu la trouves super, mais il faut te rendre … l'‚vidence, tu ne peux plus continuer avec elle. Elle te fait plus marcher, qu'elle ne te roule. -Tu as raison. Pourtant, je ne l'oublierai jamais: c'est le moteur de ma vie.'' --< Demi-vie de d‚cadence >-- Je vis le jour en pleine nuit. €a commence bien! Lorsqu'on a voulu me donner un nom, on m'a d‚nomm‚. Alors je n'ai plus de nom. A deux ans je marchais encore avec une marchette. On m'a fait croire que je savais marcher, mais on m'avait fait marcher. A trois ans, je n'avais pas encore dit mon premier mot. Mais je n'avais pas encore dit mon dernier mot non plus. Toujours … trois ans, je ne savais pas encore manger tout seul... sauf des vol‚es. Quand j'ai finalement appris … parler et … manger, on m'a dit: ``ne parle pas la bouche pleine!'' On m'a aussi dit de finir mon assiette. Je l'ai lanc‚e par terre: elle ‚tait finie. J'ai souvent cru avoir atteint l'ƒge de raison, mais j'avais tort. A l'‚cole, j'‚tais toujours coll‚. Et encore, je me retenais, parce que j'aurais eu des retenues, en plus. J'ai d– suivre des cours de fran‡ais, langue seconde. J'ai fait mon secondaire professionnel … la maniŠre d'un amateur. J'‚tudiais … moiti‚, et je doublais. C'‚tait un secondaire court mais il a ‚t‚ long quand mˆme. Bref, … l'‚cole, je n'ai rien appris. €a m'apprendra! Arriv‚ sur le march‚ du travail, j'ai couru du travail. Comme je suis paresseux, j'ai plut“t march‚ du travail. Je me suis employ‚ … me trouver un emploi. J'‚tais tellement mauvais que je me suis cong‚di‚. Je me sentais si d‚sarm‚ devant la vie, que je suis entr‚ dans l'arm‚e. Moi qui voulais qu'on m'‚coute, on m'a dit de me mili-taire. J'ai trouv‚ la mi-lisse plut“t mi-rude. Je n'ai jamais eu un faible pour les Forces. Quand il a ‚t‚ question d'aller se battre, je me suis d‚battu. J'ai ‚t‚ tu‚ sur le front... et sur le reste du corps, forc‚ment. Quelle vie! Vous allez me dire que ce n'est pas grave, ``les derniers seront les premiers''. Mais comme j'‚tais le premier … ˆtre v‚ritablement le dernier, Dieu ne savait pas o— me placer. Il m'a alors demand‚ ce que j'avais fait pour mon prochain. Je lui ai r‚pondu que je n'en avais pas, puisque j'‚tais le dernier. Dieu m'a alors annonc‚ que j'avais cr‚‚ un pr‚c‚dant. Et sur ce, il cria: ``au suivant!'' tout en m'envoyant au purgatoire pour lui laisser le temps de penser … ma situation. Je criai alors … Dieu: ``-Vous faites erreur! -Et alors, n'arrive-t-il pas qu'un humain fasse une erreur? -Mais vous ˆtes Dieu! -Ne vous ai-je pas cr‚‚ … mon image? -Je vous croyais plus sage... -Je suis aussi sage que mon image...'' ``€a promet!'', me suis-je dit. Pour me rassurer, Dieu m'annon‡a que je ne resterais que la moiti‚ de l'‚ternit‚ au purgatoire. J'acceptai le compromis. Ce n'est que bien plus tard que je me rendis compte qu'une moiti‚ d'‚ternit‚, c'est encore une ‚ternit‚! Je savais d‚j… que je m'‚tais fait avoir sur toute la ligne (de vie) mais je venais de me rendre compte que je m'‚tais fait avoir sur toute la demi-droite de la demi-‚ternit‚! --< La guerre de ces sessions >-- Tous les ‚tudiants se battent contre cette session en esp‚rant sa cessation. Vont-ils se rendre … la fin sans se rendre avant la fin? Plus les travaux arrivent … ‚ch‚ance, plus les ‚tudiants arrivent … la d‚ch‚ance. Ils ont leurs examens sur la conscience (et c'est l'examen de conscience: ai-j'‚tudi‚?). Les locaux d'informatique et les laboratoires papillonnent d'activit‚ (d'activit‚s sociales surtout). Les salles de cours, elles, chenillent d'inactivit‚. En effet, y ˆtre pr‚sent est une chose du pass‚. Les professeurs usent de leurs derniŠres ‚nergies pour cr‚er de la matiŠre. Les ‚tudiants, qui deviennent radicalement anti-matiŠre, n'en sont que plus annihil‚s. C'est que l'esprit de tous est ailleurs: dehors, par exemple. La temp‚rature se r‚chauffe et le temp‚rament aussi. Le jour s'allonge et les nuits se raccourcissent, bien que ‡a ne soit pas forc‚ment reli‚... On pense de plus en plus … se faire dorer, bronzer (et argenter?). On a hƒte au grillage saisonnier sur les chaises longues et au grillage assaisonn‚ sur le barbecue. Le d‚gel nous rappelle que les vacances approchent, aprŠs nous avoir r‚v‚l‚, en une fois, toutes les odeurs qu'avait paisiblement emmagasin‚es la neige au cours de l'hiver. Le d‚gel d‚couvre aussi, ironiquement, des graffiti sur le sol: ``non au d‚gel''. Les d‚tritus, s‚diment‚s par les pr‚cipitations de flocons, se manifestent pr‚cipitamment et jonchent le sol de leur pr‚sence, plut“t que de le laisser paisiblement joncher tout seul comme un grand. Les plus grands payeurs de taxes peuvent maintenant admirer l'ampleur du magot qu'ils ont perdu en m‚gots, pendant tout cet hiver. Les derniers restes de rhume en prennent pour leur rhume tandis que la grippe ne s'agrippe plus. Il ne reste que quelques sinusites inusit‚es et quelques bronchites qui n'ont pas encore bronch‚. N'allez cependant pas croire qu'avec l'‚t‚, les gastro-ent‚rites seront enterr‚es. C'est tout cela qui d‚tourne l'attention, si on n'y fait pas attention. Comment garder notre concentration dans nos cours de concentration? En hiver, cela avait bien ‚t‚. Mais en ‚t‚, on a ces problŠmes divers. Il fallait en plus que le moment o— l'on a le plus de travail tombe … l'arriv‚e des beaux jours. A force de tout remettre … plus tard, vient le jour o— ``plus tard'', c'est aujourd'hui. Le futur sera toujours un dur moment … passer. (Le pass‚ aussi, mais il est d‚j… pass‚.) Heureusement que les terrasses ne sont pas encore ouvertes, sinon ‡a nous aurait terrass‚... --< Couple peu coordonn‚ >-- Un jour, un math‚maticien rencontra une belle inconnue. Elle et lui semblaient avoir tant de choses en commun: il tenta donc de se mettre en ‚vidence. Il lui demanda imm‚diatement ses coordonn‚es, histoire de pouvoir la rejoindre ailleurs qu'en ce point de rencontre. Ils discutŠrent ensuite de leurs origines et des choses sur lesquelles leurs int‚rˆts ‚taient ax‚s. Il chercha bient“t … ˆtre seul avec elle: … isoler sa belle inconnue, en somme. DŠs qu'ils furent seuls, ensemble, les accolades ne tardŠrent pas. Leur union ne commen‡a vraiment qu'… ce moment et non lors de leur premiŠre intersection. C'est qu'elle r‚p‚tait sans cesse: ``mon z'h‚ros''. Il n'y avait qu'une seule solution... puisqu'il lemme, lui aussi. Leurs courbes se touchŠrent. ``Monh“mme...'', souffla-t-elle. ``H‚lŠne (ln, en abr‚g‚)...'', r‚pondit-t-il. A partir de ce point, ils formŠrent un couple: non pas x et y, math‚matiquement parlant, mais XX et XY, g‚n‚tiquement parlant. Ils se crurent dor‚navant indivisible: c'‚tait un amour premier. AprŠs tout, c'est bien connu, l'amour est irrationnel, ce qui ne simplifie pas les choses. Comme dans tout bon conte, ils v‚curent si heureux qu'ils en eurent bient“t des enfants. Beaucoup d'enfants. Et cela leur co–tait de plus en plus cher: … se multiplier ainsi, l'addition augmentait et ils ne pouvaient s'y soustraire. Ils ‚taient divis‚s sur le sujet, mais aprŠs avoir pass‚ les quatre op‚rations, il songŠrent … l'Op‚ration. Cependant, qui allait la subir cette Op‚ration, elle ou lui? Selon lui, l'Op‚ration n'‚tait pas commutative et c'‚tait celle qui poss‚dait la matrice qui devait la subir. Elle lui r‚pondit qu'elle ‚tait d‚‡ue car en tant que math‚maticien, il aurait d– ˆtre pour l'‚galit‚. Ils se rendirent alors compte que, dans bien des domaines, ils ne partageaient vraiment pas les mˆmes valeurs propres, et la situation se d‚g‚n‚rait: ils voulaient maintenant devenir (lin‚airement) ind‚pendants. Cela les toucha droit au ker et entraŒna bien des p‚pins, voir mˆme des noyaux. Il n'y avait plus de solution car ils formaient maintenant un systŠme inconsistant. Ils se s‚parŠrent donc, augmentant ainsi leur degr‚ de libert‚... pour peut-ˆtre rencontrer d'autres courbes. Toutefois leurs enfants auront … s'habituer … changer constamment de systŠme de coordonn‚es, passant d'un couple … l'autre … tout moment, ce qui les d‚saxera certainement. C'‚tait un amour premier: personne ne pouvait les diviser... sauf eux-mˆmes. L'amour est irrationnel: il ne fait pas de quartier... mˆme avec notre moiti‚. Il aurait d–, dŠs le d‚but, faire un ``x'' sur cette inconnue. --< Discours sur les m‚thodes >-- Les ‚tudiants ont d‚velopp‚ tout un arsenal de m‚thodes les aidant … r‚pondre aux questions d'examen. En voici quelques unes... M‚thode Monte-Carlo (i.e. statistique): Le hasard fait parfois bien les choses... surtout dans un examen … choix de r‚ponses. M‚thode des perturbations: Pour les questions du genre ``d‚montrez que...'' il arrive souvent que l'on n'obtienne pas exactement le r‚sultat d‚sir‚. La m‚thode de perturbations consiste … changer quelques signes ici et l…, imperceptiblement, de maniŠre … obtenir la bonne r‚ponse. M‚thode esth‚tique: Une r‚ponse trŠs compliqu‚e (i.e. moins belle) a plus de chance d'ˆtre fausse qu'une simple et belle r‚ponse. Il s'agit donc de r‚essayer de r‚soudre le problŠme jusqu'… ce que la solution soit belle. M‚thode scientifique (formulation d'hypothŠses): Dans une suite de questions qui d‚pendent chacune de la r‚ponse pr‚c‚dente, il est parfois frustrant de ne pas savoir r‚pondre … la premiŠre question. Il est alors tentant d'essayer des r‚ponses du style: ``si j'avais r‚pondu … la question 1, j'aurais pris ce r‚sultat, multipli‚ par la r‚ponse 2, si je l'avais trouv‚e...'' M‚thode des d‚veloppements en s‚rie: Quand ils ne savent pas quoi dire, certains ‚tudiants ont tendance … ‚crire de longues explications. Ils font donc des d‚veloppements... en s‚rie. M‚thode de l'abstinence: Oppos‚e de la pr‚c‚dente. Ayant trop peur de dire des bˆtises, certains ‚tudiants ‚vitent de r‚pondre quoi que ce soit … certaines questions. Cela ‚pargne du travail au professeur qui est alors plus enclin … leur donner des points lorsqu'ils ‚crivent quelque chose. M‚thode ph‚nom‚nologique: Cette m‚thode consiste … multiplier, diviser ou exposer toutes les valeurs de la donn‚e du problŠme de maniŠre … obtenir un nombre qui a les mˆmes unit‚s que la r‚ponse d‚sir‚e. M‚thode du calcul des r‚sidus: Quand quelqu'un connaŒt trŠs peu la matiŠre, il lui est peut-ˆtre pr‚f‚rable de scruter … fond l'examen pour voir s'il n'y aurait pas un petit num‚ro facile qui lui donnerait quelques points. M‚thode num‚rique: Compl‚ter le plus de num‚ros possibles, mais sans r‚fl‚chir. M‚thode de la moindre action: Il s'agit d'utiliser abusivement des expressions comme: ``par inspection, on trouve'', ``par sym‚trie, il vient'' ou ``on peut facilement montrer que'' et les faire suivre d'une ‚quation gigantesque. Bien que peu utilis‚e par les ‚tudiants, cette m‚thode figure couramment dans tout bon solutionnaire d'examen qui se respecte. --< Un amour physique >-- Y a-t-il place, en sciences, … la folie et … la romance? Oui, car aprŠs tout, des liaisons covalentes aux liaisons covalentines, il n'y a peut-ˆtre pas plus de diff‚rences qu'entre un party et une partycule en agitation thermique... Un jour (ou plut“t … une microseconde en particulier), un ‚lectron c‚libataire qui orbitait encore tout prŠs du noyau familial, s'ennuyait. Tandis qu'il ‚tait avachi (cela lui causera plus tard un problŠme spinal), prŠs de sa moment (magn‚tique), il d‚cida d'acqu‚rir son ‚nergie de lib‚ration. Mais la permittivit‚ magn‚tique de sa moment ‚tait exactement non nulle, et elle s'‚cria: ``Que je ne te vois pas courant avec je ne sais quelle bande de con... duction''. La r‚action de sa moment lui fit faire un saut en s'‚criant: ``Gap!''. Pourtant, fermement d‚cid‚ … en finir avec sa configuration actuelle, il conclut: ``lepton tout ‡a de cot‚, et muons.'' Toutefois, priv‚ de son principal centre d'attraction, il s'ennuyait toujours autant. Il tenta alors de d‚couvrir comment les autres trouvaient le bonheur. Il remarqua que certains se contentaient d'ˆtre dans l'entourage de m‚taux lourds (heavy metal, pour les puristes). D'autres, moins r‚actifs, trouvaient la joie … l'‚coute de quantiques et de m‚canique classique. Il en vit mˆme qui s'affairaient … planifier leur emploi du temps sur un tableau p‚riodique. Cependant, une activit‚ l'int‚ressa surtout: les liaisons entre particules poss‚dant certaines affinit‚s magn‚tiques (aussi appel‚es a(i)mants). Comment allait-il faire comme eux? Il venait … peine de quitter le noyau familial et ne s'‚tait encore content‚ que d'actes timides (actinides?) envers les autres: quelques photons ros‚s qui n'atteignaient mˆme pas les ‚lectrons de coeur. Mais l'espoir ‚tait permis: il avait sa demi-vie devant lui. Tout … coup, tout prŠs d'un gros b‚ta, il aper‡u une ‚lectron(e) de spin oppos‚. Elle (l'‚lectron(e) en question) se mirait dans l'onde (plus pr‚cis‚ment, dans sa fonction d'onde). Il tenta de la s‚duire en lui chantant la pomme (de Newton). H‚las, il ne faisait visiblement pas le poids dans le domaine du chant gravitationnel, surtout … c“t‚ du gros b‚ta. Il reprŒt de plus belles avec un chant ‚lectrique, mais l'‚lectron(e) eu une vision trŠs n‚gative de la chose. Les photons ros‚s, eux, ne l'excitŠrent mˆme pas. Heureusement, … ce moment, le b‚ta aux maniŠres peu cathodiques remarqua des cibles plus int‚ressantes dans une mince feuille d'or situ‚ non loin de l…. Notre ‚lectron avait maintenant la voie libre et ‚tudia sa positron (pardon, sa position): qu'avait-il qui pourrait la s‚duire? Il se rappela qu'il venait d'avoir son permis de conduire... et profita d'un moment de sang froid pour devenir supra-conducteur! L'effet fut imm‚diat: elle fut s‚duite et nos deux ‚lectrons se couplŠrent en paire (ampŠres?). Et, miraculeusement, leurs vies devŒnt sublime et vaporeuse. (Mais avant de se vaporiser, ils fondirent l'un sur l'autre.) Ils v‚curent donc heureux et eurent une famille nombreuse d'‚l‚ments. --< Impayable Vendeur >-- La loi de l'offre et de la demande comporte comme corollaire que tout client doit n‚cessairement se faire offrir plein de choses qu'il ne demande pas. C'est ainsi que lorsqu'un client entre dans un magasin et s'y fait instantan‚ment apostropher par un vendeur. C'est ce qui arriva ce jour l…. ``-Bonjour, puis-je vous aider … d‚penser? -J'y pensais justement. -Eh bien, laissez-moi penser … votre place et d‚-pensez … votre aise.'' Le vendeur fit alors ‚talage de ses qualit‚s de vendeur … l'‚talage. ``-Voici le meilleur modŠle que vous puissiez trouver. -Vous ˆtes si bon vendeur que vous semblez mˆme ˆtre vendu … cette marque. -C'est pour ‡a qu'on m'a engag‚. -Vraiment? -J'ai ‚t‚ trŠs convaincant lors de l'entrevue: voyez-vous, je sais me vendre. -Et on vous a achet‚ pour ˆtre vendu … une marque, c'est ‡a? -Oui, il n'y a pas de honte … ‡a. Et depuis, je me vante de mes ventes. -Allez, restez modeste devant le Roi (qu'est le client). -Oui, monsieur, je m'emploie … vous servir. -Vous, vous employez? Vous ˆtes donc votre propre patron. Il n'y a rien de surprenant au fait que vous ayez ‚t‚ engag‚! -C'‚tait une maniŠre de parler: je m'engage … m'exprimez clairement dor‚navant. -Vous vous engagez … parler maintenant: d‚cid‚ment, vous aimez vous payer de vous mˆme.'' Le vendeur devenait visiblement contrari‚ et de moins en moins s–r de lui: c'est ce que l'acheteur recherchait. Il ‚viterait ainsi que son ˆtre se fasse avoir en ne perdant qu'une petite partie de son avoir et de son bien-ˆtre. Le client, en guise de juste retour des choses, apostropha alors le vendeur: ``-Bon, s‚rieusement, nous en ‚tions … consid‚rer ce modŠle... -Oui, il est absolument unique. -Pourtant, il me semble que j'aie vu d'autres modŠles fort semblables. -Mais ce qui le rend unique, c'est son prix. -Curieux, il me semble justement ‚lev‚. -Un modŠle avec un prix aussi ‚lev‚ c'est extrˆmement rare. Et puisque tout ce qui est rare est cher, ce modŠle ne peut faire autrement que de co–ter cher. -Vous me faites marcher. -Que voulez-vous, il faut faire marcher l'‚conomie. Et puisque nous faisons tous partie de l'‚conomie, il faut bien vous faire marcher un peu aussi. -A ce prix l…, j'espŠre que ‡a fait marcher l'‚conomie d'ici. Est-ce un modŠle import‚? -Non, C'est fabriqu‚ ici, c'est tout ce qui importe. -€a s'importe ou c'est fabriqu‚ ici, d‚cidez-vous! -TrŠs dr“le... c'est … vous de d‚cider. -Je trouve, mon cher, que c'est trop cher.'' Le vendeur tenta de tenter l'acheteur par l'ill‚galit‚: ``-Je vous proposerais bien un paiement en dessous de la table. Dommage que nous soyons limit‚s... -Je croyais que vous ‚tiez enregistr‚s... mais si c'‚tait le cas, vous n'oseriez pas dire de telles choses. -Commandite vous? -Si vous ‚tiez en soci‚t‚, vous n'auriez pas dit de telles choses. -En soci‚t‚? Vous voulez dire en compagnie d'autres gens. -Oui. Payer en dessous de la table est une dr“le de maniŠre de faire marcher l'‚conomie.'' Devant le mutisme du vendeur et surtout devant le prix rutilant du produit en vente, le client quitta le lieu d'o— il ‚tait roi, en d‚clarant: ``Je dois vous dire qu'en tant que vendeur vendu, vous ne faites rien pour vous racheter.'' --< Rendez-vous chez l'optom‚triste, ou... Blind date >-- Je ne pus m'empˆcher d'examiner attentivement l'optom‚triste qui m'examina. Je l'avoue, j'avais un oeil sur elle, et elle, les yeux sur les miens. ``€a regarde mal!, m'annon‡a-t-elle, vous louchez.'' Mais elle ne se doutait pas encore que c'‚tait elle qui me faisait loucher. ``Regardez-moi droit dans les yeux'', poursuivit-elle tandis que moi, je ne demandais pas mieux. Je la regardai pendant si longtemps que j'en fini par m'en rincer l'oeil. Voyant mes yeux devenir humides, elle me demanda: ``vous avez quelque chose dans l'oeil?'' Elle n'aurait pas du dire ``quelque chose'' mais plut“t ``quelqu'un''. Je commen‡ai bient“t … m'int‚resser … sa vie priv‚e. Toutefois, mes questions se firent trop directes, et sa r‚action fut vive: ``-Mˆlez-vous de ce qui vous regarde. -Justement, ‡a fait une demi-heure que vous me regardez. -Alors mˆlez-vous plut“t de vos oignons.'' Devant mes yeux qui s'emplissaient de larmes, elle excusa sa rudesse. Je la rassurai: ``-Non ce n'est pas grave, mes oignons me font toujours cet effet. -Vous avez vraiment de dr“les de r‚actions, vous devriez aller vous faire examiner par un m‚decin. -C'est ‡a, envoyez-moi donc me faire voir ailleurs!'' Voyant mon cristallin devenir amorphe sous l'effet de la d‚ception, elle comprit toute la sensibilit‚ que mon caractŠre avait peine … dissimuler par de vains artifices indignent de mes v‚ritables valeurs les plus humaines avec lesquelles... Enfin bref, vous voyez le genre. Une fois l'examen termin‚, vint le temps de choisir une monture, et surtout, de payer le tout. Malheureusement, une facture … la main, cette optom‚triste perdait beaucoup de son charme. ``-Les lunettes, ‡a co–te les yeux de la tˆte!, lui dis-je. -La vue, ‡a n'a pas de prix: il ne faut pas regarder la d‚pense.'' Tiraill‚ entre mon ‚quilibre sentimental et financier, j'avais tant de mal … me concentrer, que je n'arrivais pas … retrouver le mot ``optom‚triste''. -Mais, madame la voyante... -Je ne suis pas voyante! -Madame la... voyeuse... -Je ne suis pas voyeuse! -Mais madame la visuelle... -Je ne suis pas visuelle. -Madame l'auditive alors... ce prix en est exorbitant! -Gardez vos yeux dans vos orbites si vous voulez profiter de vos lunettes. -Mais regardez moi le prix de cette monture: … ce prix l…, ‡a doit ˆtre une monture pur sang! -Si vous voulez ‚conomiser, nous avons un sp‚cial 2 pour 1 sur les verres de contacts. -J'espŠre qu'on en donne deux verres de contacts! -Deux paires, bien s–r. -Ah, dans ce cas, je vais y regarder … deux fois. -A ce prix, ‡a vaut le coup d'oeil, ou plut“t, le co–t d'oeil. -Non, aprŠs tout, n'essayez pas de m'en mettre plein la vue: je pr‚fŠre garder mes distances et prendre des lunettes. -Soit, faites comme vous voulez.'' Je r‚glai alors la facture, un peu m‚content. Je devais alors certainement lui laisser une mauvaise impression. Il ‚tait temps de montrer … nouveau mon int‚rˆt pour elle, au risque de me faire pointer du doigt ou de me mettre le doigt dans l'oeil, ce qui, devant une optom‚triste, revient … peu prŠs au mˆme. ``Vous ˆtes une optom‚triste. Voulez-vous devenir une optom‚heureuse?'' Fort encourag‚ par le hochement de tˆte et le rire de sa bouche, je poursuivis avec les questions d'usage: ``-Vous habitez chez vos parents? -Oui et non: j'ai un appartement mais je reviens souvent voir mes parents. J'ai un double foyer! -Vous voulez qu'on se revoie? -Si vous voulez, on peut aller aux vues ensemble. Quel film voulez-vous voir? -Il faudrait regarder dans le ``Voir'' (Note: Le journal...). -Vu!'' Enfin, grƒce … cette nouvelle paire de lunettes, je me suis fait une nouvelle connaissance. Ce sont, en somme, des lunettes d'approche. Les verres de ``contact'', ce sera pour plus tard... --< Remerciements >-- Je tiens … remercier... les membres ‚ternels du ``Polyscope'', pour avoir continu‚ … me publier en page deux, malgr‚ mon haut taux d'absent‚ismes aux soir‚es de mise en page(!): Martin David, Nicolas Duchastel de Mont-Rouge, Mathieu Perreault, Alain Labelle, Olivier Touchette, Olivier Sommelet, Miguel LabrŠque, Nathalie Aub‚, MichŠle Laframboise... (et j'en oublie probablement); les membres quasi-‚ternels du ``Polyscope'', pour la mˆme raison, mais qui sont en nombre si impressionnant qu'il me serait difficile de les nommer tous; tous ceux qui ont relu mes textes, … chaque semaine, en quˆte de fautes: Marie-Jos‚e Brabant, Marie-Claire Deschˆnes, Nicolas Turgeon, Annie Villandr‚; ceux qui ont relu tous mes textes afin d'y corriger les derniŠres fautes, en vue produire ce livre: Emmanuelle Goulet, Chantal Marois; tous ceux qui m'ont averti lorsqu'un de mes textes ‚tait mauvais; et bien s–r, tout ceux qui ont eu le courage de lire mes articles … chaque semaine.