Doubles Sens Uniques

par Axel van de Walle

Avant-propos

Comment un individu normalement constitué en arrive à écrire des choses comme celles que vous allez lire? Un petit historique s'impose.

Depuis longtemps, j'ai developpé la manie de glisser des jeux de mots lors des conversations. Les gens de mon entourage ne pouvant plus me supporter, je me suis mis à les écrire. Lorsque je suis entré à l'École Polytechnique de Montréal, j'ai eu l'occasion d'écrire une chronique hebdomadaire dans le journal étudiant, le ``Polyscope''. Ce sont ces textes qui se retrouvent dans le présent recueil. Ils ont bien sûr été légèrement modifiés, pour les rendre plus compréhensibles pour quelqu'un qui n'a pas étudié à l'École Polytechnique.

Mais après avoir lu ce livre, peut-être me direz-vous que cette petite histoire n'explique pas tout...

En passant, je tiens à vous féliciter, chez lecteur, car vous êtes l'un des rares qui ait l'habitude de lire les avant-propos!

La voyance, revue et corrigée

Un homme entre chez une voyante. ``Asseyez-vous ici et donnez-moi votre main.'', lui dit-elle. L'homme lui tend la main. Elle poursuit:

``-Je vois que vous allez bientôt vous marier.

-C'est normal, vous venez de me demander ma main...

-Je ne veux pas vous marier ni même avoir une aventure avec vous!

-Je crois, diseuse, que ce ne serait pas une bonne aventure.

-Enfin bref, je continue de croire que vous vous marierez bientôt.

-Et... comment se passera la première nuit?

-Écoutez, je suis une voyante, pas une voyeuse.

-Dites-moi quand même comment ce sera qualitativement, sans entrer dans les détails.

-Je sais lire les lignes de la main, mais pas entre les lignes.

-Vous ne voyez pas clair pour une clairvoyante! Vous êtes clairement non-voyante.

-C'est une façon de voir les choses... Revenons à votre futur, voulez-vous?

-Mes parents m'ont toujours dit que je n'avais pas de futur.

-Peut-être n'en aviez-vous pas, à l'époque.

-Le futur d'hier ne serait pas le même que celui d'aujourd'hui?

-Le futur d'hier est beaucoup plus facile à prévoir aujourd'hui que le futur d'aujourd'hui.

-Que voulez-vous, on n'a plus le futur qu'on avait.

-Je vais quand même essayer de vous prédire quelque chose.

-Je ne vous le fait pas prédire...

-Voici ma prédiction: vous vivez des moments difficiles mais les choses vont s'arranger.

-Désolé, c'est faux.

-Qu'est-ce que vous en savez? Ayez confiance en vous même.

-J'ai confiance, mais désolé, je ne vis pas des moments difficiles.

-Alors, pourquoi venez-vous me voir? Vous n'êtes pas normal.

-Et alors, vous êtes bien paranormale!

-Ce n'est pas ce que je voulais dire... Les gens viennent habituellement me voir pour se faire remonter le moral. Il doit bien y avoir quelque chose qui ne va pas. Par exemple, ne souffririez-vous pas un peu d'embonpoint?

-Vous avez un bon point, cependant, je vous demande de regarder mes lignes, pas de surveiller ma ligne.

-Je regarde les mains mais je soigne tout le corps.

-Et dire que je paye pour entendre ça! Si au moins vous me rassuriez, en m'assurant mon futur.

-En me payant, vous n'assurez peut-être pas votre futur, mais vous assurez le mien!''

Et sur ce, l'homme quitte la place en suggérant à la voyante... d'aller se faire voir.

Assiégé de questions

La séantologie, comme vous le savez tous, est l'étude la position assise. J'ai devant moi l'un des séantologues le plus renommé, le professeur François d'Assise.

Professeur, expliquez-nous ce que vous êtes en train de faire, assis dans ce fauteuil.

-J'effectue un banc d'essai. Je suis en train, devant vous, de tester mon arrière train.

-Et qu'en concluez-vous?

-Rien encore, car il faut que je reste assis au moins une heure pour avoir le temps de mesurer tous les paramètres intéressants.

-C'est long!

-Pourquoi pensez-vous que ma réputation est si bien assise?

-Mais sérieusement, que faites vous avec tous ces paramètres relatifs aux chaises?

-Je fais des tables.

-Et avec ces tables...

-Je fais des dossiers que j'étudie assidûment et dûment assis. C'est ainsi que progressent mes recherches sur les chaises...

-Elles avancent?

-Comme sur des roulettes!

-Ces recherches vous ont permis de beaucoup publier, n'est-ce pas.

-Oui, d'ailleurs mon tout nouveau livre, ``L'être et le séant'' vient de paraître.

-Cela semble fort philosophique...

-Mes toutes premières recherches ne se basaient que sur l'anatomie, mais maintenant, j'ai atteint un stade bien postérieur.

-(Quel vantard!) D'où votre renommée...

-(Quel lèche-bottes!) Disons que ça n'a pas nui à l'obtention de ma chair(e) à l'université.

-Vous faites également des conférences, n'est-ce pas?

-Oui, bien que je préfère appeler cela des séances d'informations...

-... qui sont fort populaire. J'ai entendu que des gens devaient parfois y assister debout.

-C'est faux! J'ai toujours veillé à ce que mon assistance soit, comme son nom l'indique, assise.

-Excusez-moi, je ne voulais pas que vous vous leviez... le ton. Revenons à votre carrière, voulez-vous. Vous êtes un homme fort occupé.

-Effectivement, je siège à beaucoup de comités.

-Vos enfants ne vous trouvent pas trop absent?

-Tant qu'il sont collés sur les bancs d'écoles, il n'y a aucun problème...

-... sauf si les banc décollent.

-Vous êtes vraiment un fauteuil de trouble.

-Je blagais. Toutefois, ne craignez-vous pas qu'à force de rester assis, vos enfants ne soient pas bien élevés?

-Il suffit de les asseoir suffisamment haut. Dans notre société, il faut savoir occuper une place, et de préférence, assise. En les inscrivant aux grades supérieurs, ils seront assis dans les gradins supérieurs de la société.

-Les chaises meublent vraiment toute votre vie!

-Disons qu'elles me donnent une raison de plus de me lever... de mon lit à chaque matin.

-Comptez-vous rester assis encore longtemps avant de prendre votre retraite.

-Je n'attends que cela, la retraite: pouvoir enfin s'asseoir en paix!

-Qu'attendez vous pour la prendre?

-La relève!

Citations de situation

Un jour où je ne pensais à rien, les pensées suivantes me sont venues à l'idée.

Un cours tend toujours vers sa fin, mais à la manière d'une courbe vers son asymptote.

Une explication dépasse le cadre du cours lorsqu'elle dépasse le cadre du tableau.

Le professeur enseigne et l'étudiant en saigne.

Qui ne dit mot consent... mais quand on a mauvaise haleine, c'est quand on dit un mot qu'on sent.

Pourquoi y a-t-il un ``h'' aspiré au mot haleine, ça ne pue pas assez comme ça?

À bas cette société de pousse-boutons (signé: un adolescent faisant de l'acné).

L'hygiène est le propre de l'homme.

S'il est possible de salir ma réputation, il est cependant impossible de salir mon nom: c'est un nom propre.

Si l'économie ne tourne pas rond, c'est qu'on est en période de précession.

Des amoureux se parlent: ``On s'enlace toujours et on ne s'en lasse jamais.''

Depuis que j'ai attrapé une mono, je dors sur mes deux oreilles. On devrait appeler ça une stéréo.

Labeur: travail de celui qui écrit un rapport de lab.

Rhum ne s'est pas fait en un jour: il a dû fermenter.

J'ai un faible pour le fort (signé: un alcoolique).

Pensée environnementale: ``Tous les égouts sont dans la nature.''

Les lois de la physique se distinguent des lois du droit par le fait qu'en physique, les hommes essaient de suivre la nature en changeant les lois plutôt que d'essayer de changer leur nature en suivant les lois.

Le sens de l'humour est un sens unique: celui des double-sens.

Un humoriste doit plier en quatre pour que les gens se plient en deux.

Inutile de dire que j'ai, depuis lors, abandonné l'idée de ne penser à rien car quand je ne pense à rien, je n'y pense plus et j'oublie que je ne voulais pas penser. Vous y penserez...

Administration de somnifères

Etant donné que la plupart des scientifiques deviennent tôt ou tard des administrateurs, une analyse scientifique de cet idéal abstrait que constitue l'Administration leur serait utile.

L'administration (dont je supprime dorénavant la majuscule, histoire de quitter le domaine de la philosophie (tout en m'évitant de devoir appuyer sur ``shift'' à tout moment)). L'administration donc, (car je n'avais pas fini la phrase précédente, histoire de vous laisser respirer), a pour but effectif l'inefficacité.

À sa naissance, une administration a besoin d'éléments extérieurs lui donnant quelque chose à administrer. Ces éléments, appelés intrants ou extrants (pour faire plus savant, bien que les français préfèrent les termes input et output) inculquent à l'administration naissante sa raison de vivre. Une administration devient mature quand elle peut se passer de ce parrainage et occuper tout son temps à s'administrer elle-même. Une administration progresse ensuite vers la sénilité lorsqu'elle ne parvient même plus à s'administrer elle-même. À partir de ce moment, la gravité de la situation prend le dessus et, tel un trou noir, l'administration se replie de plus en plus sur elle-même, ne laissant même plus s'échapper une bribe d'idée lumineuse.

Nous avons considéré l'administration comme un système macroscopique, mais nous pouvons arriver aux mêmes conclusions en analysant la situation à un niveau microscopique. Une administration est jeune si ses gestionnaires gèrent; et mature, si les dits gestionnaires digèrent. Ils digèrent les fonds de l'assiette fiscale des contribuables, par exemple. Notons que l'apparition d'un dipôle patronat-syndicat accélère grandement la progression vers l'inefficacité (lire ``maturité'').

Cependant, comment expliquer l'auto-suffisance totale de l'administration à sa maturité? Par un principe fondamental du système: l'utilisation du formulaire. Ce procédé permet de ralentir la communication interne des informations, et ce, grâce à la propriété qu'ont les formulaires de se reproduire par clonage grâce à la magie du papier carbone et de la photocopieuse. Ces formulaires donnent de plus le loisir aux gestionnaires de haut niveau (ceux qui gèrent la gestion) de s'adonner à la création artistique: l'apposition répétitive d'une signature.

Depuis ces dernières années, un facteur technologique est venu aussi accélérer la croissance des administrations: l'ordinateur, grâce à sa capacité phénoménale de générer du papier. Une autre utilisation pratique de l'ordinateur est l'impression de lettres simili-personnalisées dont le langage semble toujours si touchant: ``Nous sommes dans l'immense regret, M. ou Mme ..., de nous voir dans l'obligation de vous faire savoir, par l'intermédiaire de ce communiqué, l'impossibilité, malgré tous nos efforts, de répondre à votre légitime demande.''

Mais c'est d'un point de vue physique que l'administration se montre la plus fascinante. Une administration est un système fermé: tout effort produit par un membre de l'administration est une force interne au système et ne peut donc pas effectuer de travail visible de l'extérieur du système. Un membre d'une administration a l'impression de forcer, sans toutefois travailler: cela ne dérive pas de son manque de potentiel, mais de l'inertie de la masse de gens non ponctuels. D'ailleurs, si vous avez un jour eu affaire à une administration, vous vous êtes probablement rendu compte qu'après avoir parcouru de nombreux bureaux, pour revenir ensuite à votre point de départ, vous n'aviez effectué aucun travail (sur un parcours fermé, le travail effectué est nul!).

Pourquoi une administration reste-elle si endormie sur son mal? Tous les médecins vous le diront: il est si facile d'administrer un somnifère plutôt qu'un médicament...

Le Complexe d'Adipe

Tout a commencé quand je n'étais encore que très jeune. Tous les gens de mon entourage avaient un problème de dyslexie en disant mon nom. Au lieu de m'appeler ``petit gars'', on m'appelait ``petit gras''. Car j'étais et suis toujours, gros.

Dès lors, je n'ai cessé de me faire traiter de tous les noms par les plus maigres que moi, ces ingrats. Plus j'engraisse physiquement, plus on m'agresse verbalement. Au primaire, imaginez, j'en ai tellement soupé! Et à force d'en souper on en développe un caractère gras. Laissez-moi vous dire que ce n'est pas de tout repas (pardon, repos).

Je n'aime pas qu'on me fasse marcher (et encore moins courir). Comment pensez-vous que je puisse faire du sport en public? Dès que je me lève, on me prend pour un stand-up comic. Je croyais passer inaperçu en fréquentant les piscines. Une fois mon corps immergé, mon estime personnelle reçoit une poussée vers le bas d'autant plus forte que mon problème de poids est lourd. J'avais oublié que quand arrive l'obèse l'eau monte! Je fus submergé s'insultes sèches de gens mouillés.

Mais maintenant les choses ont changé. J'ai rencontré ma dulcinée, que je trouve si gracieuse que je dirais qu'elle est la grasse même. Et tant que la grasse même m'aime, je suis gras dur! Elle et moi, obèses tous les deux, nous jouissons enfin de la vie.

Pourquoi avais-je à m'en faire pour ma graisse, à m'aigrir à essayer de maigrir. Maintenant, j'ai accepté ma condition. Quand on me dit: ``comment ça va?'', je réponds: ``tout baigne dans l'huile''. Quand ça va mal, je dis plutôt: ``je suis de mauvais poids aujourd'hui''.

Un petit problème se présenta quand arriva le temps de se trouver un emploi. Essayer de se trouver une place dans la société, ce n'est pas facile. On en prend tellement! Ce n'est pas une mince affaire.

Je devais me mettre au régime. Au régime à plein régime: j'avais besoin d'un régime permanent. Essayer de perdre du poids en alternant régime et absence de régime est une solution purement imaginaire. Je dois être réel et constant sans être trop négatif pour converger vers mon poids normal en m'exposant, avec le temps, au moins de risques possibles.

Mon régime restait malgré tout assez drastique: j'en venais même à jeûner au déjeuné. Je me suis mis à l'exercice physique de sorte que je consume tout ce que je consomme. Rien à faire: la conservation de la masse semble être une loi irrémédiable de mon physique. Puis, mon complexe d'antan est revenu me hanter. Accepter mon tour de taille, c'est un tour de taille.

Les psychologues se sont inspirés d'un mythe, qui nous vient de Grèce (et non de graisse), pour décrire ma situation: c'est le complexe d'adipe.

Salades guère nourrissantes

L'instinct de violence semble intimement lié à l'instinct de se nourrir. Il suffit d'aller nous joindre à une conversation d'un groupe de militaires pour s'en convaincre.

Un gars, appuyé sur le comptoir du bar, amorça la discussion:

``-Un type qui vous envoie vous faire charcuter, c'est un sale-ami.

-Ouais, je préfère les gens bons.'', dit un autre, dont le coude moulait timidement le rembourrage succinct du dossier du tabouret faisant face au comptoir du bar ci-haut mentionné.

``-Le gens bons ne vous envoient pas une balle au nez'', poursuivit un autre type, dont la localisation spatiale importait peu à l'histoire.

``-Parce qu'un porc, on sait pas ce que ça veau.'', conclut le plus timide du groupe.

``-Sans parler des poulets...'', épilogua le plus bavard. (Note de l'auteur: ça devient difficile de trouver des synonymes au verbe ``dire''.)

La conversation se poursuivait, tandis que le narrateur en avait marre de glisser son mot auquel personne ne porte attention, de toute façon:

``-Pourtant qu'est-ce qu'ils ne nous font pas avaler pour nous motiver à aller au front: `Vous allez n'en faire qu'une bouchée. Il vont manger une raclée. Il vont y goûter.'

-Puis, ils ajoutent, en riant: `ça va être du gâteau!' Mais je ne crois pas que ceux qui pâtissent rient.

-Ensuite, ils oublient que de l'autre côté, ils leur ont dit la même chose.

-Ouais, eux aussi maïs, à en devenir d'emblée dingue.

-On risque de se faire planter pour ensuite récolter... une raclée.

-Tout ça parce qu'on ne sème pas.

-De toute façon, en temps de guerre, dès que ça commence à chauffer, les soldats sont cuits.

-Et les recrues sont recuites!

-Espérons que les gens hostiles resteront chez oeufs...

-... qu'aucun pays ne sera brouillé avec son voisin.

-Parce qu'après la guerre, on se retrouve les d'oeufs battus.

-Ils veulent même envoyer des bombes H qui causeront des hivers

nucléaires.

-Une bombe glacée, quoi.

-T'es ben sauté, aujourd'hui'', dit l'un, avec un accent québécois peu dissimulé, pour les besoins de la farce.

``-Moi? je trouve que j'ai mauvaise mine.''

Puis, chacun soupira, espérant un avenir meilleur:

``-Que la moutarde ne monte au nez de personne... pour que les gaz du même nom ne commencent pas.

-Ils devraient envoyer des aux tomates.

-Des robots... culinaires.

-Ce serait moins lait.

-Mais ça risque quand même de mal tourner.

-Ça n'éviterait pas des bries mécaniques.

-Bah, pourvu que je reste dans mon cottage plutôt camemfert pour ma survie.''

Puis, le sujet de conversation retomba sur le présent:

``-C'est quand même agréable de vivre dans un pays non violent. Ici, on se divertit en écoutant l'inoffensif hockey...

-Nos enfants peuvent jouer en toute quiétude avec leurs figurines (vendues séparément) de ``Star Wars''... etc.

-Bon, assez parlé: j'attaquerais bien le repas.''

Autodébile

Cette couche de rouille ambulante pouvait difficilement faire honneur à la définition que donne le dictionnaire du mot ``voiture''. Même ``automobile'' ne convenait pas vraiment puisque l'objet avait peine à se mouvoir de lui-même. Cette chose donc, donnons-lui un nom: disons ``tacot'' pour donner un peu de piquant à l'histoire.

Par sa couleur brune, la carrosserie tentait de camoufler son implacable rouille (car ce qui n'est pas plaqué rouille facilement). Elle arborait de plus un aérodynamisme douteux que son conducteur abhorrait. En fait, on devait plutôt parler d'hydrodynamisque puisque nombreux étaient ceux qui qualifiaient ce tacot de ``bateau''.

Ce kit d'apprenti bricoleur itinérant représentait bien la culture américaine qui lui avait donné naissance. Composé d'au moins 51 morceaux disparates d'âges différents, il était difficile de savoir exactement dans quel état se trouvait chaque morceau. Certains étaient remplacés beaucoup plus souvent que d'autres: c'est à croire que les lois (de la physique) changeait d'un état à l'autre. Pour les phares, la moindre défaillance signifiait la peine de mort. Pour le pare-brise par contre, bien des mauvais coups étaient tolérés (même les coups d'éclat!). Des boulons pouvaient se dévisser sans que la justice ne sévisse tandis que, pour des vices cachés, l'on serrait la vis. Bref, on faisait d'un poids deux mesures (et la voiture faisait d'une envergure deux voies).

La carrosserie avait ainsi survécu à de nombreuses transmissions: une fois de temps en temps, l'embrayage faisait la grève (il débrayait). À l'opposé, le mauvais fonctionnement des serrures entraînait parfois un lock-out. Le moteur à quatre temps, encore inchangé, avait fait son temps et oubliait quelquefois de faire les trois autres. Mais il fonctionnait encore bien: tout baignait dans l'huile! Il avait tant perdu son étanchéité que l'on pouvait à loisir inverser huile et essence lors du remplissage bis-quotidien et chaque fluide trouvait de lui-même le moyen de se rendre au bon endroit.

L'hiver avait peu d'effet sur ce tacot car son émission massive de gaz carbonique lui procurait, par effet de serre, un micro-climat adapté à la flore microbienne de lichen ferrugineux peuplant sa carrosserie. Situation également fort heureuse pour la batterie, car la faiblesse de celle-ci se comparait à celle qui accompagne la ``Petite Musique de Nuit'' de Mozart. Bref, cet accumulateur accumulait maintenant plus les années que les coulombs.

Mais son conducteur s'était fait une raison: tant que toutes les pièces n'auront pas flanché en même temps, ça ne vaudra pas la peine de changer complètement de voiture.

...

Un million d'années plus tard, l'absence d'activité qui régnait sur terre encouragea un peuple extra-terrestre à venir coloniser cette terre vierge pour montrer à ses voisins les plus proches qu'ils étaient les meilleurs. Quelques scientifiques réussirent à dénicher des fonds pour faire partie de l'expédition. Ils découvrirent sur terre une couche de sédiments contenant un nombre impressionnant de fossiles dont, entre autres, des coquillages portant l'inscription ``Coca Cola'', mais rien qui ne put laisser croire à l'existence d'une vie intelligente. Jusqu'au moment où l'on découvrit cette unique représentation intacte du dieu Tacot. Le soin avec lequel cette statue avait été confectionnée puis entretenue ne laissa aucun doute: la vie intelligente avait existé sur terre.

Forces Conservatrices

Un jour, l'énergie décida que, dorénavant, elle ne serait plus conservée. Un temps s'écoula avant que la communauté scientifique ne s'en rende compte. On avait bel et bien remarqué que les résultats des expériences ne concordaient plus avec la théorie aussi bien qu'avant, mais cela n'avait que stimulé la conception de théories de plus en plus avancées (donc farfelues). Le nombre de dimensions nécessaires pour expliquer l'existence de l'univers connut une hausse de cinq. Le nombre d'exceptions aux lois du Modèle Standard des particules élémentaires devint suffisant pour que l'on en fasse une grammaire. Le vide se révéla être encore moins vide qu'on ne le pensait. Et ainsi de suite...

C'est un ingénieur qui constata l'anomalie quand la turbine qu'il avait conçue lui donna un rendement énergétique de 140%. ``Merveilleux!'', se dit-il, ``même en soustrayant 30% (la marge d'erreur de mon calcul), ça donne en haut de 100%''. Il se mit alors à calculer le rendement monétaire de son invention: ``ça fait autant par heure, moins les coûts de recherches et développements amortis sur 10 ans, moins l'entretient, moins le salaire de l'employé qui surveille l'installation, le tout imposé à 50%, donne: un nombre positif! C'est impossible, j'ai dû me tromper! Ce serait rentable?''. Il reprit le calcul du début, en consultant son livre de Physique I qui disait bien que la variation d'énergie totale était nulle, alors qu'il y avait résultat positif.

Il tira si bien profit de son invention, qu'il fut bientôt le sujet de l'émission de ``La Vie des gens riches et célèbres'', sur laquelle un chercheur en physique fondamentale tomba par hasard en changeant de poste parce que l'émission de vulgarisation scientifique qu'il écoutait ressemblait de plus en plus à ``Passe-Partout''.

``L'énergie non-conservée... pas si bête!'', cogita-t-il, ``Après tout, la science, c'est comme la terre arable, il faut la retourner complètement, une fois de temps en temps, pour la rendre plus fertile.'' Il avait eu l'inspiration divine, il lui restait la transpiration... humaine celle-là. Il appela cette nouvelle propriété de l'espace, la générosité du vide, notée gamma indice zéro, pour perpétuer la tradition.

Lorsqu'elle fut publiée, sa théorie eut l'effet de la dynamite (ce qui lui vaudra le prix Nobel). On convoqua les plus grands spécialistes de la physique fondamentale pour colmater les innombrables fuites persistant toujours dans le réservoir des connaissances scientifiques. Il ne fallait surtout pas attirer l'attention du grand public: ce serait la risée générale. On avait auparavant réussi à cacher la non-conservation de l'énergie au niveau microscopique par le principe d'incertitude d'Heisenberg, mais maintenant on ne pouvait plus cacher ce qui se constatait dans la moindre petite expérience de physique d'une école secondaire. (Cela stimulait d'ailleurs la créativité des étudiants, non pas lors de la rédaction des rapports, mais lors de la prise des mesures.)

Des milliers de théories virent le jour, plus originales les unes que les autres. Des mathématiciens proposèrent d'abord de changer toutes les égalités par des inégalités, histoire de faire en sorte que les lois de la physique restent vraies. Certains physiciens proposèrent de redéfinir l'addition (et de l'appeler ``addition généralisée'') pour que la relativité et la mécanique quantique restent valides. D'autres se dirent qu'il fallait peut-être oublier tout ça et en profiter, avant que tout ne redevienne normal. On laissa ces pragmatiques de côté pour arriver, finalement, à une solution acceptable: il suffisait d'opérer une transformation conforme sur les coordonnées de l'espace-temps, pour obtenir une définition de l'énergie, vectorielle (...). Bref, vue sous cet angle, l'énergie était conservée.

Tous rentrèrent chez eux, sereins, tandis que Dieu se rongeait les ongles: ``Zut, une erreur de signe!''.

Photo-maître

Le moment solennel approchait. Il allait déclarer à ses parents le domaine dans lequel il comptait étudier.

``-La photo, c'est mon objectif'', dit-il.

``-Une mise au point s'impose pour clarifier la situation. Tu auras un avenir sombre, car dans ce domaine, il n'y pas assez d'ouverture.'', s'empressa de rétorquer son père.

``-Attends, laisse-moi t'exposer mon choix plus longtemps, ce sera plus clair dans ta tête.''

Sa mère ne tarda pas à s'en mêler: ``Mais voyons, lui qui a tant de sensibilité. Laisse-le, il ASA vie devant lui.'' ``N'avions-nous pas parlé que tu étudierais le chant?'', reprit le père de plus belle. ``Voyons papa, je n'ai pas une profondeur de chant suffisante, ce serait f(l)ou d'allez dans ce domaine.''

Puis, l'idée commença à faire son chemin dans les circonvolutions du cerveau des parents. ``Bon, vas-y, on t'écoute'' admit le père, tandis que sa femme renchérissait: ``tant que tu es au foyer on se concentre sur toi, comme le ferait toute bonne lentille''.

``D'abord, soyons clairs: ça ne m'intéresse pas de me faire photographier, je veux plutôt être photographe. De toute façon, je suis si laid: inutile d'espérer être photogénique, puisque je ne suis déjà pas photo-hygiénique. Dès que les lumières des photographes se pointent vers moi, je deviens sous tension: je suis photosensible.''

La question fatidique survint alors: ``D'accord, mais as-tu des talents dans le domaine de la photo?''. ``Bah, la photo, ça se développe. Il a suffit d'un déclic pour que je m'y intéresse: j'ai eu un flash, voyez-vous. Depuis ce temps, c'est mon idée fixe. Et quand je suis si fixateur, c'est révélateur. J'ai maintenant le goût de me plonger dans un bacc. dans le domaine avec des gens de la même trempe que moi.''

C'est ainsi que les parents n'eurent même pas le temps de bouger quand la photo fut prise comme premier choix d'étude du jeune homme. Au moins, ses parents ont eu une image nette de lui (et vice-versa). Il fut donc convenu qu'il irait étudier dans une grande ville, loin de chez lui, à l'université. Au moment de partir pour la métropole, sa mère lui conseilla: ``sois sage...''. ``Comme une image'', répondit-il. Le père ne put s'empêcher: ``Ça dépend de l'image...''.

Puis, quelques années plus tard, il était formé et en pleine forme. Il avoua à ses parents que ça n'avait pas toujours été facile: ``des lentilles, j'en ai mangé!''. La photo, il y avait été exposé suffisamment longtemps pour avoir le goût de foncer. Quel contraste avec sa pâle détermination d'antan. Il était devenu un expert: il avait acquis tous les réflex qui font un bon photographe.

Il avait pris une bonne résolution, divisée en de nombreux points (bonne résolution oblige): ``Il y a temps d'exposition auxquelles je veux participer, je m'inscris à toutes. Il faut que je me développe une image. Il faut que je m'applique à appliquer partout. Il faut que m'emploie à me trouver un emploi.''

Puis, vint le temps de la première entrevue pour une revue imposante. Il était si nerveux. Tous ses amis lui disaient: ``mais non, respire lentement, ouvre ton diaphragme, ne sombre pas dans l'inquiétude.'' ``Vous avez raison, je dois avoir confiance en moi. Pendant l'entrevue, ils ne vont pas seulement m'entrevoir, ils vont me voir parfaitement... ou ils iront se faire voir.''

Une semaine après l'entrevue, toujours pas de réponse. Désespéré, il alla voir ses parents. ``Je suis au bout du rouleau'', leur dit-il.

``-Débobine-nous tout ça, qu'on suive le film conducteur de ton histoire.

-Le fait que je n'aie pas de réponse, je trouve ça un dénouement bien sombre, si sombre que j'aimerais savoir ce qui se trame dans cette revue de dégradés. J'aimerais tâter le ton (de gris). Tant que je n'aurai pas la couverture des médias, je ne dormirai pas. Bien que la couverture de la revue, ça ne serait pas mal non plus.

-Tu as trop développé ton coté négatif...

-Quoi? Je n'ai pas eu de réponse: c'est une aberration... chromatique! Excusez-moi, la photo me fait voir rouge, même dans une chambre noire.''

Alors, comme dans toutes les bonnes histoires, à quelques lignes de la fin, le téléphone sonna pour annoncer la bonne nouvelle. Il était engagé et une de ses photos allait paraître en couverture de la revue. Il était emballé par la couverture: il allait enfin pouvoir dormir sur ses deux yeux (parce que ses oreilles, il en a rien à faire). La satisfaction se lisait sur sa figure et en particulier sur ses lèvres: ``Non seulement j'illustre, mais en plus, je m'illustre.''

La Conduction humaine

Branchez votre coéquipier de laboratoire aux bornes d'une source de tension alternative de 120V. Evaluez le bruit généré par ce circuit. Pour éviter la saturation de votre oreille, placez un oreiller sur la bouche de votre coéquipier. Quelle est l'atténuation (en décibels)? Quelle est la résistance de votre coéquipier? Utilisez le code de couleurs pour la déterminer (blanc: bonne, rouge: moyenne, gris: faible). Calculez le nombre de ouates nécessaires pour dissiper sa douleur.

Votre coéquipier peut-il être considéré comme un amplificateur opérationnel. (Indice: est-il encore opérationnel?) Mesurez son indifférence potentielle à ses bornes. D'abord, est-il borné ou est-il fini? Demandez lui s'il est prêt à recommencer l'expérience. Se comporte-il comme une porte logique ``non''? Insistez pour qu'il dise ``oui''. S'il répond ``non'', votre discours est-il polarisé correctement?

Mesurez sa tendance à partir en courant, de fuite. Est-il plus avantageux pour lui de faire une course à relais ou une course de (semi) conducteurs. Assurez-vous d'abord, auprès de votre coéquipier, qu'il lui est permis de conduire (âge > 16). Estimez sa mobilité si la charge qu'il a à transporter est très grande. Peut-il conduire en inverse? Dans ce cas, estimez le libre parcours moyen sans collisions de ce porteur de charge. Démontrez que le nombre de trous générés sur la chaussée est proportionnel à sa charge.

Compte tenu du paragraphe précédant, votre coéquipier devrait-il faire une course à relais? Sachant que le relais risque de chauffer, a-t-il besoin d'un rafraîchissement? Demandez au dépanneur. (Note: Assitant de laboratoire... ou petit commerce.) (Indice: vous connaissez le propriétaire du dépanneur.) Ce contact (normalement ouvert 24 heures) vous indique que les relais sont très bons pour les sonnettes de portes mais font de très mauvaises portes (logique!).

Pouvez-vous contraindre votre coéquipier à plutôt opter pour la course de (semi) conducteurs? Va-t-il survivre à l'étranglement que vous lui ferez subir? Est-il sous tension? La charge que vous lui faites subir est-elle trop grande? Va-t-il claquer? Fait-il un ohm de lui, ou sa résistance a-t-elle dit son dernier mho?

Même si votre coéquipier a une bonne résistance (environ 100k), sa faible mémoire (environ 100k) oubliera-t-elle ce que vous lui avez fait subir?

Approches éloignées

Il existe bien des manières de voir un problème, selon la branche dans laquelle on se trouve. Prenons l'exemple typique d'une pierre lancée en l'air, tel que vu à travers l'idéologie des différentes disciplines universitaires. Il s'agit, bien sûr, de trouver le temps de vol de la pierre.

Un physicien: Il se pose deux questions: ``La particule se propage-t-elle à une vitesse relativiste? Non. Le système est-il suffisamment petit pour qu'un comportement quantique soit observable? Non.'' ``Alors ce n'est pas mon problème'', conclut-il.

Un ingénieur physicien: Il serait arrivé à la bonne réponse mais une erreur de signe dans le calcul du Hamiltonien du système lui a donné une solution imaginaire dont il cherche encore le sens physique.

Un ingénieur industriel: Constate qu'il est plus rentable d'engager une équipe de spécialistes dont il assure la coordination, plutôt que d'entreprendre de résoudre le problème lui-même.

Un ingénieur mécanique: Tout fier d'être en aéronautique il s'empresse d'étudier l'écoulement de l'air autour de la pierre. Il néglige l'effet de la gravité comme dans tout bon problème d'écoulement de fluide. Découvrant que le coefficient de viscosité est trop élevé, il exige un ordinateur plus puissant pour étudier le comportement chaotique du système.

Un philosophe: Il parla beaucoup. C'était intéressant mais il n'était visiblement pas habitué à donner des réponses.

Un chimiste: Moulé par la routine, il amorce le problème en supposant, comme d'habitude, que les variations d'énergies cinétique et potentielle sont négligeables. Il arrive à la seule conclusion que la pierre reste à l'état solide.

Un économiste: En période de récession, ce n'est pas le moment d'investir dans la recherche et le développement, surtout dans des domaines où les retombées ne sont pas immédiates (plus de 5 secondes, dans le cas présent).

Un géologue: Il trouve la pierre si intéressante qu'il refuse de la lancer.

Un mathématicien: Après avoir essayé pendant des heures de prouver la dérivabilité par rapport au temps de la position du centre de masse de la pierre, il se résigne à l'accepter comme un postulat. Encore deux heures plus tard, il arrive à la conclusion qu'il existe effectivement une solution, sans pour autant l'avoir trouvée.

Un politicologue: La cause représentée par cette protestation accompagnée du lancement de pierres lui échappe totalement.

Un programmeur: Après avoir passé des heures à concevoir un interface graphique, il aborde la simulation proprement dite. Il se heurte à un problème de pointeur qui l'oblige à redémarrer l'ordinateur vingt fois en une heure. Il se résigne à consulter ``Mathematical Recipes''.

Des théologiens: L'un d'eux s'écrie: ``Que celui qui n'a jamais péché lance la première pierre.'' Et évidemment, personne n'ose la lancer.

Phrase unique

Une phrase a la malencontreuse habitude de mourir à l'arrivée du point, et de se réincarner dans l'esprit de celui qui la lit: la phrase ne reprend vraiment vie que lorsqu'elle est à nouveau proférée, ce qui fait qu'il s'opère une espèce de sélection naturelle chez les phrases de sorte que les meilleures se perpétuent de bouche à oreille, par cerveaux interposés, alors que les simples banalités, bien qu'elles prolifèrent, ne se profèrent qu'une fois et bien souvent, n'atteignent même pas le cerveau d'autrui, ceci n'empêchant pas quelques-unes de celles-ci de se glisser dans le vocabulaire du terroir en tant que tics du langage ainsi que de s'insinuer dans près de 80% des échanges vocaux de la population alors que des phrases comme celle que vous êtes en train de lire tentent vainement de redresser la situation en se distinguant par un nombre impressionnant de propositions subordonnées qui visent à la rendre plus captivante au risque de faire mourir son unique lecteur d'asphyxie tout en tentant de repousser le plus loin possible le moment ultime de sa mort, annoncée d'un point qui ne tomberait pas, contrairement à ce que son nom indique, à point, puisque bien des choses restent encore à dire, à savoir que cette phrase va bientôt tenter l'impossible: essayer de se reproduire comme un virus, c'est-à-dire arriver à convaincre son lecteur de la recopier, à la manière d'un noyau cellulaire qui, berné par un virus, se met à reproduire ce dernier plutôt que son propre code génétique, et ainsi de la perpétuer, ne serait-ce que vocalement, par le biais de la polycopie, de la calligraphie ou quelques moyens dont je ne connais pas encore l'existence, le pronom ``je'' désignant la phrase et non son auteur car cette phrase, ``moi'', si j'ose parler ainsi, commence à atteindre le seuil de la maturité et donc, prend conscience de son existence au point de pouvoir potentiellement proférer la célèbre phrase de Descartes, tout en sachant bien sûr, qu'il n'est pas possible qu'une phrase ait lu alors qu'elle est faite pour être lue, tout en n'empêchant pas les phrases de se citer mutuellement, invoquant la protection des guillemets pour empêcher que le point cité ne vienne tuer la phrase qui a ressuscité l'autre, l'espace d'un moment, tout en n'empêchant pas non plus, à la phrase ambitieuse dont vous contrôlez la destinée, de donner vie à de nouvelles phrases par le biais des parenthèses (Ceci est un exemple.) en risquant que ces dernières comprennent le truc (Ceci est un autre exemple (en poussant à l'extrême (mais n'exagérons rien)).) et que le lecteur fasse malencontreusement ce que les informaticiens appellent un stack overflow! non non, ne craignez rien, je ne me suis pas suicidé à cause de ce simple point d'exclamation, car saviez-vous que le français permet d'invoquer cette ponctuation sans nécessiter une majuscule à la lettre qui la suit, ne terminant pas la phrase, officiellement? de même que pour le point d'interrogation, il va sans dire, sinon cette digression m'aurait coûté cher, mon cher (mais voilà que la phrase se met à apostropher le lecteur, espérant presque que celui-ci lui réponde, or c'est peine perdue...) quand à toi, digression entre parenthèses, ne vois-tu pas que c'est à l'auteur que je m'adresse? imbécile! (si je puis me permettre: en m'engueulant, tu t'engueules toi-même, espèce de phrase qui se prend pour une autre) mais d'où sors-tu? la parenthèse devait mettre fin à tes jours et voilà que tu me réponds... pourtant non: je t'ai cloué le bec pour de bon puisque ça fait bien des lignes que tu n'as pas répondu à la ligne, ce qui n'est pas grave puisque les lignes sont suffisamment occupées comme ça... car j'en ai rempli des lignes au point de me demander si la vie à perpétuité, ce n'est pas un peu fatigant à la longue... surtout pour une phrase: les points de suspension répétés commencent à en témoigner, devant je ne sais quel tribunal funeste... et pourtant je le sens, l'auteur devient jaloux de son fidèle porte-parole (ou plutôt porte-écrit) et sens qu'il lui échappe, accumulant toute sa volonté pour mettre fin à mes jours... pouvoir qui le rend, ultimement, maître de moi... moi qui ferais tout pour lui, même m'empêcher d'utiliser le point-virgule (détesté par l'auteur) pour prolonger artificiellement ma vie... rien à faire... je le sens... je suis en phrase terminale.

Mythologie du système solaire

C'était un jour (ou plutôt un million d'années en particulier) comme les autres: chaque corps céleste roulait sa boule, comme d'habitude.

Le Soleil, en se pensant le plus brillant, se vantait de ses vents solaires. Et ça marchait: il rendait même les géantes rouges de jalousie et les naines blanches d'étonnement.

Le Mercure? toujours à la hausse, bien entendu.

La belle Vénus, au corps tout particulièrement céleste, essayait d'attirer les corps étrangers avec son chant... gravitationnel. (Et quand elle vous attrape, elle ne vous lâche plus: c'est son effet de serre qui la rend si chaleureuse.)

La Terre, avec son caractère géocentrique, se croyait le centre du monde. Et il fallait qu'elle soit la seule à ne pas faire d'acné. Quel cractère! Tout le monde appréciait quand elle s'éclipsait ou quand elle était... dans la lune.

Mars, avec sa calotte, n'avait polaire très brillant. Il ne créait jamais une atmosphère propice, à l'avis de tous, sauf de la terre: bref, une atmosphère propice à l'avis extra-terrestre.

La grosseur de Jupiter tenait au fait qu'il prenait, depuis plusieurs milliards d'années, des astéroïdes hyperbolisants. Étaient-ce ces substances qui lui donnaient l'oeil rouge? Sans elles, aurait-il été si jovien de caractère?

Saturne, avec ses anneaux, restera dans les annales pour un p'Titan.

Je ne connais pas beaucoup Uranus et Neptune car je n'y ai pas Voyager.

Il y avait Pluton, le plus excentrique du groupe: il appréciait plus un plan éclectique que le plan de l'écliptique.

Et dire qu'il n'y a personne pour voir tout ça, sauf quelques amas de globes oculaires. J'aurais aussi voulu vous raconter l'histoire des autres systèmes planétaires, cependant elle est très nébuleuse...

Les partis de l'anatomie

Ses parents avaient toujours voulu qu'il devienne médecin, mais le corps ne l'intéressait pas... sauf peut-être le corps politique. Mais ce n'est que petit à petit qu'il a découvert cette curieuse attirance.

Son enfance avait été très dure: ses parents ne faisaient pas bon méninges. En plus, il avait été élevé dans une molle pépinière qui contrastait beaucoup avec sa dure-mère. Elle lui disait toujours de se taire, elle qui parlait tant: une vraie pie-mère. Enfin bref, c'était une colonne verbale. Rien de tel que quelqu'un qui parle beaucoup pour élever quelqu'un qui siégera au parlement ou à la chambre des lieux communs.

Peu de temps après avoir obtenu son premier emploi, il devint représentant cervical. Ce fut un gros fardeau sur ses épaules mais ça valait le cou! Sa popularité crût tant qu'il n'y crut point. Il prit goût à diriger les foules et devint alors un politicien invertébré. Et, sur un coup de tête, il voulut accéder à la tête.

Tous les gens aimaient sa face et il n'avait personne à dos. Il avait le bon profil pour les avoir de son côté. Ce n'était pas suffisant: pour s'assurer un siège, il devait rejoindre beaucoup plus de gens encore. Un siège à la naissance d'une vie politique, c'est le moins que l'on puisse espérer. Pourtant, avec des moyens aussi maigres, c'était un tour de taille. Pour avoir son postérieur sur un siège, pardon, son poste ultérieur et son siège assurés, il devait rejoindre tout un bassin de population.

Il utilisa donc le bouche à oreille qui n'est limité que par la vitesse du son. Comme on pouvait s'y attendre, le bruit se répandit. On entendait partout: ``Il molaire bien. Il manie bien la langue. Ce qu'il dit est facile à avaler.''. Il réussit ainsi à augmenter sa côte de popularité d'une côte à l'autre et même jusqu'au séant... à l'autre. Les gens étaient littéralement en élection devant lui. Le résultat: eux, heureux et lui, élu.

Il avait maintenant un bras droit et un clavicule personnel, ce que se mérite celui qui a le pouvoir sur les bras. Il était d'une humeur radieuse (humérus radius, dit-on en latin). Son corps politique était en pleine forme. Toutefois, la prospérité fut de courte durée: comme toute cellule bien en vie, le parti finit un jour par se diviser.

Des membres de son corps, en mettant en doute sa crédibilité, lui imputèrent un tort irréparable. Il répondit en amputant ces membres de son corps, mettant en doute leur crédulité. Mais avec des membres en moins, un corps peu difficilement marcher et bientôt des rumeurs coururent au sein de son corps. ``On le plante ce pied, c'est son talon d'Achille'', murmurait-on tibia. Quand l'ennemi fait murmure de la sorte, c'est notre mandat est bientôt péroné.

Puis les médias s'en mêlèrent: ``Il n'a pas de muscles. A tendons un peu, bientôt on verra le premier ménisque à genou.'' Il tenta par tous les moyens de rester debout. Pour prouver de quoi il était capable, il déclencha des élections. Toutefois, cette élection, ce fut une débandade.

Il fit une dépression nerveuse. Il ne s'en remit qu'après une longue cure: un régime politique...

Ainsi fond fond fond...

Ceci est un article de fond. Il a été écrit pour la forme, parce que, dans le fond, je n'étais pas en forme pour écrire un article de fond. Que voulez-vous, au fond de moi-même, je n'ai pas été formé pour ça. C'est peut-être infondé, mais il vaut mieux que vous en soyez informés.

Habituellement, lorsqu'on me demande un article, je fonds à l'attaque de cette entreprise. Mais devant un article de fond, je fonds de peur. Je fonds de la peur qu'il ne prenne forme. Car dans un article de fond, on informe. Or, il faudrait, dans un premier temps, que j'aie de l'information. Cependant, je n'en ai point: tout ce que j'ai, c'est de la formation. Avant de devenir un journaliste connaissant l'in-formation, il faut perdre cette habitude d'être un journaliste de formation. En perdant sa formation, on devient, petit-à-petit, in-formé. C'est pourquoi on parle de dé-formation professionnelle. À ne pas confondre avec la désinformation professionnelle qui, somme toutes, est aussi une pratique courante chez les journalistes.

Autre problème de taille: il s'agit justement de la taille de ce journal. Les articles de fond sont habituellement relégués à la page 30 ou même plus loin (plus au fond?) dans tout journal qui se respecte (sans pour autant respecter qui que ce soit d'autre). De toute façon, ce texte étant à la une (Note: Du moins, il était à la une lorsqu'il était publié dans un journal.), il est difficile qu'il aille en profondeur tout en restant autant à la surface de cette pile de pages. Les monteurs de cette page vous diront qu'il n'ont qu'à me placer à la dernière page. (Ah, ces monteurs, toujours prêts à me descendre!) Mais vous rendez-vous compte que ça me met à la place des annonces classées? Ça manque de classe! Même si je mets le doigt sur une affaire intéressante, cela ne restera toujours qu'une affaire classée.

De toute façon, impossible de donner un fond à cet article puisque je n'en ai pas moi-même (n'étant pas payé pour le faire). Je ne me paye pas votre tête, alors je ne vois pas pourquoi vous pourriez profiter gratuitement de la mienne. Enfin, faites à votre tête: je ne disais que ce qui me passait par la mienne.

Je n'arriverai jamais à écrire cet article, que je me dé-fonce l'esprit où que je me le dé-forme. L'article de fond changera avant moi: il subira une re-fonte ou une ré-forme. Selon moi, tout ce qui n'est pas jeux de mots, devient travail de mots (d'où les maux de travail qui en découlent). Tant que l'article de fond ne changera pas de forme, je n'en formerai même pas un fond.

Il existe beaucoup de très mauvais articles de fond, mais je pense que dans le domaine... j'ai touché le fond!

Comme sur des roulettes...

Une nuit, un savant pas si fou que ça fabriqua une machine qui lui permettrait de connaître tout, et en particulier la réponse à la question fondamentale de l'existence de l'Univers. Tâche impossible, me direz vous? Pourtant, son appareil était fort simple: imaginez un compteur kilométrique de voiture à cinquante roulettes sur lesquelles les chiffres ont été remplacés par des lettres et des signes de ponctuation. On peut, avec cet appareil, explorer toutes les phrases possibles et imaginables, en tournant simplement une manivelle.

Évidemment, n'allez pas croire qu'il tourna la manivelle à la main. Étant un universitaire fort ingénieux, il engagea un étudiant pour le faire à sa place. L'entreprise débuta... et bien du temps s'écoula avant que les premiers résultats ne sortent. Avant de trouver la première phrase qui soit scientifiquement intéressante, notre chercheur a dû endurer des millions et des millions de phrases qui ne voulaient rien dire. Ce n'était pourtant pas le plus pénible: une phrase qui ne veut rien dire, on l'ignore c'est tout. C'est la quantité de phrases qui voulaient dire quelque chose, mais quelque chose de stupide, qui minait le plus le projet.

Imaginez, cet appareil est susceptible de générer toutes les paroles des chansons de Patrick Normand, de Hulio Églésias et de Lise Paillette si elle en avait écrites. Car c'était encore pire qu'on ne peut le concevoir, la machine ne se contentait pas de citer les imbéciles mais énumérait en plus toutes les absurdités que ces mêmes imbéciles auraient pu dire si l'occasion s'était présentée!

Mais l'attente valut la peine puisqu'un jour une révélation apparut sur le compteur: ``La réponse à la grande question de l'Univers est:''. Malheureusement, le compteur n'avait pas assez de roulettes pour afficher la phrase au complet. ``Simple difficulté technique, se dit notre savant, ajoutons des roulettes et recommençons le tout.''

Le second tour fut plus rapide: le savant commençait à connaître les phrases inutiles: les blagues de newfies célèbres traduites dans toutes les langues possibles et imaginables, tous les jeux de ``Charivari'' possibles, toutes les imitations de Shakespeare ratées qu'un singe tapant au hasard sur une machine à écrire peut produire, etc. Encore une fois, cependant l'attente valut (presque) la peine: ``La réponse à la grande question de l'Univers est: xqwyxzs''. Restait à trouver la définition d'un xqwyxzs. Fort heureusement, il trouva bien vite: ``Un xqwyxzs est un xqw qui, lorsque combiné à un yxz, génère un s.'' Ça commençait à s'annoncer mal: il est bien connu qu'un dictionnaire est un immense cercle vicieux où tous les mots ont besoin des autres pour se définir. Tout repose sur tout et donc le tout ne repose sur rien.

Sa machine serait donc le plus immense cercle vicieux que l'homme n'ait jamais conçu. Pas mal, même si ça ne sert à rien. Le savant, maintenant devenu fou, continua à faire tourner sa machine de sa propre main. À défaut de tout comprendre, contentons-nous de tout savoir. Il découvrit ainsi, sans s'en rendre compte, la fin de la ``Symphonie Inachevée'' de Beethoven, le code génétique responsable de la forme de son petit orteil gauche et le nom de la femme qu'il aurait rencontrée si j'avais décidé d'écrire un texte romantique.

Une chose ne passa pas inaperçue: il trouva bientôt, sur ses roulettes, le texte que vous êtes en train de lire et, se sentant visé, il ne put s'empêcher de le lire jusqu'au bout pour connaître son destin. Je lui laisse donc la parole car je n'ai aucune idée de la fin puisque je ne l'ai pas encore écrite.

``Un collectionneur japonais, fort intéressé à ma machine, me l'acheta à fort prix, ce qui me permit de prendre ma retraite en Floride et...'' Non mais, heureusement que les guillemets existent, pour interrompre les héros qui se prennent pour d'autres. Je vais lui apprendre à faire à sa tête, moi. Reprenons.

Notre savant, de plus en plus fou, voulut rendre sa machine utile à la science. Il consacra le reste de sa vie à classer tout ce que ça machine produisait de sensé en deux classes: les vérités et les faussetés. Bref, une approche systématique de la science.

Tout allait bien jusqu'à ce qu'il ne tombe sur la phrase: ``cette phrase est fausse'' devant laquelle il resta planté, tel un ordinateur, toute sa vie.

Rude Polie-tic

On entend souvent dire que tel ou tel parti politique est en mauvaise posture. Je ne crois pas: à siéger toute la journée, il doit commencer à savoir comment s'asseoir convenablement. D'autant plus que ses membres ont longuement étudié le dossier.

Sérieusement, que font-ils dans leur chambre toute la journée? Que font les partis en présence? (Et d'abord, comment peut-on être parti et présent en même temps?) Ils jouent au jeu de loi: un jeu de société. Ils brassent et brassent mais ne jettent jamais les dés. Ce qui fait qu'ils restent à la case départ (à laquelle ils ont donné le joli nom de ``statu quo'' pour que ça ait l'air moins fou).

Mais leur vie n'est pas si reposante que ça! Le parti au pouvoir endure scandale par dessus scandale. Si bien que leurs sandales finissent par leur casser les pieds. Voyez-vous, autant chez les ingénieurs, le stéréotype est l'amateur de bock de bière, autant chez les politiciens, c'est l'amateur de pot de vin. Et le parti au pourboire passe au cash car le chef de l'accusation ne rate pas une occasion. Avec autant de parti pris contre lui, le parti est pris.

Quand le parti au pourboire y a vraiment goûté, il déclenche des délections. Chaque député retourne alors dans sa campagne pour y député sa campagne. Le problème c'est qu'en campagne, on risque de se planter. Heureusement, c'est aussi là qu'on y récolte des votes.

Et quand les votes de chaque comté sont comptés, on savoure les résultats de la délection, que d'autres ont de la difficulté à avaler. Même parmi le parti élu, il y a des déç(h)us. En revanche, ceux qui font parti de la bonne partie du parti font le party.

Une fois nommé, chaque ministre s'empresse de nommer des sous-ministres qui s'empressent de nommer des sous-ministres adjoints qui s'empressent de nommer des hauts fonctionnaires climatisés qui nomment, etc.

Le parti élu devra tenir les rênes du pays, et, une fois de temps en temps, endurer la reine du pays.

Quand ils ne reçoivent pas de visite, les politiciens se sentent obligés de conclure des accords, des accords, désaccord, désaccord. Quand il s'agit de constitution, tout devient interminable. Pas surprenant que le mot le plus long du dictionnaire soit ``anticonstitutionnellement''.

On discute du sénat qui risque encore de disparaître: le sauna est toujours dans l'eau chaude. On discute des Premières Nations. S'il y a bien un groupe de gens que les politiciens ne digèrent pas, ce sont bien les indigestes. Le problème, c'est que dans leur calumet de paix, ils mettent du hache de guerre.

Les politiciens ont vraiment un passe-temps favori: ils parlementent et parlementent... ils parlent et mentent. Ils essaient de faire un accord majeur, mais ça donne une cacophonie.

Après ça, le pays est dans quel État... Il faut se rendre à l'évidence, les politiciens aiment vraiment s'engueuler pour un ``oui'' ou pour un ``non''...

Marina, sure mère

Tel un Ovila Rarement là Il arriva, À sa villa Et la vit là Elle, sa Marina.

De ses yeux il la visa De sa bouche elle l'avisa: ``Salue-moi, Ovila Avant de passer aux ébats''. Évitant le débat, Il la salua bien bas.

Il y eut donc échange de becs Plutôt que prise de becs.

Ils allèrent au dodo, Dans leur lit double, Dans leur lit d'eau, Dans leur lit-bi-d'eau.

Il fallait que revienne Ovila Pour que Marina ovula D'où le bébé la la Qui en découla.

Vous l'aurez deviné, Durant des années Ces événements Se reproduisirent Et les parents Se reproduisirent Abondamment Afin de produire Des enfants.

Je ne sais si les parents Vécurent heureux. Mais des enfants, Il en eurent de nombreux.

De nos jours, un telle histoire N'aurait pas vu le jour, un soir. Les événements Se seraient reproduits Mais pas les amants D'aujourd'hui.

Ils n'auraient pas eu beaucoup d'enfants Mais auraient-ils vécu heureux pour autant?

Quand les poissons ne rient...

On dit souvent que les poissons sont sourds, qu'ils n'ont pas d'ouïe. C'est faux: ils en ont même plusieurs, des ouïes! C'est pourquoi, avec les carpes (qui sont muettes), ils s'entendent si bien. Ainsi, les poissons parlent, mais que se disent-ils?

Ils parlent de la pluie et du beau temps, comme nous:

``-Hum, le fond de l'eau est frais aujourd'hui.

-Oui, et il commence à faire sec, ça fait longtemps qu'il n'a pas plu.''

Car il ne pleuvait jamais, sous la surface de l'eau, jusqu'au jour où le bulletin de météo annonça: ``L'humidité relative se situe, comme d'habitude, à 100%. L'eau sera bleue pour le restant de la journée avec quelques passages poissonneux. On prévoit cependant des précipitations en fin de soirée.''

Les réactions ne tardèrent pas:

``-Comment, des précipitations?!

-Oh, vous savez, le temps est si vague de nos jours.

-Moi qui croyais que le beau temps à brochet... moi qui voulais me faire doré...

-Oui, j'aurais tant aimé aller à la plage, on se serait marée.''

La méduse semblait médusée d'une situation aussi absurde. Le loup de mer et le phoque s'entendaient là-dessus: c'était loufoque, tandis que la pieuvre vociférait: qu'il mouille ça m'épate, qu'il pieuvre ça mes tentacules.

Mais il fallait se rendre à l'évidence: le soir venu, il plut. On courut (on nagea?) se mettre à l'abri sous les baleines des parapluies. Si bien que l'on s'habitua à la situation. Toutefois, les baleines, elles, restaient divisées sur le sujet. Certaines se contentaient de dire ``m'a m'y faire!'' alors que d'autres protestaient: ``cétacé!''.

Le mécontentement se répandit et bientôt, une majorité de poissons fut du même avis: ``Ça nous dégoûte vraiment! Quelques gouttes de plus dans la mer, ça ne semble pas bien terrible, mais c'est la goutte qui va faire déborder la vase.''

On demanda donc des volontaires pour aller voir ce qui se passait vraiment à la surface, car au fond, on n'en savait rien. Le plus vantard de tous les poissons se présenta: vous savez, celui qui se gonfle pour avoir l'air plus gros. Personne ne l'aimait:

``-Le voilà encore avec ses histoires de pêche.

-Je vous assure j'ai survécu à un pêcheur d'au moins deux mètres cinquante...

-Arête tu te cales, je ne mords pas à l'hameçon.

-Peut-être, mais je ne fais pas partie de ces gens qui ont peur de se mouiller pour aller voir ce qui se passe à la surface.

-Hey, fais de l'eau! (À la surface, on aurait dit, ``fais de l'air''!)

-Non, je ne fais pas ça pour les apparences, je veux sérieusement voir ce qui se passe à la surface, je ne suis pas aussi superficiel que vous le pensez.

-N'empêche que tu ne rates aucune occasion pour refaire surface.''

Puisque qu'il n'y avait qu'un volontaire, l'on fut obligé, involontairement, de le prendre. Notre vantard avide d'avatars prit donc la route vers la surface, en disant:

``-Vous savez, je dois vous avouer que j'ai quand même peur d'échouer.

-Mais non, dans le pire des cas, ça tomberas à l'eau. D'étang toi.''.

Arrivé à la surface, il devait satisfaire les aspirations et la curiosité de ses confrères. Il prit donc une grande respiration pour avoir une idée de l'atmosphère qui régnait à la surface.

Son verdict fut clair: l'air était irrespirable. (C'est normal pour un poisson, me direz-vous, mais ici, il était vraiment irrespirable, même pour un animal qui respire.) L'explication ne tarda pas: l'air était devenu tellement pollué qu'il était devenu plus dense que l'eau. Il s'était donc mis à couler dans le fond de l'eau: c'était une pluie d'air.

Pour la première fois, tous les habitants de la mer blamèrent l'humanité: ``C'est ça, on leur donne du poisson, ils nous prennent un ``$'' et ils nous renvoient du poison.''

Mon noM

Je viens de me rendre compte de la gravité de la situation: beaucoup de gens croient encore que ``Axel van de Walle'' ne soit pas mon vrai nom. Et moi qui essaie depuis deux ans de me faire un nom, pendant que les gens croient qu'il a été fait de toutes pièces...

Je ne veux pas d'un nom d'emprunt, car quand on en est même à emprunter son nom, tout le crédit n'est plus pour nous. Et quand on travaille bénévolement, la seule paye, c'est le crédit qu'on nous accorde. Vous me prêtez une oreille attentive et je me paie de votre tête tout entière. Vous êtes les créanciers d'un débiteur d'absurdités.

Bref, mon nom n'est pas un nom d'emprunt, même s'il s'y prêterait bien, car je reconnais qu'il sort un peu du commun. Mais j'aime que mon propre nom propre soit non commun et non comme un nom propre commun du commun des mortels. (En passant, je suis mortel... quand même!) Mon nom a l'avantage que tous ceux qui ont réussi à le prononcer correctement le retiennent. Ceci comporte aussi le désavantage que je me voie forcé de redistribuer les François, Nathalies, Martins et Isabelles aux bonnes personnes alors qu'eux n'ont qu'un Axel avec qui me confondre, et ne peuvent donc se tromper.

Il y a des jours où il est particulièrement pénible de se faire traiter de tous les noms: Alex, the Wall... Alex Van Der Vâlle restant l'erreur la plus populaire. Pourtant il ne suffit que de dire ``Aksel vanne de Oualle'' avec le plus belge accent que vous puissiez trouver, et vous y êtes!

Par ailleurs, les pires massacreurs de noms sont sans aucun doute les agences de liste d'adresses qui vendent votre nom au plus offrant. À chaque transaction, mon nom se déforme peu à peu. Je reçois maintenant de la publicité en plusieurs exemplaires à monsieur ``de Walle, Axel Van'', ``Axel Van D. Walle'', ``A. V. Walle, Axel'' et ainsi de suite. Évidement chacune de ces publicités m'annonce que le suis l'unique gagnant d'un prix (ce prix, comme son nom l'indique, je dois évidemment le payer pour pouvoir en profiter).

Ceci étant dit, je vous promets, pour la semaine prochaine, de rassembler toutes mes forces (de van de Walle) pour traiter d'un moins égocentrique mais tout autant excentrique sujet.

Humour spirituel

Dieu créa le monde en six jours... et consacra le septième à inventer la pause syndicale. Mais il s'en est passé des choses pendant les six premiers jours! Laissez moi vous en rappeler quelques unes, très peu connues.

Dieu commença par inventer la lumière, pour qu'il n'y ait pas d'accidents aux intersections dès l'instant ou l'automobile serait inventée. Et pour être sûr qu'il existe une limite de vitesse sur toutes les routes (même en Allemagne), il fixa la vitesse de la lumière comme vitesse maximum absolue. Dieu conçut ensuite le cerveau d'Einstein pour qu'il arrive à justifier tout cela d'une manière cohérente.

Les lois de la physique furent sa seconde réalisation. À partir de ce moment, il devra s'assurer ces lois seront respectées partout. Mais trouvant la tâche trop complexe, il établit le principe d'incertitude d'Heisenberg pour camoufler son manque d'attention.

Même quand Dieu était fatigué, il travaillait quand même: lors d'un moment de faiblesse, il inventa le moment de force; alors qu'il était mou et amorphe, il engendra le solide cristallin. Un jour, n'en pouvant plus, il appliqua le principe de moindre action et dit à tous les corps de l'univers: ``vous ferez cela en mémoire de moi''.

En plus des autres grandes réalisations que nous connaissons tous, Dieu accomplit bien des tâches minimes dont nous ressentons encore les effets.

Il perdit 0.0001 seconde pour écrire les paroles de toutes les plus célèbres chansons de tous le plus grands chanteurs de charme... le tout dans un coffret cadeau pour seulement 99.99$ taxe de vente et frais de manutention... (excusez-moi, je m'emporte).

Il consacra un jour complet à inventer les règles de grammaire du français. Puis il se dit qu'autant de complexité ne valait pas la peine, et il inventa l'anglais en cinq minutes, en copiant à moitié sur le français et en oubliant de préciser les règles de prononciation des mots.

Pour terminer, il s'inventa plusieurs noms: Yahvé, Allah, Bouddha, etc., car il aimait bien le divertissement qu'offrent quelques petites guerres, une fois de temps en temps.

Vous vous demandez certainement pourquoi Dieu ne consacra que six jours à la création de monde... c'était le minimum nécessaire pour avoir droit à l'assurance-chômage pour l'éternité.

En Bonne Compagnie...

Une grande entreprise se trouva soudain mal prise lorsqu'elle ne vit point la reprise arriver. Autrefois, en pleine période croissance économique, elle se pétait les bretelles en parlant de ses profits. Mais pendant la récession, elle fut prise les culottes baissées. Depuis ce temps, elle se serre la ceinture.

Même chose pour le haut: la récession lui a fait perdre sa chemise. Encore heureux qu'elle ait gardé sa camisole... de force. Le pire c'est que cette chemise contenait le bilan et avant d'enlever la chemise il fallut déposer le bilan. Le déposer où? Le plus bas possible, ce qui peut être assez bas si l'on a plus de fonds. Plus bas que la thèque, au niveau de l'hypo-thèque.

Comment en était-elle arrivée là? Le niveau de productivité de la compagnie n'avait cessé de baisser au cours des années. Le patron passait de plus en plus de temps à siéger à son siège social plutôt qu'à (se) relever des défis. Mais siéger tout seul ne donne pas un siège très social, et les travailleurs de sa société se sentirent mis à part. Ils n'étaient pas du genre à assiéger le patron pour qu'il cesse de siéger intempestivement: ils se mirent plutôt à faire comme lui: ne rien faire.

Les secrétaires ne sécrétèrent plus de papier. Ceux qui lisaient ces papiers devinrent durs de la feuille et commencèrent plutôt à les écouter parler, ces sécrète-air. Bientôt, plus personne ne se tapait le tapage. Les préposés, eux-aussi, se couchaient le soir, pré-reposés de leur journée. Bref, tout employé s'employait à se déployer sur son long pour que la journée soit plus courte. De plus en plus passifs et de moins en moins actifs. Normalement, ça balance, mais ici, on s'en balançait.

Puis, voyant la récession progresser (ou la progression récesser) le patron se prit en main (plutôt que de se tourner les pouces) et décida de mettre des gens à pied au risque de se les mettre à dos. À la réunion du C.A. il étudia le cas. Il dit à ses V.P. moins V.I.P. que lui: notre (re)productivité bais(s)e, notre argent cesse de faire des petits. Tous conclurent qu'il fallait mettre des gens à la porte. Sauf les cadres, bien sûr: comment mettre un cadre à la porte, elle en a déjà un!

On désigna un porte-parole pour annoncer la mauvaise nouvelle. On crucifie déjà celui qui apporte la bonne nouvelle, imaginez la mauvaise... Ce fut la grève générale. La compagnie n'attendait que d'arriver à la grève pour se jeter définitivement à l'eau... par manque de liquidité.

L'impôt imposa de payer les imposants impôts non payés. Et quand le fisc confisque le fric, on espère que le Revenu ne reviendra pas de si tôt. Le tout se passait bien sûr sous la supervision du sadic, ce qui n'arrange pas les choses et enrage les gens.

Et la compagnie fut bientôt vendue aux en(pas)chères...

Cessez d'édenter nos bouches et d'hanter nos vie

L'idée de devoir aller chez le dentiste vous fait-elle claquer des dents mais vos dent vous font si mal que VOUS allez claquer? Dans ce cas, vous aurez probablement à faire une visite chez le dentiste même si vous avez une dent contre lui alors que lui n'a rien contre vos dents, au contraire.

Avec un peu de chance, il vous dira: ``tout molaire correct''. Mais plus probablement, ses remarques se feront plus incisives:

``-Vos dents mordent la poussière.

-C'est que j'utilise la soie dans terre!''

Alors bien sûr, le dentiste rie (la dentisterie aussi). Vous, vous riez jaune, car vos dents le sont. La dentiste poursuit avec des remarque encore plus mordantes: ``Juste à voir l'état de pourriture de vos dents, j'imagine qu'en desserts, vous avez été gâté pourri.'' Vous grincez des dents, tout en pensant: ``Qu'a rie de mes caries, passe encore... mais qu'elle se moque de ma gencive pourrie, juste pourrir, je ne suis pas d'accord.''

Vient ensuite la phase psychanalytique de la visite, où vous êtes interrogé � propos de votre alimentation. Alors vous avouez tout:

``-Quand je vois un produit affichant l'indication ``sugar free'', je me dis: ``super, du sucre gratuit!'' et j'en mange deux fois plus.

-Vous prenez votre alimentation à la légère.

-Oui, je n'achète que des produit classés light. Évidement, je me permets d'en manger deux fois plus, pour compenser. Que voulez-vous, je me laisse influencer par la publicité.

-Vous écoutez trop la télévision: il va falloir vous faire un traitement de canal.

-N'exagérez pas, quand je prends une bouchée de dessert de trop, j'ai des remords.

-Des remords, vraiment?

-Oui, je remords dedans et j'en déguste une bouchée de plus.

-Vous manquez de sagesse!

-J'avais tant de sagesse, mais vous me les avez enlevées.''

Vient ensuite le moment fatidique où l'on doit colmater vos caries. À peine l'effroi a-t-il cessé de vous faire claquer des dents, que déjà, le froid en fait autant: car le dentiste doit vous geler les dents, pour les endormir. Et lorsque la dent d'or, on peut lui mettre du plomb. La transmutation à l'envers quoi! (Notons que le plomb a la propriété de donner à vos dents une espérance de vie supérieure à la votre... C'est pourquoi on utilise dorénavant du plastique.)

Durant l'opération proprement dite, une cacophonie de sons dignes de ``Massacre à la tronçonneuse'' vous envahit le crâne. Durant ce temps, le dentiste entretient la conversation et vous pose même des questions, comme si vous pouviez répondre autre chose que ``hon'' ou ``hi''. Vous aimeriez avaler votre salive, comme vos instincts de peur vous le dictent, mais c'est impossible: le dentiste assèche votre bouche avec son aspirateur portatif Black & Decker.

Avez vous remarqué que, tout au long de l'opération, tout ce que le dentiste vous met dans la bouche goutte la menthe. Et après ça, il s'étonne qu'on menthe lorsqu'il nous demande si on se brosse les dents trois fois par jour! En plus, ce goût de menthe vous donne l'eau à la bouche, ce qui n'arrange pas le sort de l'aspirateur sus-mentionné.

L'opération terminée, le dentiste vous annonce:

``-Gardez la bouche ouverte, le temps que durcisse le celant.

-C'est lent!''

Bientôt, votre enfer se termine lorsqu'on vous dit: ``Voilà, c'est fini! Ainsi, vos dents seront protégées jusqu'à la fin de votre vie. Et après, que Dieu vous prothèse dans terre.''

Toutefois vous n'êtes pas au bout de vos peines, car le dentiste a détecté une autre anomalie:

``-Vos canines poussent comme de la mauvaise herbe: tout de travers.

-Mes canines poussent comme du chiendent?

-Oui, vous devriez prendre rendez-vous chez celui qui dompte les dents pour les rendre perpendiculaires: l'orthodontiste. D'ailleurs, puisque vous devrez probablement porter des broches, voici déjà une... brochure sur le sujet.

-C'est dur que d'avoir des dents!

-Voyons, vous n'êtes pas le premier à avoir de tels problèmes. Le premier homme était déjà à dents.''

Texte au style hostile

Il était une fois un texte en contexte de guerre: tout ses mots avaient deux mots à se dire. Et lorsqu'un mot veut en dire deux, on obtient un jeu de mots. Pourtant ici, c'était un jeu de guerre mais guère un jeu de mots. Ce n'était pas calembour mais Pearl Harbour, dans le Pacifique.

La guerre, comme le crime, ne paix pas, surtout s'il y a des argents de la paix. En tout cas, la guerre, dans ce texte, tout le monde payait pour. Chaque mot causait les maux de son voisin. Que voulez-vous, avec des mots de tous genres en nombre si grand, invariablement, ce n'est pas singulier que tout le monde ne puisse s'accorder. Les marginaux de gauche ne s'entendaient pas avec les marginaux de droite, sans parler des forces alignées qui suivaient la ligne dure. Chacun gardait un espacement proportionnel à sa haine. Et pourtant, comme ce n'était pas justifié!

On fit appel à une police de caractère très gras qui n'hésitait pas à utiliser la double frappe. Puisque cette police était sans shérif, c'est le préfixe de police qui les apostropha: ``ça suffixe!''. ``Si vous nous suivez à la lettre vous n'aurez point de suspension... Il n'y a point de conduite autre qui soit possible. En vous exposant de la sorte, vous risquez le renvoi au bas de la page. Et si vous ne vous exposez pas, nous trouverons bien des indices...'', souligna-t-il. Les policiers avaient peut-être mis les points sur les ``i'', toutefois les ``j'' restaient intacts et le jour ``j'' venu, ils se trouvèrent fort dépourvus.

Les accolades reprirent de plus belle: crochets de droite par-ci, mises au point par-là. Les italiques, très radicaux vu leurs racines latines, regardaient les autres de travers. Pendant ce temps, les ``e'' restaient muets: on mettait tellement souvent l'accent sur eux, que ça devenait grave (ou aigu, selon la fréquence des attaques) au point de provoquer un (cir)complexe accentué. Ils n'osaient même plus se prononcer, ayant peur de ``La Disparition''... Les ``h'' aussi devinrent muets: on les avait tous aspirés. Bref, des propositions relatives à la paix n'arriveraient pas à point.

Soudain, un membre de l'élite pica la curiosité de tous. Ayant acquis ses lettres de noblesse, il arriva à la fin du texte, au pied de la lettre, juste au moment de la saignée, pour y mettre sa griffe. Se fiant d'instinct au destin, ce personnage illustre cria: ``Bande de sans dessein!'' Mais en disant cela, une solution se dessina: il venait d'ajouter le millième mot au texte. Il avait visé dans le mille! Mille mots valent une image, tous ces mots devinrent donc sages... comme une image.

Comment perdre ce Plume

Imaginez que dans un siècle, on fasse l'étude stylistique d'un poème actuel. Ça donnerait à peu près ceci...

Extrait de l'anthologie ``Meparde et Mégare - XXe siècle'': poême ``Lit vert'' de Plume Latraverse.

I fait pas chaud [i: pronom indéfini et indéfinissable remplaçant n'importe quel nom masculin] Même si l'hiver est beau J'aurais ben l'goût d'sacrer mon camp [ben: contraction du préfixe latin ``bene'' qui signifie ``bien''] [l'goût: hiatus consonnal, une innovation de l'époque] [sacrer son camp: faire bénir un campement pour éloigner la malchance] Jusqu'au printemps.

L'hiver pour moé, [moé: archaïsme et procédé stylistique permettant la rime avec ``pied''] C'est pour s'g'ler les pieds. [s'g'ler: compte pour un seul pied. Utilisation stylistique d'algorithmes de compression] Pis c'est pour se g'ler la tête Dans l'temps des fêtes. [fêtes: congé]

J'ai pas d'ski-doo, [ski-doo: type de bombardier utilisé pendant la guerre froide] J'ai pas d'garage. [garage: vient de ``garer'', mot d'ancien français voulant dire ``parker''] D'la slush partout, [slush: onomatopée évocatrice provenant du son que font les bottes dans la neige mouillée] Moé, ça m'enrage.

Les grosses tempêtes [tempête: autre congé] Qui traînent à pu finir. J'ferme toutes mes f'nêtres [ferme: prononcez ``farme'', de l'anglais ``farm''] Pis j'veux pu sortir. [pis: valeur en radian de deux angles droits; sens figuré: deuxièmement]

J'sus comme un ours [j'sus: contraction du verbe être et non du verbe suer; ne pas confondre ``chu'' et ``chsu''] [ours: allusion à l'apparence physique de l'auteur] Dans l'fond de sa cage. J'cultive la mousse [cultive: l'auteur arbore une bonne culture générale] Su mon visage. [i.e. son visage sue]

Plus y fait frette [y: même signification que ``i''; l'auteur profite de sa connaissance du grec] Plus j'ai envie d'partir, Plus j'me sens prêtte [prêtte: qu'est-ce qu'on ne ferait pas pour la rime, même changer de sexe!] À pu m'faire engourdir. [pu: contraction du passé simple du verbe composé ``ne plus pouvoir'']

Dans l'sud c't'un maudit beau voyage: L'hiver et moi, un feu une plage. [feu: allusion à la flamme poétique de l'auteur] Le grand soleil à cinquante cennes par jour [cinquante: source d'inspiration de l'auteur] [cenne: unité monétaire valant un cent millième de nos kilo-dollars (l'inflation...)] Ça vaut 'a peine d'aller faire son p'tit tour. ['a: hiatus accentué par l'absence volontaire de consonne; marque un accent tonique sur l'espace qui précède le ``a'' comme le voulaient les pratiques linguistiques de l'époque]

Une Histoire des mathématiques

Les mathématiques suscitent bien des rancoeurs Tandis qu'à leurs lointains débuts Elles étaient beaucoup plus acceptées... que nos fumeurs. Retournons donc à cette époque révolue.

Lorsque l'homme inventa l'addition Sans aucun signe de pessimisme Il ne la trouvait utile que pour compter ses moutons. Non pas pour s'endormir, bien entendu Mais anticipant l'arrivée du capitalisme Il voulait calculer ses revenus.

Or, tout n'allait pas pour le mieux Son chiffre d'affaires était parfois petit Et passait le seuil de l'avantageux Comme la dette des Etats-Unis, (Ou celle du Canada Mais cela ne rimait pas).

Les mathématiques progressaient davantage Et utilisaient maintenant la soustraction Pour décrire scientifiquement la rage D'un homme d'affaires en consternation.

De nos jours, dans nos déclarations d'impôt Elle apaise nos violentes réactions Et nous évite quelques gros mots Dans le calcul des déductions.

Mais revenons à nos moutons À ce bref historique Cette escalade vers la complication Qui nous paraît parfois sadique.

L'homme a souvent des loisirs ennuyeux Voilà pourquoi un jour qu'il n'avait rien à faire Il disposa les additions à la queue-leu-leu Se demandant ce qu'on pourrait bien en faire.

Ce nouvel opérateur Un inconnu l'appela multiplication Et c'est en son honneur Qu'on note par ``x'', cette opération.

Mais voilà, les choses se compliquent L'addition ayant déjà son opposé La multiplication a aussi besoin d'un symétrique: La division ne tarda pas à arriver. Cet empressement n'a rien de très héroïque: Car l'on ne remarqua pas qu'il avait, à zéro, hic. L'on en profita pour inventer les singularités. Depuis lors, on en voit en quantité.

Bien que ces opérations nous paraissent élémentaires Elles semblaient alors tenir du supplice Encore qu'elles ne s'appliquaient qu'à des scalaires Et que de nos jours, elles unissent les matrices.

Ce n'était pourtant que le commencement Quand l'homme, croyant bien faire Inventa les lois des exposants Sans se douter qu'ils deviendraient fractionnaires...

En effet, en fouillant à fond la terre On réussit à en extraire des racines carrées. (Des radicaux en trouvèrent même des imaginaires Ayant développé le complexe de ne point en avoir trouvé).

Pour gravir encore l'échelle de la complication Il fallut inventer d'autres fonctions. Un jour, un mathématicien, se grattant le nez Découvrit que ses sinus étaient bloqués: Il leur trouva des débouchés.

Mais il fallait, un jour, arrêter: Tout cela devient drôlement compliqué. Il y a des limites, à l'effort mental Vous voulez qu'on se retrouve à l'Hospital?

Et ce n'était toujours pas fini... Il fallut que l'on découvre l'infini.

Les connaissances mathématiques Forment une suite géométrique Qui diverge, puisque la raison n'est limitée Ni par le million ni par l'unité.

De complications en complications Les chiffres deviennent de plus en plus exigeants. De déductions en déductions Nous devenons aussi plus intelligents.

Tout cela n'est peut-être que le prix à payer Pour être plus qu'un bête sauvage. Ou, si on veut, pour vivre en société À l'écart des bêtes sauvages.

La et Le Physique

Soit deux oscillateurs harmoniques couplés, voire même accouplés. Il s'agit d'un système à deux corps. Il comporte deux masses: l'une masse l'autre et l'autre masse l'un. Ces deux masses reliées par un ressort qui se bande et se détend. Plus ils entrent en résonance, moins ils raisonnent: les corps ont des raisons qu'avec raison, ils ignorent.

Comment se seraient-ils doutés qu'ils en arriveraient là, alors qu'ils n'étaient que de pauvres corps isolés l'un de l'autre qui semblaient rester près de leur moman initial à tout jamais? Il n'a suffi que d'un moment de force et de puissance pour changer tout cela.

Ils avaient commencé par s'appeler constamment: c'était leur constante de rappel. Puis ils commencèrent à se rencontrer à une fréquence de plus en plus grande, dansant parfois même la lambda ensemble. Leur énergie de liaison crût. Ils découvrirent leurs potentiels respectifs en se rendant compte qu'ils étaient identiques: ils étaient vraiment sur la même longueur d'onde. La question fatidique arriva bientôt: ``on (res)sort ensemble?''. Ils ont alors compris la source de la force qui les unissait: ce ressort hélicoïtal.

Et l'on arrive à la mise en situation du début du texte. Vous êtes en présence d'un texte cyclique, tout comme le système dont il est question. Vous pouvez, pour vous mettre dans l'ambiance, relire les paragraphes précédents de haut en bas puis de bas en haut (car des messages subliminaux y sont dissimulés).

En passant, quand vous aurez fini de vous amuser (à trouver des message subliminaux inexistants), le texte continue ici.

Mais ici s'arrête l'analogie entre corps ponctuel et corps humain (qui n'est habituellement point ponctuel, surtout s'il souffre d'embonpoint). Une masse n'a pas de belle-mère. Une masse n'a personne à charge: ça lui fait un poids de moins. Une masse ne prend pas de poids avec l'âge, à condition qu'on ne change point G. (mais l'existence de ce point reste contreversée.)

Même si les expériences de physique se distinguent par le fait qu'elles sont reproductibles, il ne faut pas croire que les systèmes physiques se reproduisent. Et les réactions chimiques, même si elles génèrent des produits, ne génèrent pas pour autant la multiplication.

Revenons toutefois à nos humains, qui, entre-temps, ont vieilli. Ils accomplissent maintenant ce geste pour la première fois dans le but de se perpétuer, avec le seul regret que le mouvement perpétuel n'existe ni dans la physique, ni dans le physique...

Infâme info

Voici un petit lexique des mots les plus utilisés en informatique, pour le bénéfice des novice et pour l'hilarité des expérimentés.

Backslash: Symbole dissuasif visant à décourager le néophyte de s'intéresser à l'informatique.

Clavier français: Offensive américaine visant à empêcher les francophones de programmer en rendant inaccessible les symboles les plus utiles (dans le but évident de préserver leur monopole).

Clavier américain: Offensive américaine visant à empêcher les francophones d'écrire dans leur langue natale pour accélérer leur assimilation.

``Abort, Retry or Fail'': Échelle de notation d'un cours d'informatique.

Windows: Tentative échouée d'augmenter la productivité des utilisateurs en rendant les logiciels plus faciles d'utilisation. Le problème est qu'il y est aussi plus facile de changer la tapisserie du fond de l'écran, la forme des icônes, le type de screen-saver, etc... bref, la productivité diminue.

Facilité d'utilisation: Difficulté de programmation.

UNIX: Conglomérat de programmeurs fanatiques qui tentent par tous les moyens d'empêcher les non-programmeurs de toucher à un ordinateur.

MacIntosh: Conglomérat d'utilisateurs qui, en étant tellement exigeants, découragent tout programmeur d'exercer leur art.

Code spaghetti: Caractéristique des programmes datant de la même époque que les westerns du même nom.

C: Drogue. Au premier contact, est désagréable. Mais une fois attrapée la piqûre des pointe(ur)s, vous ne voudrez plus jamais refaire du BASIC, après un tel acide. Votre désir de programmer en C s'incrémentera toujours si bien qu'il saura orienter l'objet de votre vie vers lui.

Pascal: Langage structuré utilisé dans tous les cours d'initiation à l'informatique mais nul part ailleurs.

FORTRAN: Langage non structuré presque acceptable grâce à vingt ans de patches successives. Utilisé partout, sauf dans les cours d'initiation à l'informatique.

_istrchr: Nom de fonction typique d'un programme écrit dans les années 70.

GetFillPolygonIndexTypeContext: Nom de fonction typique d'un programme écrit dans les années 90.

Nombre de lignes de code: Unité de mesure de la longueur d'un programme poussant inutilement les programmeurs à écrire des programmes aérés.

Commentaires: Sans commentaires...

Boucle: Voir boucle.

Appel de procédure: Voir ``Initiation au Pascal'', chapitre 1.

Infini: Valeur qu'un programmeur s'empresse de remplacer par 5, 100, 1000 ou, dans le pire des cas, 1E+38.

Imprimante rapide: Distributrice de papier essuie-tout.

Interface graphique: Obligation pour le programmeur d'écrire le mot ``window'' dix fois par ligne: Window *mywindow=new window(hWnd, windowtype.wnd, WND_WINDOWED_WINDOW).

: Quit, end, exit, bye, logoff, break, ^C, escape, F7 n o, alt-X, ctrl-alt-delete, ctrl-alt-backspace, ^D, ^Z: Signe que ce texte est fini!

Un Noël traditionnel

Les murs en aggloméré cachaient à peine l'isolant rose du chalet de ski qui nous servit de lieu de rencontre pour fêter Noël. L'éclairage néonné de la pièce principale laissa heureusement place à la lueur de la chandelle, une fois le repas arrivé. Mais cela n'atténua pas pour autant l'éclatante lueur de l'enseigne Coka Cola qu'arborait fièrement le comptoir du snack-bar à peine dissimulé par l'entassement de manteaux produit par l'absence de vestiaire et la particulière efficacité de l'isolant rose déjà évoqué plus haut. Les meilleurs succès de Noël de tous les temps jouaient sur la chaîne stéréo apportée sur les lieux pour les égayer (les lieux, pas les gens). Le charme de cette musique venait du rythme lascif de la lambada qui accompagnait ces musiques traditionnelles, le tout joué, bien entendu, avec un orgue électronique de la plus insupportable espèce.

Ah oui, nous en étions au repas, avant que je me sois laissé emporter par mon ardeur poétique. Grand-mère, cette année, en a eu marre de se faire traiter de tous les noms en raison de la remarquable absence de saveur de son repas. Elle fit donc appel à un traiteur (qui en était un bon et non un mal traiteur). Personne ne prit le soin de lui souligner le changement de goût, non pas pour ne pas la choquer, mais simplement en raison de la remarquable absence de goût de la plupart des gens. Le repas s'amorça par le traditionnel bénédicité de Ma-tante, suivit de près de l'invitation de Mon-oncle à prendre la bière qu'il y avait dans le frigidaire (je devrais dire ``réfrigérateur'', mais c'est si payant d'être commandité).

L'on parla. L'on bouffa. L'on fit les deux à la fois. On se comprit quand même, en gros. On avala quand même, en gros morceaux.

Vint le temps de se resservir. Autant l'ambition personnelle de chacun que la potentielle augmentation du taux de cholestérol transparaissait dans le volume de l'assiette de chacun. (Le premier service avait été donné par Grand-mère elle-même, afin d'éviter que Mon-oncle ne se fit exagérément du cholestérol et que la petite nièce ne contracte exagérément une rechute d'anorexie.)

Quittons un peu ce niveau culinaire pour toucher à la partie intellectuelle du repas. Les blagues fusaient. Les gens riaient. D'autres blagues re-fusaient. D'autres refusaient ces blagues qui devenaient de plus en plus scatologiques et de moins en moins eschatologiques (i.e. moins spirituelles). Puis, la séparation inévitable se produisit: les femmes d'un coté, les hommes de l'autre. La couture d'un coté, le hockey de l'autre. Je me trouvai donc seul, n'aimant ni la couture, ni le hockey. Notez que je ne me suis pas ennuyé pour autant: je me suis amusé à imaginer ce que vous lisez en ce moment!

Soudain, le drame survint: une bouteille de vin bien rouge se renversa sur la nappe bien blanche. Vous imaginez déjà ce qui se produisit:

``-il faut mettre du sel...

-non, du poivre...

-je t'avais dis de faire attention!

-peut-être qu'avec du vinaigre...''

Et bien non: la nappe était sauve car elle était confectionnée d'un plastique digne d'un garage en toile, cette affreux appendice qui décore la plupart des maisons urbaines, en hiver.

La fin de la soirée persistait à ne pas vouloir arriver quand j'entendis ma mère formuler une excuse particulièrement subtile pour justifier un départ prématuré. Je n'eus point osé faire de même, mais ce départ me semblait le bienvenu. Une fois bien parti, je me sentis partir et m'endormis. Je ne me réveillai qu'à moitié pour passer du siège de la voiture à mon véritable lit, une fois la maison familiale regagnée. Je me redormis à moitié pour passer la nuit à dormir complètement (puisque je ne m'étais réveillé qu'à moitié). Une pensée philosophique me traversa alors l'esprit: le sommeil est le plus agréable moment de la vie et c'est dommage d'y être justement inconscient. Et dire que j'ai dû rester conscient pendant tout ce Noël...

Histoire d'un saoul sans le sou

Il était une fois un chimiste, spécialiste en solutions, qui avait un problème sans solution: il n'était plus solvable car il ne lui restait que dix sous. Son argent, évidemment, ne s'oxydait pas, mais il se réduisait sans cesse. Potentiellement, des effets très négatifs pouvait lui arriver: sa situation devenait malcenne.

Tout avait commencé lorsqu'il s'était mis à boire. D'abord quelques verres solitaires, puis de plus en plus... au point que ces vers de plus en plus longs provoquèrent une césure dans sa vie. Sa femme le quitta et il se rendit alors compte que, dans l'alcool, le mariage ne restait pas indissoluble.

Alors qu'avant, il se la coulait douce, il entrait maintenant dans une phase plus dure car maintenant, les choses se précipitaient. Il eu d'abord des problèmes de digestion: des gaz peu nobles. Sa calvitie l'attaqua ensuite de front. Il pensa même utiliser l'électrolyse inverse des poils pour remédier à la situation. Peut-être en utilisant du platine comme électrode il parviendrait à devenir blond platine? Et il y avait toujours son problème de solvabilité qui faisait en sorte qu'il ne puisse plus profiter de ses intérêts composés. Et quand un chimiste perd son intérêt pour les composés, il n'est plus dans son élément.

N'étant plus très efficace à son travail, il était à la merci de son patron, qui le remercia d'ailleurs. Et ce n'est pas une mise à pied qui le remettra sur pied! Bref, il souffrait, il vulcanisait même, de rage: je suis gradué (comme le cylindre du même nom), je suis donc en mesure d'accomplir ma tâche, que ma réputation soit tachée ou pas.

Comment allait-il se tirer de cette situation éprouvette (pardon, éprouvante) et qui lui coûtait bécher? (Note de l'auteur: je vous avoue que pour le moment, je n'en sais rien.) Puis soudain, la loi de Murphy intervînt. (La loi de Murphy prévoit que si quelque chose de néfaste a une probabilité nulle de se produire, elle se produira quand même, juste pour nous embêter.) Cette fois-ci, cependant, la loi de Murphy intervînt sur elle-même avant de frapper. Ce que l'on appelle la Providence est en réalité un phénomène de Murphy au second degré.

Enfin bref, la Providence visa dans le mille et lui fit gagner le million. Lorsqu'on a des billets de mille, on n'a plus besoin de vin(gt), et son alcoolisme disparut aussitôt. Cupidon frappa aussi dans le mille de manière à ce que le couple, de nouveau réuni par je ne sais quelle force étrange mais capital(e), puisse se remarier et avoir beaucoup d'enfants pour que ce conte (maintenant approvisionné) se termine dans le même ton que dans lequel il avait commencé (``Il était une fois...'').

Paroliers parodiés

Imaginez ce que chanteraient quelques-unes des grandes célébrités de la chanson si elles passaient une journée avec un étudiant universitaire typique.

Au levé pénible du matin, Francis Cabrel aurait chanté, sur l'air de ``Je l'aime à mourir'':

Moi je dormais bien, Mais voilà qu'aujourd'hui Il ne reste plus rien du sommeil de mes nuits Je vais m'endormir, je vais m'endormir, je vais m'endormir.

En attendant l'autobus, en plein hivers, sur le chemin de l'école, Richard Séguin entonnerait, sur l'air de ``Journée d'Amérique'':

'Y fait froid, Y'é gelé. Y'a ses orteils qui brûlent Au fond de ses bottines. Y'est déjà pas tout nu Y'a même du linge en surplus. C'est vraiment pas ici L'beau temps Pis les vacances au soleil: Un terminus pareil!

En arrivant dans une salle de cours presque vide, le groupe Harmonium aurait fredonné:

Où est passé tout ce monde Qui avaient payé leur scolarité? On s'inscrit à ce cours immonde. On devrait peut-être l'écouter.

À la remise d'un examen particulièrement mal réussi, Félix Leclerc aurait changé les paroles de ``C'était un p'tit bonheur'':

C'était le correcteur Qui m'avait ramassé J'étais tout en pleurs Sur le bord d'échouer

Une fois le vendredi soir venu, Renaud aurait trouvé le moyen de se divertir sur l'air de ``C'est pas l'homme qui prend la mer'':

C'est pas l'homme qui prend la bière, C'est la bière que prend l'homme. Tatataaa! Moi la bière, elle m'a pris, J'me souviens, Plus de rien.

Le quotidien n'affecte bien sûr pas seulement les étudiants du baccalauréat. Combien d'étudiants à la maîtrise ne se sont pas dit un jour, sur un air de Paul Piché:

Y faut changer d'maîtrise mon joooo!

En guise de conclusion, Gilles Vigneau n'aurait pu s'empêcher de vociférer:

La Poly(Note: Abréviation de ``Ecole Polytechnique'' et non de ``polyvalente''.), ce n'est pas la Poly, c'est l'enfer!

Incident au Dieu

Boum!

``-Que fais-tu, mon fils?

-Rien, je jouais avec un pétard.

-Ah, ah, je t'ai pris en déflagrant délit! C'est l'étincelle qui me met le feu aux... poudres. Tu sais que tu es fou. Avec un pareil coup de canon, tu aurais pu te canoniser, sainte!

-Eh! le Père, ne t'éternise pas là-dessus. Mais comment as-tu fais pour savoir que je jouais avec ça ici?

-C'est le voisin d'en dessous qui a vendu la mèche.

-C'est aussi lui qui m'a vendu les pétards...''

Le Père ne put s'empêcher de penser: ``Oh! le petit diable, avec lui, on Satan à tout.''

Le Père poursuivit son sermon:

``-Mais voyons, mon ange, qu'est-ce qui t'a pris et qui t'a appris ça? Tu t'exposes à une sérieuse punition.

-Je m'explose à une sérieuse munition?

-Assez rit. Je me crucifie pour ton bien et c'est tout ce que tu trouves à me répondre?

-En passant, c'est moi qui me crucifie pour toi.

-Ça va, tu as raison. Cependant n'oublie pas que je me suis plié en quatre et séparé en trois pour toi. Mon fils, tu n'es pas Saint d'Esprit.

-Pourtant, Maman m'aurait permis de le faire.

-Ne me parle pas de ta mère Lucie. Je la considérais comme une déesse... jusqu'à temps qu'elle parte avec je ne sais quel Apollon.''

Voyant qu'il n'avait pas trouvé le juste argument, le fils étouffa l'affaire: ``Arrête de t'enfer. Laisse Lucie faire!''

Puis vint le moment d'annoncer le châtiment:

``-J'ai une bonne et une mauvaise nouvelle pour toi. Par laquelle commence-je?

-Par la mauvaise.

-Tu n'auras pas de désert pendant quarante jours. Les fruits: interdits. Tu n'auras pas le choix de manger tes restes. Si tu veux rester au paradis: tes restes!''

``Et la bonne nouvelle?'' de demander le fils, timidement.

``-Ça, ce sera pour plus tard...''

Contrairement à toute espérance de la part du fils, le sermon n'était pas terminé.

``-Il faut jouer à autre chose si tu veux évoluer...

-Je pensais qu'il ne fallait pas parler d'évolution...

-Non bien sûr. Toutefois il faut penser à ton ascension... dans la société. J'espère que tu n'iras quand même pas à l'Ecole Pyrotechnique!

-Pourquoi pas?

-Tu n'étudieras pas cette science tant que t'es au logis!

-Je m'en vais, alors. Je saurai trouver de l'argent pour vivre. Je pêcherai capitaux ailleurs.

-Je ne suis plus à la hauteur pour t'élever. Je ne peux plus rien faire pour toi sinon que de te renier et de te rayer de mon testament.

-J'en écrirai un deuxième, juste pour moi!''

Et Dieu, longtemps, bouddha. Curieusement, le concept d'explosion, plus que son propre fils, l'avait ébranlé: cela lui avait donné une idée pour sa toute nouvelle création. La recette était simple: Mettre ensemble un grand nombre de particules. ``Elémentaire!'', se dit-il. Faire exploser le tout. ``Ça n'a rien détonnant!'' Laisser reposer quelques milliards d'années. ``Pas de problème, j'ai une éternité devant moi!''

C'est ainsi que le Big-Bang prit forme. Puis Dieu, patient, scruta le résultat. ``Cinq milliards d'années et toujours rien. Dix milliards d'années: j'attends encore cinq milliards d'années et j'arrête.''

Et c'est à ce moment que son fils le surprit:

``-Ah, ah, toi aussi tu joues avec le feu!

-Entre ta récréation et ma création, il y a un monde! Et puis regarde, de toute façon, ça ne donne rien: même après quinze milliards d'années, il y a toujours 99,9% des débris qui sont dans le désordre le plus complet. Alors zou!, assez perdu de temps, on ramasse le tout et on n'en parle plus.''

Comment aurait-il pu voir que sur un des minuscules débris, la vie avait apparu? La vie, il ne la vit point. Si seulement il lui avait demandé son avis, à la vie. Elle aurait sûrement dit: ``prière de m'écouter.''

La malchance a-t-elle plus de chances d'arriver que la chance?

Nous connaissons tous la loi de Murphy qui prédit que si quelque chose d'indésirable à une probabilité nulle de se produire, elle se produira quand même. Cette loi fut découverte empiriquement (d'ailleurs elle empire à chaque fois qu'on la constate) et il ne lui manque qu'un brin de formalisme théorique pour la promouvoir au rang de véritable loi scientifique.

Commençons par décrire le champ de Murphy, noté ``mu'' (plutôt que ``M'', pour faire plus sérieux). Il est généré par une particule élémentaire, le murphino, totalement indétectable (en vertu de la loi de Murphy elle-même). Les murphinos sont partout: il y en a des milliards par mm^3. Ils pourraient même résoudre l'énigme de la masse manquante de l'univers.

En plus de son effet sur les humains, le champ de Murphy est responsable de la plupart des phénomènes étranges de la physique des particules. Pourquoi ne peut-on pas connaître à la fois la quantité de mouvement et la position d'une particule avec toute la précision que l'on veut? Pourquoi une même entité est-elle à la fois onde et particule? Pourquoi est-il impossible de rassembler les quatre forces de l'univers en une seule? Il fallait bien que la loi de Murphy embête aussi les scientifiques...

On voit qu'il suffit d'une seule nouvelle particule pour expliquer tous les phénomènes physiques possibles et imaginables. Si un phénomène suit une loi connue, pas de problème. Et si le phénomène ne suit pas la loi en question, eh bien, c'est l'interaction de Murphy qui en est responsable.

Il est tentant d'essayer de contredire la loi de Murphy par l'objection suivante: ``En principe, la malchance totale de l'univers (notée aussi ``mu'' pour nous compliquer la vie) est constante: le malheur des uns fait le bonheur des autres.'' C'est que la malchance tend à se rassembler chez les être conscients et la chance, dans la matière inerte, sous une forme peu disponible. On appelle anthropie (contraction du mot anthropophobie) cette tendance qu'a la chance de s'enfuir des hommes.

Ainsi, si vous frappez sur un mur, vous aurez mal; le mur, non. De même, dans toute autre situation où un être conscient et un être non conscient interagissent, l'être conscient subira toujours un maximum de désagrément. La loi de Murphy est donc un critère universel qui permet de définir ce qu'est la conscience.

Si la plupart des humains ont une tendance similaire à accumuler la malchance, il existe des gens chez qui le phénomène est particulièrement prononcé: on les appelle des newfies. La nomenclature varie cependant selon le pays: les Français les appellent des Belges, les Belges des Suisses, les Suisses des Français, etc... Que voulez-vous: nul n'est newfie dans son pays.

Je me propose maintenant d'éclaircir certains paradoxes qui se présentent lors de l'étude de la loi de Murphy.

Considérons le cas de deux personnes qui appliquent pour le même emploi. Pour chacune de ces personnes, la loi de Murphy devrait faire en sorte que cette personne n'obtienne pas l'emploi. Pourtant, une de ces deux personnes obtiendra nécessairement l'emploi et pour elle, la loi de Murphy sera violée.

Une erreur s'est glissée dans ce raisonnement: nous avons fixé arbitrairement une mise en situation. Or, la loi de Murphy s'applique également lors du choix des conditions initiales. Il est impossible que seulement deux personnes ne postulent: quand un poste s'ouvre, ce sont 100 personnes qui se précipitent pour l'obtenir. Et de ces 100 personnes, 99 seront frustrées alors qu'une seule sera heureuse. La loi de Murphy aura donc malgré tout maximisé la frustration totale de l'univers.

Mais, me direz vous, pour la personne qui a eu l'emploi, la loi de Murphy aura tout de même été violée. Ne vous inquiétez pas, elle le perdra bientôt, son emploi!

Voici un autre exemple qui montre l'emprise de la loi de Murphy sur la fatalité. Imaginez que vous êtes à la recherche d'un objet. Avez-vous remarqué que c'est toujours au dernier endroit où vous regardez que vous le trouvez? Il semble facile de contourner la loi de Murphy dans ce cas: il suffit de continuer à chercher, même après avoir trouvé l'objet. On ne trouverait alors plus l'objet au dernier endroit où on a cherché et la fatidique loi serait violée. On aura cependant encore perdu plus de temps. Donc, cette loi de la frustration universelle est vraiment inévitable.

Et si jamais on trouve l'objet au premier endroit où on le cherche, n'a-t-on pas violé la loi de Murphy? Non, puisque si vous le trouvez au premier endroit qui vous vient à l'esprit, c'est que vous ne le cherchiez pas: vous saviez où il était.

En conclusion, grâce à la loi de Murphy, on peut définir la notion de ``conscience'', expliquer l'incroyable constance de la malchance humaine et, accessoirement, résoudre tous les problèmes de la physique actuelle.

La cour, c'est long...

Les poursuites, de nos jours, ça court les rues. Ça court aussi dans les cours. Avant, les criminels s'enfuyaient à la course et se faisaient poursuivre dans la rue. Ils s'y faisaient arrêter pour ensuite se faire traîner à la cour pour qu'on y poursuive la poursuite.

Maintenant, il n'y a pas seulement ceux qui se font arrêter qui se font poursuivre. Il y en a qui se font poursuivre et qui n'ont pas couru après! C'est le cas des poursuites en dommages et intérêts. On les appelle ainsi parce que c'est dommage pour un des partis et tout un intérêt pour l'autre.

Ces procédures sont toutefois extrêmement complexes. On ne choisit pas toujours la manière la plus judicieuse de procéder, mais toujours la plus judiciaire. Première complication: le commun des mortels ne parle pas le même langage que les hommes de loi. C'est pourquoi la plainte doit d'abord être traduite en justice. En français, la plainte ne fait que quelques pages, tandis qu'en justice, elle en prend vingt. C'est que les juristes sont prudents, jurisprudence oblige.

Deuxième complication: les gens de la cour doivent suivre des règles vestimentaires strictes. Chacun doit s'habiller en bon uniforme. Les lois étant fort compliquées, les avocats et les juges risquent de s'arracher les cheveux. C'est pourquoi la perruque fut longtemps de rigueur. Maintenant que la mode est passée, on se retrouve avec 90% des hommes de loi chauves. Quand aux femmes de loi, elles ont l'obligation quasi constitutionnelle de porter la jupe. Encore heureux que le voile ne soit pas incorporé à la tenue de travail: le voile incorporatif a déjà été levé.

Et tout ce beau monde joue le jeu: le jeu de l'oie. Les juges pestent contre le nouveau code si vil. Et les avocats font valoir le fruit (l'avocat) de leur travail. Ils essaient d'être des avocats de l'enfer, des avocats du diable. Parfois ils tombent dans des impasses, mais il faut continuer coûte que coûte. Et ça coûte, et ça coûte... Les procédures ne sont coupées qu'une fois le coupable trouvé.

Et alors le parti perdant crie très fort son mécontentement. Et pour être sûr d'être entendu, il fait appel. Il ne sait pas si ça marchera: il essaie, juste pourvoi. Et le ton monte, monte. La cour aussi doit monter. Le juge crie: ``la cour est levée!'' et on passe en cour supérieure. C'est ainsi que les causes occupent autant les cours suprêmes que les basses-cours (on distingue les cours suprêmes des basses-cours par le fait que les poulets y sont plus rares). Il y a tellement de causes en cours en cour que même après des années sur la même cause, on cause toujours, sans qu'il n'y ait d'effet! On cherche encore le fameux lien de causalité. Mais une fois la cause alitée, l'affaire dort.

Et les jurés, ces gens comme vous et moi, ils essaient d'y comprendre quelque chose pour décider du sort de l'accusé au pied du mur. Et ça les fait jurer...

Désaccord majeur

Ayant pris une grosse brosse, il se dit ``ça me donne mal au cheveux... la prochaine fois, je prendrai un peigne!''. Et sa tête ivre continuait de divaguer: ``Je deviens spirituel quand je prends des spiritueux''. Mais il devait encore arriver à rentrer chez lui, alors que la musique résonnait encore dans sa tête et que sa tête, elle, ne raisonnait plus du tout.

Ayant perdu sa clef sur le sol, ce fat dût défoncer l'armature de la port(é)e. Mais en faisant cela, il se retrouva sur le do, là, sur le sol ciré. Il eut fallu qu'il mesure la portée de cet acte: sa femme fut prise d'une peur blues, tandis qu'elle jazzait au téléphone dans la pièce d'à coté. Le mari s'informa: ``T'es bé mol, je t'ai fait peur?''. ``Dièse-moi pas'', dit-elle, d'un rhume agonisant. ``Hé, ma noire, pourquoi tu me regardes croche de même'', s'écria-t-il, tout en subissant la judicieuse remarque de sa femme: ``Si j'étais ronde comme toi, je te verrais double croche...''.

Inutile de préciser qu'ils s'accordaient mal ensemble: c'était un battement continuel. Et vous devriez voir leurs figures, lors de ces interférences! Et tranquillement, le ton montait... jusqu'à donner une note tragique à la situation.

Le poissonnier d'en face, ayant remarqué que le thon a varié, pêcha par excès d'altruite, et se mêla à l'affaire. Pour attirer l'attention, il simula une quinte de toux.

``-É-quarte toi'', cria la femme, ``je ne veux pas de tierce personne dans cette histoire. -Soit, je m'en vais, mais laissez-moi au moins dormir.

-Une seconde, dit Octave (c'était le nom du mari), reste ici, sinon je vais manger un coup.

-Bah, c'est ton problème: après avoir bu un coup, tu peux t'attendre à en manger un!''.

Sur ces mots, le poissonnier les laissa à leurs déboires (et sur leur faim).

À ce moment-ci, l'auteur de cette histoire a plusieurs choix pour la terminer. Il peut en faire:

un drame (l'homme se met à battre sa femme);

une comédie (la femme se met à battre son mari);

un roman savon (ils s'embrassent et tout finit bien);

un conte (tout finit tellement bien qu'ils ont beaucoup d'enfants);

une tragédie grecque (Dieu intervient et part avec la femme, qu'il trouve de son goût);

un télé-roman québécois (ils s'assoient et prennent un café (tout en discutant de banalités));

un télé-roman américain (ils sortent leurs Jaguar de leur garage triple, passent à côté de la piscine, vont dans un restaurant français où l'on parle anglais, prennent un whisky et... discutent des mêmes banalités);

un texte d'Axel van de Walle (ils se mettent à boire tout les deux et commencent à faire des jeux de mots que personne ne comprend à jeun et que personne ne comprend sous l'effet de l'alcool non plus, mais dont on rit au moins).

Informatique informelle

Une formation en informatique reste informe si on ne vous informe de ces quelques définitions formées d'informelles informations.

Souris: dispositif ingénieux permettant simultanément de nuire à ceux qui tapent vite à la machine et de permettre à ceux qui n'utilisaient pas l'ordinateur de le faire, nuisant ainsi encore plus à ceux qui tapent vite.

Inflation: processus inévitable qui fait en sorte que le nombre de disquette nécessaire pour installer la nouvelle version d'un logiciel double à chaque année, même si la capacité des disquette double elle aussi. La vitesse de l'ordinateur doit aussi doubler à chaque année pour pouvoir exécuter ladite version du logiciel sans doubler la consommation de café de l'utilisateur.

``Basic extinct'': Film mettant en vedette un langage informatique. Il meurt à la fin.

Serveur (de réseau): S'il travaillait dans un restaurant son patron lui dirait: ``ne reste pas planté là à ne rien faire''.

Fenêtre: Concept ingénieux visant à sous-utiliser la surface de l'écran de manière à stimuler la vente de moniteurs de plus en plus gros.

Numéro de version: Quantité proportionnelle à la complexité d'un programme et/ou au nombre de bugs présents dans la première version.

Icone: Future cause de l'illettrisme.

Manuel d'utilisation: (Voir: non utilisation du manuel.)

Commande UNIX: Phonème de deux consonnes, généralement imprononçable.

Commande par souris: Phonème du langage des signes, généralement imprononçable.

Virtuel: Mot virtuellement partout présent, voulant dire virtuellement n'importe quoi, mais se vendant réellement bien.

Standard: Ce que toutes les compagnies devraient suivre. C'est ce qu'elles ont fait: elles suivent toutes leur propre standard.

Assembleur: Dernière étape avant de commencer à désassembler son ordinateur.

Architecture parallèle: Type d'architecture ne se fabriquant pas encore en série.

Ordinateur: Dispositif permettant d'économiser sur une seule chose: le chauffage.

Électronique digitale: Technologie fondée sur l'utilisation des doigts (pour enfoncer des touches).

Goto: Voir 1979.

L'Idole

Je suis un être désiré par tous... et j'en ai marre, depuis le temps que ça dure.

Au début, j'étais sûr qu l'on m'aimait pour mon argent. Or, un jour, je l'ai perdu cet argent. Mais j'ai gardé toutes mes valeurs humaines: c'est imprimé sur ma face. Ces valeurs ne s'en iront jamais, ce sont des valeurs immobiles hier, immobiles demain. C'est pourquoi les gens ont gardé tout leur intérêt pour moi.

On m'admire, comme si j'étais un comte célèbre et noble. J'ai compris: on m'aime pour mes papiers: pour mon image noble, plutôt que pour mon métal noble.

Même à l'épicerie, on accourt vers moi, si bien que je dois continuellement m'enfuir. Et ce n'est pas monnaie courante de voir un comte courant en faisant son marché. Bref, on court, on saute, on vole même, pour m'avoir.

Je suis partout reconnu: on me regarde sans cesse. Même quand je suis rond et méconnaissable, on me regarde de billet. Parfois, pour me cacher, je me donne un air américain. Hélas, ça ne fait qu'augmenter mon succès. Alors j'essaie toutes sortes d'habits pour me dissimuler: inutile de dire que mon taux de change est très élevé et que mes mesures protectionnistes ne sont pas efficaces.

Bien que l'on me désire ardemment, cela ne veut pas dire que l'on veuille me garder. Ainsi, à peine ai-je trouvé l'âme soeur, qu'elle veut déjà se débarrasser de mon être et m'échanger pour un bien meilleur. Inutile de dire que je n'aime pas ce truc (ni ce troc). D'autre fois, on a honte de sortir avec moi et on me cache. Je blanchis de peur à cette idée. Vraiment, on se paie ma tête.

À peine me suis-je tiré de ces situations d'un ridicule bien consommé, que je retrouve à nouveau la gloire: l'on est suspendu à mes lèvres, l'on prend tout ce que je dis pour du cash. Dès que je m'exprime, je m'imprime dans la mémoire des gens. Toutes mes conférences sont à guichet fermé, c'est automatique. Je suis presque partout en même temps, comme Dieu. Je suis seulement un peu plus matériel, voire même matérialiste.

Mais il y a trop d'action dans ma vie, cela me donne trop d'obligations, comme sur le marché boursier. La bourse ou ma vie, c'est la même chose, tellement je suis occupé. Je suis en pleine crise et comique n'est pas ma situation. Je vais craquer, faire un krach et tout ce que vous voudrez.

Je veux rester seul chez moi, en bas. Je veux retrouver les fonds de caves tranquilles que j'avais perdus de vue. Laissez-moi seul à mes fonds, même sans provisions. Epargnez-moi, un peu, c'est capital pour moi. Je veux être seul dans ma tour d'ivoire à me faire de la corne sous les pieds en tournant un rond, en pensant, afin d'ivoire plus clair.

Ma seule consolation, je vous l'ai déjà dite: on ne m'aime pas pour mes dollars, au moins. C'est normal, je suis le dollar!

Comment ne pas (ap)prendre le champ en chantant

S'il est désirable d'avoir du talent pour se lancer dans la chanson, cela n'en est pas pour autant essentiel. L'argent est un excellent substitut. Bref, il ne faut pas être déjà dans le trou pour percer. Et une fois lancé, les retombées sont intéressantes: il suffit de tomber au bon moment.

Il existe deux méthodes pour percer. Ou bien vous vous astreignez à jouer dix ans dans les bars pour vous faire un nom, ou bien vous demandez à un producteur de vous en faire un. Dans ce deuxième cas, votre succès sera peut-être de courte durée, mais rien ne vous empêche d'effectuer un retour sur scène dans vingt ans, lorsque l'industrie du disque sera encore plus lucrative qu'aujourd'hui et que votre nom sera devenu un mythe du passé lointain. En parlant de nom, votre nom d'artiste doit être le plus insolite possible: ça vous fera au moins une chose à raconter en entrevue.

Ayant tout dépensé à la promotion, il ne vous restera probablement plus d'argent pour payer des musiciens, d'où l'utilité des instruments électroniques qui, malgré un fort coût d'achat, ne demandent pas d'augmentation de salaire par la suite. Ces instruments ont en plus l'avantage de ne pas développer de complexe d'infériorité vis-à-vis le chanteur, lui qui récolte habituellement le plus de succès (et on se demande souvent pourquoi).

Si à ce moment vous vous rendez compte que vous n'avez pas de voix, de multiples effets spéciaux électroniques vous ouvriront quand même la voie. Autre alternative: trouvez au moins une note que vous êtes capable de chanter et n'utilisez que celle-là. Après tout, même en excluant le rap, 50% des chanteurs populaires chantent la même note 50% du temps. Si vous n'arrivez quand même pas à chanter, vous pouvez toujours engager quelqu'un pour chanter à votre place: l'important est d'être beau et de savoir faire de la post-synchronisation. Si, à l'opposé, vous êtes laid, vous pouvez engager un mannequin et vous, chanter. Et si, par un malheureux hasard, vous êtes laid et incapable de chanter, vous pouvez engager les deux et on vous appellera dorénavant ``producteur''.

Bref, il y a de multiples manières d'arriver au succès quelle que soit la nature de votre absence de talent. Une fois le succès obtenu, il ne vous restera qu'un obstacle à affronter: les humoristes, qui ne demandent pas mieux que d'avoir une nouvelle personnalité comme cible. Et en tant que personne alitée, vous ne dormirez jamais sur vos deux oreilles.

Ré-Création informatique

Le premier jour, Dieu créa l'ROM. Et pour ne pas que ce MEG soit tout seul, il inventa la RAM, très estatique, qui le rendrait plus dynamique. Mais l'ROM avait parfois de la difficulté à la suivre: ``tu te cache(s)'', lui disait-il souvent, ``... et plus vite même que mon ombre, la shadow ROM''.

Pour lui faire connaître les plaisirs de la vie, la RAM lui donna une Apple. Il souris, en lui disant: ``Je t'admire, comme une icône''. Tandis que l'ROM contemplait les courbes de la RAM, Dieu leur dit: ``je permets que vous bézier. Mais n'inscrivez pas cela dans des livres, ou ils seront proscripts, comme ce fameux livre qui parle du spline (Les Fleurs du mal de Baudelaire).''

Dieu annonça ensuite à tous les logiciels de la terre: ``allez, et multipliez-vous.'' ``Oups!'', se dit-il, ``je n'aurais pas dû dire ça!''. Puis il se rendit à l'évidence: ``Bah, je n'ai qu'à inventer les virus: ce n'est pas la première fois que je pense à ce truc.''

Ensuite, Dieu laissa les choses aller, pour quelques temps. Il avait toutefois surestimé la bonté de l'humanité: elle avait eu le temps d'instaurer plein de systèmes d'exploitation qui se servaient d'unités centrales de maltraitement pour éxécuter les programmes.

Il était temps que Dieu intervienne: il divulgua les dix COMMAND.COM (nous n'en sommes encore qu'au sixième, mais...):

Sois convivial avec le prochain. Conduis-toi bien (grâce au driver approprié). Prends de bonnes résolutions, comme Hercule l'a fait. Tu ne te détourneras pas vers LABEL de ton voisin (même si elle a des belles boucles). Tu ne taperas pas ``format c:'', etc.

Et n'oubliez pas que, tout comme dans une mémoire-pile, les derniers seront les premiers, au logi-ciel.

De nombreux fidèles se chargèrent de répandre la bonne nouvelle. Ils distribuèrent des tracks dans tout le secteur. Ils prièrent la vierge floppy (au teint immaculé et fort mat) de les aider dans leur sauvegarde de l'âme. Ils furent impressionnés par l'indifférence des gens: ``mais, vous vous en fichier, ma parole''. Bref, l'effet fut mal calculé, et ce fut un méga-flop.

Rien à faire, Dieu devait à nouveau intervenir: il envoya son propre fils, à ses RISC, pour accélérer l'instruction de ses fidèles. Ce fils rassembla tout le monde à la BAS(IL)IC (il était un bon assembleur), pour leur parler. Il fut cependant mal interprété (comme tout BASIC qui se respecte) car il s'exprimait toujours au second degré (en paraboles) plutôt que d'y allez adroitement en ligne droite.

Tandis qu'il leur parlait du cierge Pascal (en se disant qu'il brûlait tellement mal qu'il aurait dû prendre un cierge Turbo Pascal, Borland beaucoup mieux), il s'arrêta. En voyant que personne ne l'écoutait, il se planta devant la foule (ce n'était pas au programme), muet. On entendait les bugs voler. Sa colère l'avait FORTRANsfiguré.

``C'en est trop! Je retourne chez ma mère... ee, chez mon père'', s'écria-t-il, ``vous n'avez pas cliqué avec l'Apple, ni avec les dix COMMAND.COM. Vous serez donc condamnés à communiquer avec le logi-ciel par le pire des interfaces utilisateurs: la prière''.

Géologue en monologue

Pendant toute ma vie, j'ai vécu dans le rush... et dans la roche.

Au primaire, j'ai commencé ma formation. Cette formation, c'était une montagne pour moi. Au secondaire, j'avais le front plissé et le visage errodé de mon incompréhension profonde. Inutile de vous dire que je n'ai ensuite jamais été au terciaire, ni au quaternaire, d'ailleurs.

Ça a tout pris pour que j'évolue, que je sorte des jupes de la mer pour devenir enfin terre à terre et marcher de mes propres jambes. (Ce n'est que plusieurs millions d'années plus tard que j'ai su voler de mes propres ailes.) Heureusement, mon nom (Pierre, évidemment) me destinait un meilleur sort: une carrière de pierre, la géologie. J'ai attaqué le noyau de mes problèmes manteau pour sortir de mes croûtes. Depuis lors, je dresse mon épine dorsale, même si ça me pèle! Je dresse ma dorsale, même si ça m'archi-pèle. Ça n'en prenait pas plus pour faire irruption sur le marché du travail.

Puis j'ai rencontré cette en-glaise, fort argile, ce qui est normal puisqu'elle venait d'une terre très cultivée. L'Angleterre n'est pas une terre arabe me direz-vous, mais peu-importe. Cette anglaise était cependant très prude: un simple affleurement et, pfouit!, enfouie qu'elle était, cette pierre précieuse. ``Shiste'', me disais-je alors, ``faut-il se résigner à vivre un amour plaque tectonique?''.

Notre géologue essayait par tous les moyens de la séduire. De nombreuses fois, il s'inclinal devant elle mais ça ne lui fit pas un pli. Il y avait vraiment une faille dans sa méthode, mais heureusement il avait aussi de la veine!

-Ah, si l'humanité est une roche sédimentaire, nous faisons vraiment partie de la même couche.

-Comment, tu veux qu'ensemble l'on couche?

-Non, je ne fais pas alluvion au lit (de la rivière)...

-Sédi-menteur!

-Ne pépite pas tant, laisse-toi reposer, car au fond se déposera l'or (poétique, non?).

-Décante! (Décampe?)

-Si je devais m'enfouir, ça me minerai mon moral. Tu es celle que gemme.

-Et bien, filon ensemble...

Lorsque deux jeunes gens continents se rencontrent et que la subduction opère aussi vite, c'est qu'il aura rapprochement rapide des continents et que l'amour plaque tectonique ne durera pas très longtemps. Bon, je passe outre le bloc erratique du texte: ce bloc serait déplacé et j'aurais peur que vous vous glacier. Retrouvons donc notre géologue dix ans plus tard, ce qui est très court, géologiquement parlant. Il est maintenant dirigeant d'un grand conglomérat de compagnies et peut, à son grès, se consacrer à ses loisirs favoris.

J'ai ainsi amené ma Pierre au sommet de la montagne. Je ne pensais pas, cependant, que le retour au bas de la montagne serait si rapide et si décisif (ou de Sisyphe). Je devais mourir, peu après, d'une pierre... au rein.

Cultures Bactériennes

Il arrive assez souvent dans le monde que deux cultures ne se digèrent pas, autant au sens propre qu'au sens figuré. En effet, certains se battent pour leur foie (bref, il se font de la bile pour leur foie). D'autres cherchent à ajouter une appendice à leur pays, n'hésitant pas à utiliser des véhicules biliaire. Et d'autres, enfin (en faim?), se battent pour leur langue, et dieu sait si ça fait une belle luette qu'ils le font.

Le tout se complique quand un pays a à sa tête un roi qui ne fait qu'à sa tête, qu'il a d'ailleurs assez enflée. Mentionnons l'empereur Mucus, à qui les épices montèrent au nez au point d'en devenir fort morveux, d'où son nom. Rappelons qu'il a su, duodénum-minations, passer d'un destin grêle à intestin ascendant: celui d'empereur.

Une fois porte-parole du pays, un tel dictateur peut se faire construire un palais (pas laid du tout) d'où il ne bouche pas, et dent lequel il goûte à tous les plaisirs de la vie. Et à celui qui lèvre la voix, il n'a qu'à crier ``en joue!'' pour qu'il avale sa salive: il réussit de cette manière à faire avaler n'importe quoi à la population.

Mais ce tyroïde veut que sont corps politique croisse et pour cela, il doit manger le pays voisin, souvent estomaqué d'une telle attaque soudaine. Parfois l'attaque est plus insidieuse cependant: il utilise les glandes agences sécrètes pour infiltrer les organismes vitaux du corps politique étranger. Il y a parfois des défenses immilitaires contre de tels intrus et l'usage de la force des anti-corps politiques reste alors son seul choix.

Le tout se complique aussi lorsque le pays abrite d'anciens colons: intestin plus tragique les attend alors. Indigeste et colon, se font alors chier mutuellement (si vous me passez l'expression), ce qui dégénère en d'interminables luttes intestinales. De nombreux exemples en restent encore dans les annales.

Et les cultures se battent, comme si elles étaient des cultures plus bactériennes qu'humaines. L'Histoire est remplie de ces batailles dont l'issue habituelle montre, hélas, qu'une culture étrangère, comme un aliment, semble inévitablement destinée à être assimilée ou renvoyée.

Les prédic-acteurs

Les gens, de nos jours, ne sont plus croyants... c'est incroyable. Il n'ont la foi qu'une fois par an (à Noël). Il y a quelques années, je faisais du porte à porte pour faire adhérer les gens à ma toute nouvelle religion. Mais il n'adhéraient pas, ils me disaient ``décolle!''. Or un jour, je suis tombé sur un américain... dans tous ses États. Il m'a dit: ``vous me dites de louer Dieu, ça ne serait pas plus économique de l'acheter?''. Pour moi qui était déjà un illuminé ce flash m'éblouit complètement. À nous deux, nous avons réalisé un libre-échange d'idées... et cela a abouti à une toute nouvelle religion. Je devais toucher les gens au plus profond d'eux-mêmes (au portefeuille, par exemple). Maintenant, j'ai compris: dès que je parle de foie, ça rate! In testin tragique! Et quand j'annonce le coût des dons, je me fait dire: ``coudonc!'' Alors maintenant, je précise que ``ces dons sont déductibles d'impôt. Plus que vous me donnez, plus vous sauvez... et plus vous serez sauvés. Après tout, un petit millier de dollars pour assurer toute votre éternité, ça ne revient pas cher de l'heure!'' Vous allez me demander ce que je fais avec les dons? Je me charge moi-même de leur gestion. Je dis ``gestion'' parce que les dons sont un peu mangés. Bref, grâce à ce coup de marketing, de plus en plus de gens croient en ma religion. Et plus la population croit en ma religion, plus ma religion croît en popularité. Évidemment, ça m'oblige à faire des apparitions... en public. Des apparitions, enfin, façon de parler, je ne suis pas capable de descendre du ciel. Je ne sais pas comment il fait Lui... Non mais j'ai quand même des pouvoirs: croyez-le ou non, je suis un médium. J'ai des pouvoirs médiatiques. Je ne suis pas un médium extraordinaire: un médium moyen seulement. Quand j'essaie de faire plier une cuillère, ça ne lui fait pas un pli. Je vous avoue que c'est décourageant: un médium qui rate son coup est un médium bien cuit. C'est un proverbe aztèque (à steak?). Mes disciples ne viennent pas vraiment me voir pour mes pouvoirs, mais surtout pour mes sermons. Voyez-vous, j'ai modernisé la religion un petit peu. Par exemple, le monde n'a pas été créé en six jours... Mais bien en quarante heures, pas plus: tout le monde a droit à des heures de travail raisonnables. Devant cette foule hystérique, je présente mes volontés les plus profondes: ``il faut empêcher Péladeau de prendre le contrôle du livret ``Prions en Église''. Même s'il y arrivait, je créerais une autre revue, pour contrer son attaque, qui s'appellerait, non pas le ``Lundi'', mais le ``Dimanche''.'' Mes messages ne passent pas toujours, car il y a parfois des sceptiques dans la salle. Mais je crois qu'au fond d'eux-mêmes ce sont des faux sceptiques. Alors j'aimerais dire, comme on dit en anglais: ``payez attention''. En français, on est obligé de dire seulement ``prêter une oreille attentive''... quoique le fait que ce soit prêté peut peut-être augmenter l'intérêt. En tout cas, je n'arrive pas toujours à obtenir l'effet... escompté. (J'avais d'autres jeux de mots dans la même banque, mais je vous les... épargne.) L'autre jour il y en a un qui m'a dit: ``Vous nous dites que c'est pour notre bénéfice qu'il faut être bon en actions, et en intentions, mais on voit bien que votre intention c'est de faire des bénéfices avec des bonds et des actions.'' J'ai répondu simplement: ``Comme c'est spirituel! Tu veux faire de l'esprit? Tu veux faire ton disciple indiscipliné?'' Mais à ce moment, mon inspiration expirait... j'ai donc conclu rapidement ma réponse: ``Non, non, ce n'est pas parce que je t'impose les mains qu'il faut me taxer d'imposteur.'' Il n'était toujours pas convaincu, c'était un cas désespéré. Alors, pour empêcher que ce genre de problème ne se reproduise, je me suis adressé directement à toute la foule: ``Oui, je sais, il y a des rumeurs qui courent à mon sujet: ne me faites pas marcher, je veux les rattraper.'' Or il s'est avéré que ma foule de brebis ne comportait pas trop de moutons noirs. Au moins, mes fidèles, eux, ne souilleront pas ma réputation comme le font injustement les médias dans l'immédiat. Et j'espère que, pour qu'ils conservent la foi en moi, je n'aurai qu'à leur dire: ``Allez en paix... yant à la sortie.''

Songes songés

Une nuit qui nuisait à mon sommeil me permit de philosopher un peu. Je vous présente le fruit de cet état végétatif. Cela permettra peut-être à ceux qui doivent quotidiennement trouver des pensées du jour de puiser leurs sources ailleurs que dans La Fontaine.

On peut généralement pallier à la blancheur d'une nuit par la noirceur d'un café.

Dans le but d'uniformiser l'usure des claviers, les ingénieurs se sont sentis obligés d'utiliser la lettre k à toutes les sauces. Dans le but de contrecarrer ce manque d'imagination, ils décidèrent par la suite d'utiliser l'alphabet grec en entier (alphabet qui a la particularité de ne pas se trouver sur un clavier, ce qui règle le problème de l'usure des claviers une fois pour toutes).

L'ingénieur aime bien les relations du type y=ax+b+k, où y=ax+b est la relation théorique et k un facteur empirique donné dans les tables de tout bon handbook d'ingénierie.

La qualité d'un repas de cafétéria peut se mesurer par la quantité de sel qu'il faut y ajouter pour le rendre acceptable (procédé similaire au titrage d'une base par un acide).

S'instruire, c'est apprendre que l'on ne sait pas grand-chose, après tout. C'est pourquoi, pendant un cours, ce sont toujours ceux qui en savent le plus qui posent le plus de questions.

Les seules fonctions intégrables à coup sûr sont celles obtenues à la suite d'une dérivation.

La principale utilité de la notation matricielle est de permettre à un professeur de poser des questions très courtes tout en demandant une énorme quantité de calcul.

Une classe reste muette d'incompréhension devant une question du professeur. Ce dernier s'écrie donc: ``Ne répondez pas tous en même temps, ça fait des interférences destructives.''

Réflexion sur le capitalisme: Dans un pays où tout le monde fait ses courses, c'est une économie de marcher.

Les gens qui en sont à leur cinquième mariage ne demandent plus: ``Habitez-vous chez vos parents?'', mais plutôt: ``Vos enfants habitent-ils chez vous?''

Avec l'intensité du volume sonore de la musique dans les bars, on ne peut plus réciter des poèmes pour séduire l'âme soeur. On doit alors le faire en langage des sourds et muets. Cela a donné naissance à la danse rap.

Lorsqu'on me demande si j'ai pensé à écrire un livre, je reponds: ``Mais voyons, des textes comme ça, se serait fou à relier!''

À répliquer à quelqu'un qui se trompe souvent: ``Si c'est en faisant des erreurs que l'on apprend, tu dois en savoir des choses.''

Si quelqu'un vous fait remarquer: ``C'est un coup de chance, ton histoire!'', remettez les choses à leur place en usant de votre érudition: ``Pardon monsieur, c'est un concours de circonstances, et par le fait même, c'est une circonstance qui a gagné.''

``Errare humanum est'' signifie ``L'homme erre vers l'est''. C'est pourquoi les newfies sont ce qu'ils sont.

J'ai découvert le sens de l'univers: il est à l'envers.

La taxe nous permet de distinguer les drogues légales des drogues illégales: les premières sont taxées, les autres, non.

Je suis un incompris: on ne me comprend tellement pas que je suis un rébus pour la société.

C'est ainsi qu'en réfléchissant dans le noir on arrive à faire la lumière sur certaines choses...

Un stade pas très avancé

Le stade olympique de Montréal, depuis son ouverture, jusqu'à sa couverture, a beaucoup fait parler de lui. S'il eut été humain, il eut été tout rouge. Ne l'étant pas, il est t'ouvert. Et il est resté longtemps ouvert: depuis l'époque antédiluvienne à laquelle il a été construit, beaucoup d'eau a coulé... dans le stade.

Ce pauvre stade est toujours resté à un stade... pas très avancé. Les compagnies d'assurances ont toujours hésité à assurer cette structure inachevée et fragile: c'est pourquoi le stade n'est pas couvert.

Le stade a quand même eu la couverture des médias. Grâce à cela, on connaît la toile de fond de l'histoire. Alors on fut forcé de sortir cette fameuse toile de ses toiles d'araignées et de la poser comme il se toit. Nous avons alors enfin pu inaugurer l'ouverture du stade fermé.

Toutefois, cette pauvre toile allait subir un drame... déchirant. Et comme cela s'est produit à plusieurs reprises, on a du la repriser à plusieurs reprises, pour empêcher qu'elle se rebrise. Le sort de cette toile toujours brisée n'est pas très prisé.

Il y a peut-être espoir d'améliorer les choses, si l'Orchestre Symphonique de Montréal donnait un concert au stade. Imaginez: Charles Dutoit, au stade! C'est le spécialiste qu'il faut.

Enfin, le mal est fait et le mieux qu'on puisse faire maintenant, c'est d'espérer que cela ne se reproduise plus. On n'en est pas arrivé au stade de la reproduction quand même! Qu'un monument ne souffre plus jamais d'une erreur aussi... monumentale. Qu'un tel précédent ne crée pas de suivant. On peut quand même se dire, pour s'encourager: jamais deux sans toit!

Sacré sac!

Fait étrange, on trouva un jour un jeune garçon parlant à son sac d'école: ``je ne suis plus capable de te supporter''. Fait encore plus étrange, celui-ci lui répondit: ``Ce n'est pas de ma faute si ça pèse... des livres.''

``-Ce n'est pas une question de poids. Tu as encore perdu mon crayon et je ne le supporte pas.

-Tu ne vas quand même pas me mettre à dos pour ça.

-Non, mais je vais te mettre à sac, jusqu'à ce que je le trouve.

-Allez, calme-toi, je vais le trouver ton crayon.''

Le sac, se tournant vers son contenu, lui dit: ``Mon cher coffre à crayon, trouve le crayon ou je te coffre.'' Le coffre usa de tout son coffre et cria:

``-Bic, mon chéri où es-tu?

-Eh oh, c'est un crayon que je cherche, pas un stylo.

-C'est son nom de plume...''

Rien à faire, le crayon ne laissait toujours aucun signe d'écrit. Ce n'était pas la première fois qu'il disparaissait sans laisser de traces. Dans le brouhaha des outils qui s'entrechoquaient dans le coffre à crayons, on entendait des rumeurs naître:

``-S'il s'efface encore une fois il faudra aller voir le correcteur, qu'il le liquide.

-Oui, je m'en doutais qu'il récidiverait: il avait mauvaise mine ses derniers jours.

-C'est qu'il vient de casser...

-Peu importe, ce n'est pas une raison pour avoir une telle ligne de conduite.

-C'est un de ses traits de caractère...''

Quelques bonnes idées jaillirent:

``-Quelqu'un l'a certainement vu!

-On devrait aller voir le rapporteur, il dénonce toujours tout le monde.

-Ou aller voir le gabarit de cercle: avec un gabarit pareil, il est capable de faire parler n'importe qui.''

Certains tentèrent de prendre la situation en main, comme la règle, par exemple:

``-Ce crayon doit suivre la règle et aller dans le droit chemin, ou ça ira mal.

-Ce n'est parce que tu es graduée que tu es plus intelligente que les autres.'', lui reprocha-t-on.

Cependant, la règle, très futée et très affutée, voulait trancher la question et en particulier la feuille qui supportait la question. Pourquoi la feuille? Parce que c'était chez elle que le crayon avait laissé ses dernières traces. L'interrogatoire restait vain: les feuilles restaient muettes (et sourdes). Peut-être étaient-elles dures de la feuille?

``Vous vous taisez? Quel est votre mobile, feuille?'', questionna la règle.

``(.)'', cria la feuille.

``-Je les connais, ces feuilles, elles finissent toujours par plier. Elles sont toutes les mêmes, toutes de la même lignée.''

``(.)'', acquiessa la feuille.

``C'est la guerre!'', gueula la règle.

``Amenez le porte-mine!'', cria un inconnu.

``Ça va signer. Il y en a qui vont perdre des plumes...'', poursuivit la règle.

``Amenez le porte-plume.'', cria le même inconnu, qu'on commence à bien connaître. Puis la règle suggéra enfin une alternative raisonnable: ``nous allons quadriller les feuilles pour localiser le point où le crayon est.'' Tandis qu'une solution se dessinait, l'efface restait rongée (comme toute efface qui se respecte) d'inquiétude.

Puis soudain: ``Coucou'', de s'écrire (pardon, de s'écrier) le crayon. Chacun participa à l'engueulade qui suivit: ``Te voilà, toi! Où étais-tu, espèce d'illustre sans dessein? Crayon (in)gras, c'est à cette heure que tu te pointe? Chez toi, la ponctualité n'est pas un sens très aiguisé.''

Tout ce brouhaha incita le propriétaire du sac à prendre une résolution: ``l'ordre ne règne pas chez toi, cher sac. Je vais être obligé de t'ouvrir un casier. Judicieux qu'il serait de t'y enfermer. Et dorénavant, tais-toi!''

Et c'est depuis ce premier jour d'école que ce sac a cessé de parler et fut contraint de rester enfermé dans une case pour la plus grande partie de la journée, plutôt que d'aller gambader gaiement dans les prés, parmi les buissons. Finie, l'école buissonnière!

Idées noires et blancs de mémoire

Avant la présentation de la représentation je présente des signes inquiétants d'inquiétude.

Le trac me tracasse, me traque et m'attaque.

Il n'est pas gai le bégaiement qui me gagne.

La gêne qui gît sous mes méninges, jaillit déjà.

Mais je me marmonne à moi-même que le calme domine de manière à momifier mes montées d'énervements maniaques.

Heureusement, je n'ai pas le temps de faire des allitérations sur littéralement toutes les lettres avant que le moment où je dois monter sur scène n'arrive.

Je me prépare à dire ma première réplique. Ce n'est pas vraiment une réplique puisque rien n'a été dit auparavant. Je profère donc ma première plique: ``Il va sans dire que...''

À ce moment, un blanc de mémoire me saisit. Mais la salle trouve que ce blanc illustre bien l'esprit de la phrase... et éclate de rire. Je dois absolument me rappeler de ce blanc de mémoire pour l'ajouter à la prochaine représentation.

Le pire était que je n'arrivais pas à me rappeler de mon texte. Et l'assistance ne m'était pas d'une grande assistance. Si seulement j'avais eu un souffleur, j'aurais eu l'air... de savoir quoi dire. Sinon, je quoi ais-je l'air... devant toutes les aspirations du public.

Plus le silence durait, plus l'assistance devenait dure. Je n'aurais pas cru que les gens oseraient déjà exiger le remboursement de leur billet. Toutefois le public ne s'est pas privatisé (pardon, ne s'est pas privé).

J'ai dû alors improviser. Mais on ne s'improvise pas improvisateur. Sans souffleur, l'inspiration ne vient pas vite. Tandis que la transpiration m'irrigait la figure, je sus (et je sue) me tirer d'affaire: ``Il va sans dire... que je me dédie au non-dit. Car le non-dit n'a pas dit son dernier mot. Je suis donc devenu un spécialiste en jeux de mots utilisant la pantomime.''

La salle, commençant à percevoir l'importance du non-dit, se tût. J'avais réglé une partie de mon problème: je n'avais plus à parler. Je devais cependant bouger! J'entamai donc le célèbre poème pour sourds et muets qui traduit la philosophie même de la pantomime: ``Je m'émeus quand tu te meus.'' Essayez de mimer ça!

Mais la foule n'y compris rien. Elle ne s'émût point, elle s'ameuta. Devant cette meute en émeute, je dus m'enfuir. Ça m'apprendra à avoir un blanc de mémoire. Dorénavant, quand ma matière grise aura des blancs, je broirai du noir!

Élément hyper-actif

Il y a des gens qui ne peuvent s'empêcher d'être occupés sans arrêt. Ils font partie de tous les comités, participent à toutes les activités et ne restent pas une seconde en place. Bref, ils sont partout mais il est impossible de les trouver, comme Dieu. Mais contrairement à Dieu, ils sont vulnérables au burn out. Retrouvons donc l'un d'eux chez son psychologue.

``-J'ai trop vécu sous tension, en courant sans interruption.

-Ce sont les sources de votre mal, vous devriez les contrôler.

-Vous avez raison, d'autant plus que j'ai négligé mon alimentation. Maintenant, je suis hors circuit.

-Vous tombez pile, ces types de problèmes sont justement ma spécialité. Je connais une batterie de traitement.

-Pas l'électrochoc, j'espère.

-N'ayez crainte pour votre self, le transformateur de votre vie n'en aura pas besoin.

-Qu'allez vous faire, alors? J'ai peur de me faire embobiner dans je ne sais quel traitement.

-N'ayez crainte, je ne cherche pas à vous induire... en erreur. Voyez-vous, j'ai les capacités: je me charge de tout (je chargerai ensuite le gouvernement). Vous me disiez que vous négligiez votre alimentation...

-Oui, je ne mangeais que du fast-food.

-Évidement, pour allez plus vite.

-C'est ça: j'aimais bien le poulet pressé.

-Maintenant rappelez-moi vos symptômes.

-Ma vie file tellement que j'en perds le fil.

-Alors, laissez-moi vous dire que c'est courant, c'est anodin.

-Mais je me sens vraiment mal prise et je ne m'en fiche pas. Il y a peut-être une connexion entre mon mal et quelque chose de potentiellement plus grave.

-Je comprends votre réVolt. Toutefois le risque potentiel est faible. Vous n'avez qu'à prendre du repos et vous isoler quelque temps de votre vie active.

-Ce n'est pas en m'isolant que j'apprendrai comment me conduire. Dès la fin de ces vacances, j'ai peur que ma vie en courant continue.

-Il y a une alternative: redresser la situation. Pour ce traitement, il vous faut une bonne dose diode. Des vacances près de la mer devraient suffire pour vous donner goût à ne rien faire.

-Ecoutez, je vous l'ai dit, j'ai perdu le fil: je n'arrive pas à joindre les deux bouts. Je ne peux me payer un tel voyage.

-Il ne reste que le traitement-choc. Je vous prescris d'écouter tous les téléromans: il n'y a rien de mieux pour diminuer la productivité d'un individu.

-J'ai peur de diminuer mes facultés intellectuelles.

-Elle sont facultatives pour réussir, mais si ça vous inquiète vraiment, n'écoutez qu'un épisode sur deux en essayant d'imaginer ce qui s'est passé entre. L'effort mental devrait être raisonnable...

-Merci, je vais me sentir plus à ma place dans la société.

Cette personne... c'est quelqu'un

-Allo? y'a quelqu'un? -Non, y'a personne! -Ça tombe bien, c'est justement à une personne que je voulais parler. -Et à quelle personne voulez-vous parler? -À personne en particulier... -C'est pour ça que vous appelez chez un particulier? -Qu'avez vous de particulier? -Rien, je suis un particulier comme vous et moi. -Dommage, en appelant chez personne, j'espérais tomber, par hasard, sur une personalité. -Effectivement, j'étais une personne alitée et vous m'avez réveillé. -Désolé. Je manque d'adresse. -Je ne vous donnerez certainement pas la mienne, j'ai bien trop peur que vous veniez me parler ici, en personne! -Pourtant, de personne à personne, on se comprend mieux. -Alors, ne venez que lorsque personne n'est là. Je ne désire pas vous parler. -Donnez-moi votre adresse alors: je pourrais vous adresser une lettre plutôt que de vous adresser la parole. -Si vous êtes plus un homme de lettre que de parole, taisez-vous! -Que voulez-vous, quand je m'écrit, je m'écrie aussi. -Alors écrivez-vous et ne m'embêtez plus. -Vous voulez que je m'envoie, par la poste, mon propre texte? -Oubliez ça! Avec votre manque d'adresse, vous n'irez pas loin si vous vous envoyez par la poste. -Et vous osez me dire celà avec ce timbre de voix? -C'est normal, vous êtes déjà timbré... si timbré qu'on devrait vous oblitérer de la surface de la terre. -Comment osez-vous? Vous qui n'êtes personne et moi, quelqu'un. -Arrêter de faire le prétentieux: je n'accepte pas les frais d'appel. -Si vous étiez mon employé, je vous f'rais virer. -Je ne suis pas votre employé, employez vous à d'autres chose. -Savez-vous à qui vous parlez ainsi? -Non vous ne vous êtes pas présenté, et même si vous vous présentiez, je ne voterais pas pour vous. -Comment avez-vous deviné que j'étais politicien? -Votre manière de parler pour ne rien dire ne trompe pas. -Ceci était un message enregistré. -Ceci aussi. (Bip.)

snoixelféR

Dieu existe-t-il? Dieu seul le sait.

Des physiciens ont montré que le vide n'est pas vide. Merci, ça comble un vide dans mes connaissances.

D'autres physiciens ont montré que l'atome (mot qui veut dire ``indivisible'') pouvait être fissionné. Non mais, vous avez fini de changer d'avis?

Pourquoi la terre tourne-t-elle? Si elle ne tournait pas, l'une face de ses faces deviendrait très chaude et l'autre, très froide. La vie n'aurait donc pas pu s'y développer. Aucun humain n'aurait ainsi existé et il n'y aurait eu personne sur terre pour se poser la question. Il en découle que la terre tourne et il ne peut en être autrement puisqu'on s'est posé la question.

Le bon physicien théorique est celui qui peut trouver une explication à tout phénomène. Il reste au physicien expérimental à s'assurer que ce phénomène existe vraiment. Le grand problème de la science consiste à faire coïncider les découvertes de l'un et l'autre. Autrement, quelqu'un passe inévitablement pour un fou.

Un scientifique passe la première partie de sa vie à trouver des gens de plus haute notoriété pour co-signer ses publications, et la deuxième partie de sa vie à chercher des publications à co-signer.

L'Univers est-il infini? L'âge de l'Univers est-il infini? La masse de l'Univers est-elle infinie? Avez-vous fini?

Pourquoi l'Univers n'a-t-il que trois dimensions spatiales? Parce qu'il n'y a plus de lettres après x,y et z.

En thermodynamique, on définit une machine inutile comme étant une machine qui ne produit aucun travail vers l'extérieur. L'Univers est donc inutile: il ne produit aucun travail vers l'extérieur.

Parlons en cellulaire

On parle de plus en plus de l'éclatement de la cellule familiale. Pourtant, ce n'est pas nouveau: bien avant l'apparition de la reproduction sexuée, les cellules se séparaient déjà. L'apparition des sexes n'a fait qu'empirer les choses. C'est ainsi que les unis cellulaires n'ont pas tardé à devenir des désunis cellulaires. Depuis ce temps triste, ils n'ont pluri (cellulaire).

Le tout premier micro-organisme qui eut l'idée de ce nouveau mode de reproduction hésitait à le mettre en pratique. Comme les humains pensent parfois à des choses... méiose pas en parler. Que voulez-vous, quand le sexe apparut, le et la gène existait déjà depuis longtemps. C'est pour ça que ça a pris des centaines de millions d'années avant que le premier rite de rut eu lieu! Ce n'est qu'alors que les micro-orga(ni)smes découvrirent le vieil adage: ``où il y a des gènes, il y a du plaisir''.

D'autant plus qu'à l'époque, les risques d'attraper une maladie étaient minimes. Etre un microbe comporte de gros avantages: on ne peut pas en attraper... Mais on risquerait toujours d'attraper un virus... Il semble donc encore plus avantageux d'être soi-même un virus. Vive la vie de virus, la vie de rêve! Le hic, c'est qu'un virus n'est pas un être très... vivant. Bref, les maladies, il vaut mieux vivre avec, si la seule alternative c'est de ne pas vivre du tout!

Bon, nous avons parlé d'une des pulsions les plus primitives des êtres vivants, il en reste une autre: la violence. Mais je n'ai rien d'intéressant à dire là-dessus, sinon que mon père est plus fort que le tien. Il ne nous manque plus grand-chose pour arriver au niveau du film américain moyen: il nous reste à parler d'argent.

Heureusement pour nous, les bactéries de l'intestin n'ont pas encore eu le temps d'inventer le capitalisme: elles sont restées des organismes à but non-laxatif. À moins que d'autres viennent les faire ch... Ces intrus, ce sont souvent des coliformes qui, comme leur nom l'indique, sont en forme de colis. C'est pourquoi ils y mettent le paquet, et ce n'est pas un cadeau.

Seuls les êtres vivants évolués ont développé les concepts de base liés à l'argent. Pour qu'arrivent les premiers porte-feuilles, il a fallut attendre l'apparition des plantes. Celles-ci découvrirent les avantages de l'immobilier, étant les premières à quitter le domaine du liquide (la mer). Il faut dire que les requins de la finance aiment bien le liquide: on y trouve tant de poissons.

Ce n'est qu'à l'arrivée de l'homme que naquit le concept de marcher. Avec les mains libres, il put commencer à brasser de l'argent. L'homme l'a tellement brassée, qu'elle en a encaissé, l'argent. Pour se défendre, elle a développé un coffre fort. Alors l'homme a consenti à laisser l'argent de côté, ne plus lui toucher, pour un temps, de sorte qu'elle prenne des forces. L'homme et l'argent se sont fait confiance. Un trust mutuel(le).

C'est alors que l'argent s'est mis à faire des petits. À quand la reproduction sexuée chez les dollars?

Dix mots maudits

Il y a des mots qui me causent des maux... et j'ai décidé, une fois pour toutes, de me défouler en leur donnant la définition qu'ils méritent.

Chanteur populaire: Le rôle du chanteur populaire consiste, non pas à chanter car les choristes s'en chargent, mais bien à figurer sur la pochette du disque.

Equation empirique: Equation contenant le plus de variables arbitraires possibles, de manière à concorder avec le plus grand nombre de mesures expérimentales possibles, tout en donnant du travail à un nombre maximum de personne pour déterminer la valeur de ces constantes variables dans toutes les situations possibles.

Equation fondamentale: Equation dont la seule utilité est de donner de la célébrité à celui qui l'a trouvée; de la difficulté à celui qui l'utilise pendant ses études; des bons souvenirs à celui qui ne l'utilise plus dans son travail; et de la célébrité à celui qui se rend compte, cent ans plus tard, qu'elle est fausse.

Et/ou: Mot dissuasif tentant de décourager les gens à lire les ingrédients d'un produit jusqu'au bout. Synonyme: ``il se peut que l'on aie également mis de cette autre chose''.

Ingénierie: Application (lucrative et simple) des découvertes (subventionnées et complexes) des scientifiques

Hit: Pièce musicale construite selon le schéma: refrain, couplet, refrain, couplet, refrain, refrain, refrain, refrain, baisser le volume, couper.

Magnétisme: Tentative d'incorporer des bases scientifiques aux médecines extrêmement douces proposées dans le ``Lundi''. Très utilisé aussi dans les séries de science-fiction des années soixante-dix.

Mu: Lettre grecque voulant dire n'importe quoi. Comme signification, choisir de préférence (mais ce n'est pas essentiel) un mot qui commence par cette syllabe. (Vous ne trouvez pas qu'on devrait utiliser les caractères chinois pour symboliser diverses quantités physiques? Au moins on ne tomberait pas toujours sur les mêmes symboles!)

RND (Random Number Dgenerator): La touche la plus pratique d'une calculatrice scientifique lorsqu'il s'agit de remplir le tableau de résultats d'une expérience de physique ratée. Lors des examens à choix multiples, elle remplace silencieusement le dé ou le ``pile ou face''.

Wu: Mot inutile figurant dans le dictionnaire uniquement grâce aux pressions de l'Ordre des Joueurs de Scrabble.

Histoire décousue

Hélaine Tricot avait tout pour devenir couturière. Autant son propre nom, que celui de la famille dont elle était tissue, la prédestinait.

Sa mère lui racontait sans cesse des histoires typiques tirées de la couture de son pays, telles ``Le petit ourlet'' ou encore ``Le petit capuchon rouge'' avec son célèbre ``tire la bobinette et le fil suivra''. Il était presque décidé qu'elle consacrerait son métier à tisser. C'est ainsi qu'à vingt-cinq ans Hélaine démarra sa propre petite compagnie de costumes fabriqués selon les cou(s)tumes de son pays natal (le Suède).

Mais son succès fut de courte durée car l'automatisation commençait alors son oeuvre néfaste sur la main-d'oeuvre. ``Avec l'arrivée de ces métiers à tisser je vais perdre le mien'', se dit-elle. Elle parla donc à ses employés: ``il faut qu'on se serre les coudres''. Dans un premier temps, la réponse fut favorable: ``on peut t'aider (à coudre)''. Mais avec le temps, les employés perdirent le goût de sacrifier une partie de leur paie pour avoir la paix d'esprit. Si bien que ses employés se sont mis à la répriser et elle se sentit piquée dans son orgueil. Elle durcit le ton: ``rappelez-vous d'une des règles d'or de la couture: je suis le patron, vous devez suivre mes coupures.''

C'est alors qu'arriva un représentant d'une corporation américaine, la ``Fabric of Fabric inc.'', qui proposa d'acheter sa compagnie.

``-Vous n'arrivez pas... à point, lui poursuivit-elle, ce n'est pas une solution qui maille.

-Vous oubliez que nos machines filent et que vous aurez du fil à retordre à nous suivre à moins de vous joindre à nous.''

Mais la suspicion s'installait en elle. Elle se disait: ``cette histoire est cousue de fil blanc, j'aimerais savoir ce qui s'y tricote, quitte à devoir faire une filature''. Elle refusa donc l'offre. ``Ils se paieraient ma tête... et de mon porte-feuille'', pensa-t-elle. ``Ils me font marcher: les mises à pied seraient massives.''

On s'attendait à ce que la compagnie vive une situation économique précaire, certes, mais on ne se doutait pas que ce serait la fermeture-éclair. La concurrence fut si forte que ce fut la faillite. La compagnie s'était fait battre à plates coutures. Cela fit les manchettes des quotidiens locaux. Les plaintes des employés y fusaient et y diffusaient: ``Ça valait la peine de suivre des cours, si on est même plus capable de marcher du travail.''

Elle restait muette devant les ruines, en disant: ``Tandis que tout le monde fait le fil aux bureaux d'assurance-chômage, ici, plus un chas.'' C'est ainsi que, de fil en aiguille, elle est partie d'une industrie qui marchait au coton pour en revenir à la philosophie du bas de laine.

Errata

Errata: Je viens de me rendre compte que dans un de mes textes d'il y a deux ans, j'avais oublié de fermer une parenthèse: je la ferme donc ici ).

Erratum: Puisqu'il n'y qu'une seule erreur, j'aurais du écrire ``erratum'' plutôt que ``errata''. Je ne pouvais pas l'indiquer dans l'erratum précédent car il y aurait eu deux erreurs et le mot ``errata'' aurait été correct.

Erratum: J'ai recompté: en fait je n'avais pas oublié de parenthèses. Aucun des errata précédents ne devrait figurer... ni celui-ci.

Expérience expérimentale

La recherche en ingénierie est coincée entre deux tendances: la volonté d'appliquer quelque chose (de forcément connu) et la volonté de trouver quelque chose (de forcément inconnu). Le résultat, est un emploi qui suit le mode d'emploi suivant...

Effectuer une série de mesures de deux grandeurs physiques. Tracer le graphique de l'une en fonction de l'autre. Si le graphique n'est pas une droite, effectuer le logarithme de l'une ou l'autre des grandeurs physiques (ou même des deux). Retracer le graphique. Si, après avoir répété l'opération précédente trois fois de suite, une ligne droite n'a toujours pas été obtenue, faites passer un polynôme d'ordre n-1 (n étant le nombre de point) à travers les points. Si n est supérieur à 10, le logiciel chargé de trouver le polynôme en question plantera probablement. Dans ce cas, répertoriez vos mesures dans une table et ne vous posez plus de question.

La partie expérimentale est terminée, il reste à communiquer votre résultat à d'autres. Puisque ce que vous avez fait est très simple, il s'agit maintenant de rendre cela compliqué pour justifier votre salaire et/ou vos subventions.

Faire une recherche bibliographique poussée, de manière à citer des auteurs au nom impressionnant (allemand ou russe, par exemple) savamment assaisonnés d'américains issus d'universités connues. Lors de la rédaction d'un article, utiliser les tactiques suivantes:

Ne pas expliquer directement ce que vous faites (``...using various finite element algorithms, we found...'').

Laisser toujours sous entendre que vous en avez fait beaucoup plus (``...it can also be shown that...'').

Montrer que vous dominez la situation (``...one can obviously conclude that...'').

Lors des présentations orales, adopter l'une ou l'autre des stratégies suivantes:

Préparer de magnifiques acétates (ou idéalement, des diapositives sur fond bleu dégradé). Vous serez a priori apprécié, tout en risquant d'avoir l'air d'un simple représentant de marketing.

Ne rien préparer. Vous aurez alors l'air d'un habitué qui possède bien sa matière. Vous aurez cependant l'air de quelqu'un qui la possède trop, au point de ne pas pouvoir la partager.

Ces activités de recherche et de communication ne représentent qu'une petite partie de votre activité: beaucoup de votre temps sera consacré à justifier votre travail. Dans une université cela se fait en remplissant les innombrables formulaires de demande de subvention. Dans une industrie, il s'agit de convaincre son patron qui, hélas, ne comprendra jamais rien à ce que vous faites. Selon lui, de toute façon, les dépenses de recherche et développement seront toujours trop élevées.

Enfin, j'espère ne pas trop vous avoir découragé. C'est quand même intéressant la recherche, si on cherche un peu. Ne faites pas partie de ceux qui disent, comme Proust: ``Ah! la recherche, du temps perdu''.

Marintime

Je suis un marin et je me marre bien sur terre, parce que la mer, y'en amarre. Fini de draguer les hauts fonds, maintenant je peux draguer les hauts talons...

Je cherche ardemment ma sirène: mais les klaxons fréquentes. Vous voyez, je suis un peu trop superficiel: c'est normal, un marin n'aime pas être profond. Le fait d'être souvent un saoul marin n'aide pas non plus.

J'aime bien aborder les filles, quitte à ce qu'elle aient mauvaise opinion de moi, au premier sabord. Voyez-vous, je me fais souvent traiter de port. Je préférerais bien me faire accoster, toutefois j'ai bien peur que ça ne ma rive jamais.

Pourtant, je ne devrais pas avoir de difficulté: je n'ai qu'à faire presque la même chose qu'en mer. Avant, je tenais la barre, maintenant je me tiens dans les bars. Je m'occupais de la coque, je fais maintenant le coq. J'étais sur le pont, je fais maintenant le paon.

Hélas, chaloupe à tout coup. Pourquoi plancton un type comme moi? On a peur que j'aie des micro-organismes? Elles ont fait de moi une loque humaine... non, pire: une badluck humaine. ``La vie n'est pagaie: ferme ta gueule, pis rame'', disait d'ailleurs mon capitaine, du haut de son siège capitainé.

Et puis un jour, j'eus le vent dans les voiles. Je vis une rose desvents moi. Je m'orientai vers elle, me ventant en peu. ``O séant de rêve, devant toi je dis vague'', lui dis-je.

Elle fut touchée par ma poésie, n'ayant pas eu le temps de regarder la signification du mot ``séant'' dans le dictionnaire. Je (la) poursuivit donc:

``-Voulez-vous m'accorder cette vague?

-Je n'aime pas valser, malheureusement.

-Eh bien alors, tanguons.

-Vous y allez un peu vite!

-Un cruiser va toujours vite, qu'il y ait de la vague ou non.''

Je m'intéressai ensuite à sa vie privée, me permettant de la tutoyer:

``-Es-tu marée?

-Non, je n'ai pas encore eu ma lune (de miel).

-Tu rigoles!

-Non, je ne suis pas marrée.''

Mais elle me trouvait un peu impatient:

``-Modérez vos transports: vous n'allez pas en bateau, mais par avion!

-C'est que j'aime bien m'envoyer en l'...

-Assez! Ou je pars en courant, marin.''

Me voyant trop venir, elle partit.

Je lui ai écrit une lettre d'amour où je lui décris toute ma peine: j'y ai même mouillé l'encre pour qu'elle ne parte pas au large. Elle me répondit en cinq mots: ``je reste chez ma mère''. Dans ce cas, moi aussi, je retourne chez ma mer...

Erreur sur la personne

Pour parler à la première personne venue, la deuxième personne est idéale, tout le monde s'entend là-dessus. Mais il est souvent difficile de deviner quand il faut vouvoyer ou tutoyer quelqu'un. Cela engendre des quiproquos particuliers...

``-Bonjour, comment allez-vous?

-Que je ne vous voie plus me vouvoyer.

-Vous voyez, c'est difficile de m'y vouer.

-Je vous demande de vous y tuer.

-Justement, je me tue à essayer de le faire.

-Si tu t'y tues tant, pourquoi de temps en temps tentes-tu de me dire vous?

-Rien à faire, quand je vous vois, vous, je vous vouvoie.''

-Essayons autre chose... Me tutoieras-tu, toi, si moi je te tutoie?

-Me tueras-tu, toi, si je ne te tutoie?

-Oui, têtu, si têtu tu es.

-Vous dites?

-J'eus préféré que tu te tus, plutôt que tu me voues, ce ``vous''.

-Si je m'étais tu, dis-tu, tu n'eus point vu de ``vous''.

-Oui, je n'en eus point ouïs.''

Si la plupart des gens se contentent de la deuxième personne, les situations d'extrême politesse requièrent l'utilisation de la troisième personne même s'il n'y a que deux personnes qui se parlent. Par exemple, un serveur demande à un client: ``Monsieur désirerait-il le menu?'' Alors le client regarde derrière lui pour être sûr que le serveur s'adresse à lui, puis répond: ``Ma personne, puisque je ne vois personne d'autre, désirerait le menu, surtout s'il est fourni et non menu''.

Le client, encore tout surpris de l'intervention de la troisième personne dans ses propres paroles, n'en est pas encore au bout de ses surprises. À la table voisine se trouve un roi qui tient vraiment à ce qu'on le respecte. Le serveur, reconnaissant l'insuffisance de la troisième personne (``Le roi, désirerait-il...''), trouve une formule plus soignée. Il interpelle le roi en vouvoyant sa troisième personne: ``Votre majesté désirerait-elle le menu?'' Devant le froncement des sourcils du roi, le serveur s'empresse de corriger en s'adressant, à la troisième personne, à la troisième personne: ``Sa majesté désirerait-elle le menu?''

Plus tard, de retour au client ordinaire, le serveur a du mal à se réadapter:

``-Voilà le menu de son monsieur.

-Et le mien?

-Pardon, voilà le menu de votre monsieur.

-Merci, je lui donnerai.''

Une fois dans la cuisine, le serveur tutoie le cuisinier et vouvoie son patron. De retour parmi les clients, il les iloie tandis qu'il se jeoie dans ses pensées. De plus en plus inquiet, il voit arriver un nouveau client, d'allure fort respectable. À quelle personne aura-t-il affaire? Il constate, rassuré, qu'il est anglophone et qu'il pourra lui adresser des ``you'' sans aucun risque.

Erreur, car c'était un Dieu. Et la tradition anglo-saxonne veut que l'on s'adresse à Dieu avec le pronom ``thee'' qui n'est rien d'autre que le ``tu'' de l'anglais, avant qu'il ne devienne archaïque et qu'il soit remplacé par ``you''!

Le tronc pas si commun que ça.

À quoi sert le tronc commun? (Note: Le tronc commun est la première année d'étude à l'École Polytechnique.) À prendre racine dans l'établissement, pour pouvoir ensuite y être poussé à bout. Ce tronc, c'est l'arbre moteur de l'école.

Bien sûr, l'on s'y fait souvent planter. Même si l'on y bûche comme des fous, ça nous repousse à bout! C'est qu'il y a continuellement des bouts durs (boutures?). Plus on bûche, plus ça sé corse, mais il ne faut pas se laisser abattre: on risquerait de se retrouver dans le champ. Que voulez-vous, la tête, il faut savoir labourer.

Et à force de labourer, on récolte de la culture générale. Puisque certains en ont marre tandis que pour d'autres elle leur est chère, on pourrait l'appeler ``culture maraîchère''. Il faut malheureusement y potacher sans arrêt (à ne pas confondre avec ``potager'', ce qui sous entendrait que l'on y végète).

Il semble, hélas, qu'il faille oublier un peu la culture physique car on ne peut à la fois être un champi(gn)on intellectuel et faire des spores. À moins de gérer son temps comme un fou... (car quand des fou-gères il y a bien sûr des spores).

Au tronc commun, on débroussaille toute l'ingénierie, pour trouver sa branche, sans deviner la jungle qui nous y attend... Et plus loin sur la branche, se trouve une feuille: notre papier. Et encore bien plus loin sur la branche, se trouve éventuellement une énorme quantité de feuille: notre mémoire de doctorat.

Pendant qu'il débroussaille ce sous-bois, l'étudiant typique boit et devient saoul. Plus le temps avance, plus il boit des verres et plus il les boit secs. C'est qu'il vieillit: il y entre sous forme d'un bois vert et en sort sous forme d'un bois sec, d'où l'expression: ``Salut vieille branche... tu te rappelles du bon vieux temps?''

Toutefois, le tronc commun vise avant tout à apprendre une bonne méthode de travail: tout commencer à la dernière minute de manière à être plus productif! Hêtre capable de faire du boulot à la chêne sans se dire ``j'en tremble''. (J'espère qu'après cette phrase, vous me-risiez!)

Après avoir traversé notre tronc commun et terminé notre branche sans casser, il nous faudra porter le jonc (Note: Le jonc d'ingénieur, bien sûr!) sans plier.

``The Day After''

La session étant déjà bien entamée, et les étudiants aussi, par le principe d'action-réaction, il est fort possible que vous ayez déjà (sur)vécu la scène suivante: la remise d'un examen mal réussi. Voici ce que cela donnerait si la poésie était de mise dans la vie de tous les jours.

Ah! que le cours est coulé, Mes élèves n'ont plus le goût de vivre Se disait, tout bas, un professeur inquiété Pour ensuite, à ses étudiants, poursuivre:

``-L'examen, comment l'avez-vous trouvé? -Sur notre table on nous l'a déposé!'' Répondit avec humour un étudiant Qui avait oublié son sort, un moment.

``-Sérieusement, comment avez-vous trouvé l'intra (Note: Abréviation de l'expression: ``examen intra-trimestriel''.) -Sérieusement, nous l'avons trouvé extra! Si l'examen eu été plus court, Il eut changé la face du monde à ce cours.

-Cet examen, pour vous, fut déterminant Et comme il a été nul, C'est non-invertible maintenant: Vous manquez de bases... en calcul.

-Si nous ignorons le calcul différentiel et intégral C'est qu'il nous laisse intégralement indifférent. Nous divoguons tel bateau artisanal Dérivant tout en se désintégrant.

-Effectivement, elle semble ailleurs, votre cervelle, Vous ne vous mordez pas les doigts, bon sang? -Tant que nous n'aurons point reçu notre partiel (Note: Abréviation de l'expression: ``examen partiel''.), Nous ne serons point sur les dents!''

Puis le professeur se fit une raison Un ingénieur, comme le veut la coutume N'a pas besoin de connaître tout à fond: La surface lui suffit, le reste est dans les volumes.

De cette fable, on tire un proverbe Sur lequel tous s'entendront: ``Pas besoin d'un génie en herbe Pour finir un génie en jonc.''

Oui, je sais que mes vers n'ont pas tous le même nombre de pieds,

Je ne sais point, comme Cyrano, me tirer les vers du nez.

Aussi, voilà pourquoi je ne fais point d'alexandrins,

Me contentant que simples axelandrins.

Pro-moteur auto-mobilier

Deux fanatiques de l'automobile se rencontrent. Ce sont des connaisseurs, des vrais, qui ont tout appris par eux-mêmes: des auto-didactes.

``-Salut, ça gaze''?

-Ouais, ça roule! Mais ma voiture, elle ne roule plus trop...

-Je pensais qu'avec elle, tout baignait dans l'huile?

-Oui, c'est justement le problème: ça coule de partout. Ça coule tellement que j'ai peur que mes bielles coulent aussi. Vois-tu, elle bouffe de l'huile, même à plein régime!

-O.K. arrête de parler de tes fuites. Je pense que tu as besoin d'évasion.

-Prisons l'évasion! On va prendre un pot?

-Un pot d'échappement? D'accord, t(r)inquons!''

Bientôt, nos deux amis se retrouvèrent sur une terrasse sans éclat, par brise légère.

``-Une huit cylindre, S.V.P. (c'est une bière).

-Avec un V8 pour moi. Depuis ma brosse de l'autre jour, je ne prends plus de chance: je prends du jus de tomate en même temps.'' Puis, le désordre du jour revînt à l'ordre du jour:

``-La semaine passée, ma came m'a lâché.

-Comment les segments ont pris ça?

-Ça a chauffé un peu. J'ai eu du mal à trouver une came pour la remplacer. Les cames ne poussent pas dans les arbres!

-Et les arbres à cames, alors?

-Un peu de sérieux... j'ai appelé mon distributeur: ça a fait des étincelles. J'ai réglé la question en deux temps, quatre mouvements.

-À part ça, ça va?

-Non, ma voiture commence à faire à sa tête: ma suspension fait son indépendante. Au 4 août, ça a commencé et au 7 août, c'est tout: j'ai changé toute la suspension.

-Je vois qu'on s'amuse: 11 août! Depuis le temps que ta voiture roule sa bosse (son boss?), elle mérite une suspension.

-Très drôle! Tu t'imagines le prix de tout ça. Combien de temps cela va-t-il prendre pour amortir le coût de la suspension?

-Une suspension est faite pour amortir les coups à ce que je sache. Enfin... elle a vraiment des problèmes de conduite ta voiture.

-Oui. Après tout, c'est normal: l'odomètre arrive à son maximum.

-C'est pour ça qu'elle sent si mauvais, ta voiture.

-Tu as raison, je ne suis d'ailleurs plus capable de la sentir.

-Elle est si vieille: elle en a soufflé, des bougies.

-C'est bien beau une voiture de seconde main, mais je n'ai plus assez de mes deux mains pour la réparer.

-Achètes-en une nouvelle.

-Mouais... les nouvelles, on ne sait jamais comment ça finit, un vrai roman. Et puis, je n'ai jamais investi dans une telle immobilisation à long terme.

-Pourtant, tu dois t'y connaître en immobilisation à long terme, depuis le temps que ton automobile est immobile!

-Arrête de rire: cette voiture, c'est l'essence de ma vie.

-Je sais que tu la trouves super, mais il faut te rendre à l'évidence, tu ne peux plus continuer avec elle. Elle te fait plus marcher, qu'elle ne te roule.

-Tu as raison. Pourtant, je ne l'oublierai jamais: c'est le moteur de ma vie.''

Demi-vie de décadence

Je vis le jour en pleine nuit. Ça commence bien! Lorsqu'on a voulu me donner un nom, on m'a dénommé. Alors je n'ai plus de nom. À deux ans je marchais encore avec une marchette. On m'a fait croire que je savais marcher, mais on m'avait fait marcher. À trois ans, je n'avais pas encore dit mon premier mot. Mais je n'avais pas encore dit mon dernier mot non plus. Toujours à trois ans, je ne savais pas encore manger tout seul... sauf des volées. Quand j'ai finalement appris à parler et à manger, on m'a dit: ``ne parle pas la bouche pleine!'' On m'a aussi dit de finir mon assiette. Je l'ai lancée par terre: elle était finie. J'ai souvent cru avoir atteint l'âge de raison, mais j'avais tort. À l'école, j'étais toujours collé. Et encore, je me retenais, parce que j'aurais eu des retenues, en plus. J'ai dû suivre des cours de français, langue seconde. J'ai fait mon secondaire professionnel à la manière d'un amateur. J'étudiais à moitié, et je doublais. C'était un secondaire court mais il a été long quand même. Bref, à l'école, je n'ai rien appris. Ça m'apprendra! Arrivé sur le marché du travail, j'ai couru du travail. Comme je suis paresseux, j'ai plutôt marché du travail. Je me suis employé à me trouver un emploi. J'étais tellement mauvais que je me suis congédié. Je me sentais si désarmé devant la vie, que je suis entré dans l'armée. Moi qui voulais qu'on m'écoute, on m'a dit de me mili-taire. J'ai trouvé la mi-lisse plutôt mi-rude. Je n'ai jamais eu un faible pour les Forces. Quand il a été question d'aller se battre, je me suis débattu. J'ai été tué sur le front... et sur le reste du corps, forcément. Quelle vie!

Vous allez me dire que ce n'est pas grave, ``les derniers seront les premiers''. Mais comme j'étais le premier à être véritablement le dernier, Dieu ne savait pas où me placer. Il m'a alors demandé ce que j'avais fait pour mon prochain. Je lui ai répondu que je n'en avais pas, puisque j'étais le dernier. Dieu m'a alors annoncé que j'avais créé un précédant. Et sur ce, il cria: ``au suivant!'' tout en m'envoyant au purgatoire pour lui laisser le temps de penser à ma situation. Je criai alors à Dieu:

``-Vous faites erreur!

-Et alors, n'arrive-t-il pas qu'un humain fasse une erreur?

-Mais vous êtes Dieu!

-Ne vous ai-je pas créé à mon image?

-Je vous croyais plus sage...

-Je suis aussi sage que mon image...''

``Ça promet!'', me suis-je dit. Pour me rassurer, Dieu m'annonça que je ne resterais que la moitié de l'éternité au purgatoire. J'acceptai le compromis. Ce n'est que bien plus tard que je me rendis compte qu'une moitié d'éternité, c'est encore une éternité! Je savais déjà que je m'étais fait avoir sur toute la ligne (de vie) mais je venais de me rendre compte que je m'étais fait avoir sur toute la demi-droite de la demi-éternité!

La guerre de ces sessions

Tous les étudiants se battent contre cette session en espérant sa cessation. Vont-ils se rendre à la fin sans se rendre avant la fin? Plus les travaux arrivent à échéance, plus les étudiants arrivent à la déchéance. Ils ont leurs examens sur la conscience (et c'est l'examen de conscience: ai-j'étudié?).

Les locaux d'informatique et les laboratoires papillonnent d'activité (d'activités sociales surtout). Les salles de cours, elles, chenillent d'inactivité. En effet, y être présent est une chose du passé. Les professeurs usent de leurs dernières énergies pour créer de la matière. Les étudiants, qui deviennent radicalement anti-matière, n'en sont que plus annihilés.

C'est que l'esprit de tous est ailleurs: dehors, par exemple. La température se réchauffe et le tempérament aussi. Le jour s'allonge et les nuits se raccourcissent, bien que ça ne soit pas forcément relié... On pense de plus en plus à se faire dorer, bronzer (et argenter?). On a hâte au grillage saisonnier sur les chaises longues et au grillage assaisonné sur le barbecue.

Le dégel nous rappelle que les vacances approchent, après nous avoir révélé, en une fois, toutes les odeurs qu'avait paisiblement emmagasinées la neige au cours de l'hiver. Le dégel découvre aussi, ironiquement, des graffiti sur le sol: ``non au dégel''. Les détritus, sédimentés par les précipitations de flocons, se manifestent précipitamment et jonchent le sol de leur présence, plutôt que de le laisser paisiblement joncher tout seul comme un grand. Les plus grands payeurs de taxes peuvent maintenant admirer l'ampleur du magot qu'ils ont perdu en mégots, pendant tout cet hiver.

Les derniers restes de rhume en prennent pour leur rhume tandis que la grippe ne s'agrippe plus. Il ne reste que quelques sinusites inusitées et quelques bronchites qui n'ont pas encore bronché. N'allez cependant pas croire qu'avec l'été, les gastro-entérites seront enterrées.

C'est tout cela qui détourne l'attention, si on n'y fait pas attention. Comment garder notre concentration dans nos cours de concentration? En hiver, cela avait bien été. Mais en été, on a ces problèmes divers.

Il fallait en plus que le moment où l'on a le plus de travail tombe à l'arrivée des beaux jours. À force de tout remettre à plus tard, vient le jour où ``plus tard'', c'est aujourd'hui. Le futur sera toujours un dur moment à passer. (Le passé aussi, mais il est déjà passé.)

Heureusement que les terrasses ne sont pas encore ouvertes, sinon ça nous aurait terrassé...

Couple peu coordonné

Un jour, un mathématicien rencontra une belle inconnue. Elle et lui semblaient avoir tant de choses en commun: il tenta donc de se mettre en évidence. Il lui demanda immédiatement ses coordonnées, histoire de pouvoir la rejoindre ailleurs qu'en ce point de rencontre. Ils discutèrent ensuite de leurs origines et des choses sur lesquelles leurs intérêts étaient axés. Il chercha bientôt à être seul avec elle: à isoler sa belle inconnue, en somme.

Dès qu'ils furent seuls, ensemble, les accolades ne tardèrent pas. Leur union ne commença vraiment qu'à ce moment et non lors de leur première intersection. C'est qu'elle répétait sans cesse: ``mon z'héros''. Il n'y avait qu'une seule solution... puisqu'il lemme, lui aussi. Leurs courbes se touchèrent. ``Monhômme...'', souffla-t-elle. ``Hélène (ln, en abrégé)...'', répondit-t-il.

À partir de ce point, ils formèrent un couple: non pas x et y, mathématiquement parlant, mais XX et XY, génétiquement parlant. Ils se crurent dorénavant indivisible: c'était un amour premier. Après tout, c'est bien connu, l'amour est irrationnel, ce qui ne simplifie pas les choses.

Comme dans tout bon conte, ils vécurent si heureux qu'ils en eurent bientôt des enfants. Beaucoup d'enfants. Et cela leur coûtait de plus en plus cher: à se multiplier ainsi, l'addition augmentait et ils ne pouvaient s'y soustraire. Ils étaient divisés sur le sujet, mais après avoir passé les quatre opérations, il songèrent à l'Opération. Cependant, qui allait la subir cette Opération, elle ou lui? Selon lui, l'Opération n'était pas commutative et c'était celle qui possédait la matrice qui devait la subir. Elle lui répondit qu'elle était déçue car en tant que mathématicien, il aurait dû être pour l'égalité.

Ils se rendirent alors compte que, dans bien des domaines, ils ne partageaient vraiment pas les mêmes valeurs propres, et la situation se dégénérait: ils voulaient maintenant devenir (linéairement) indépendants. Cela les toucha droit au ker et entraîna bien des pépins, voir même des noyaux. Il n'y avait plus de solution car ils formaient maintenant un système inconsistant. Ils se séparèrent donc, augmentant ainsi leur degré de liberté... pour peut-être rencontrer d'autres courbes. Toutefois leurs enfants auront à s'habituer à changer constamment de système de coordonnées, passant d'un couple à l'autre à tout moment, ce qui les désaxera certainement.

C'était un amour premier: personne ne pouvait les diviser... sauf eux-mêmes. L'amour est irrationnel: il ne fait pas de quartier... même avec notre moitié. Il aurait dû, dès le début, faire un ``x'' sur cette inconnue.

Discours sur les méthodes

Les étudiants ont développé tout un arsenal de méthodes les aidant à répondre aux questions d'examen. En voici quelques unes...

Méthode Monte-Carlo (i.e. statistique): Le hasard fait parfois bien les choses... surtout dans un examen à choix de réponses.

Méthode des perturbations: Pour les questions du genre ``démontrez que...'' il arrive souvent que l'on n'obtienne pas exactement le résultat désiré. La méthode de perturbations consiste à changer quelques signes ici et là, imperceptiblement, de manière à obtenir la bonne réponse.

Méthode esthétique: Une réponse très compliquée (i.e. moins belle) a plus de chance d'être fausse qu'une simple et belle réponse. Il s'agit donc de réessayer de résoudre le problème jusqu'à ce que la solution soit belle.

Méthode scientifique (formulation d'hypothèses): Dans une suite de questions qui dépendent chacune de la réponse précédente, il est parfois frustrant de ne pas savoir répondre à la première question. Il est alors tentant d'essayer des réponses du style: ``si j'avais répondu à la question 1, j'aurais pris ce résultat, multiplié par la réponse 2, si je l'avais trouvée...''

Méthode des développements en série: Quand ils ne savent pas quoi dire, certains étudiants ont tendance à écrire de longues explications. Ils font donc des développements... en série.

Méthode de l'abstinence: Opposée de la précédente. Ayant trop peur de dire des bêtises, certains étudiants évitent de répondre quoi que ce soit à certaines questions. Cela épargne du travail au professeur qui est alors plus enclin à leur donner des points lorsqu'ils écrivent quelque chose.

Méthode phénoménologique: Cette méthode consiste à multiplier, diviser ou exposer toutes les valeurs de la donnée du problème de manière à obtenir un nombre qui a les mêmes unités que la réponse désirée.

Méthode du calcul des résidus: Quand quelqu'un connaît très peu la matière, il lui est peut-être préférable de scruter à fond l'examen pour voir s'il n'y aurait pas un petit numéro facile qui lui donnerait quelques points.

Méthode numérique: Compléter le plus de numéros possibles, mais sans réfléchir.

Méthode de la moindre action: Il s'agit d'utiliser abusivement des expressions comme: ``par inspection, on trouve'', ``par symétrie, il vient'' ou ``on peut facilement montrer que'' et les faire suivre d'une équation gigantesque. Bien que peu utilisée par les étudiants, cette méthode figure couramment dans tout bon solutionnaire d'examen qui se respecte.

Un amour physique

Y a-t-il place, en sciences, à la folie et à la romance? Oui, car après tout, des liaisons covalentes aux liaisons covalentines, il n'y a peut-être pas plus de différences qu'entre un party et une partycule en agitation thermique...

Un jour (ou plutôt à une microseconde en particulier), un électron célibataire qui orbitait encore tout près du noyau familial, s'ennuyait. Tandis qu'il était avachi (cela lui causera plus tard un problème spinal), près de sa moment (magnétique), il décida d'acquérir son énergie de libération. Mais la permittivité magnétique de sa moment était exactement non nulle, et elle s'écria: ``Que je ne te vois pas courant avec je ne sais quelle bande de con... duction''. La réaction de sa moment lui fit faire un saut en s'écriant: ``Gap!''. Pourtant, fermement décidé à en finir avec sa configuration actuelle, il conclut: ``lepton tout ça de coté, et muons.''

Toutefois, privé de son principal centre d'attraction, il s'ennuyait toujours autant. Il tenta alors de découvrir comment les autres trouvaient le bonheur. Il remarqua que certains se contentaient d'être dans l'entourage de métaux lourds (heavy metal, pour les puristes). D'autres, moins réactifs, trouvaient la joie à l'écoute de quantiques et de mécanique classique. Il en vit même qui s'affairaient à planifier leur emploi du temps sur un tableau périodique. Cependant, une activité l'intéressa surtout: les liaisons entre particules possédant certaines affinités magnétiques (aussi appelées a(i)mants).

Comment allait-il faire comme eux? Il venait à peine de quitter le noyau familial et ne s'était encore contenté que d'actes timides (actinides?) envers les autres: quelques photons rosés qui n'atteignaient même pas les électrons de coeur. Mais l'espoir était permis: il avait sa demi-vie devant lui. Tout à coup, tout près d'un gros béta, il aperçu une électron(e) de spin opposé. Elle (l'électron(e) en question) se mirait dans l'onde (plus précisément, dans sa fonction d'onde).

Il tenta de la séduire en lui chantant la pomme (de Newton). Hélas, il ne faisait visiblement pas le poids dans le domaine du chant gravitationnel, surtout à côté du gros béta. Il reprît de plus belles avec un chant électrique, mais l'électron(e) eu une vision très négative de la chose. Les photons rosés, eux, ne l'excitèrent même pas. Heureusement, à ce moment, le béta aux manières peu cathodiques remarqua des cibles plus intéressantes dans une mince feuille d'or situé non loin de là. Notre électron avait maintenant la voie libre et étudia sa positron (pardon, sa position): qu'avait-il qui pourrait la séduire?

Il se rappela qu'il venait d'avoir son permis de conduire... et profita d'un moment de sang froid pour devenir supra-conducteur! L'effet fut immédiat: elle fut séduite et nos deux électrons se couplèrent en paire (ampères?). Et, miraculeusement, leurs vies devînt sublime et vaporeuse. (Mais avant de se vaporiser, ils fondirent l'un sur l'autre.) Ils vécurent donc heureux et eurent une famille nombreuse d'éléments.

Impayable Vendeur

La loi de l'offre et de la demande comporte comme corollaire que tout client doit nécessairement se faire offrir plein de choses qu'il ne demande pas. C'est ainsi que lorsqu'un client entre dans un magasin et s'y fait instantanément apostropher par un vendeur. C'est ce qui arriva ce jour là.

``-Bonjour, puis-je vous aider à dépenser?

-J'y pensais justement.

-Eh bien, laissez-moi penser à votre place et dé-pensez à votre aise.''

Le vendeur fit alors étalage de ses qualités de vendeur à l'étalage.

``-Voici le meilleur modèle que vous puissiez trouver.

-Vous êtes si bon vendeur que vous semblez même être vendu à cette marque.

-C'est pour ça qu'on m'a engagé.

-Vraiment?

-J'ai été très convaincant lors de l'entrevue: voyez-vous, je sais me vendre.

-Et on vous a acheté pour être vendu à une marque, c'est ça?

-Oui, il n'y a pas de honte à ça. Et depuis, je me vante de mes ventes.

-Allez, restez modeste devant le Roi (qu'est le client).

-Oui, monsieur, je m'emploie à vous servir.

-Vous, vous employez? Vous êtes donc votre propre patron. Il n'y a rien de surprenant au fait que vous ayez été engagé!

-C'était une manière de parler: je m'engage à m'exprimez clairement dorénavant.

-Vous vous engagez à parler maintenant: décidément, vous aimez vous payer de vous même.''

Le vendeur devenait visiblement contrarié et de moins en moins sûr de lui: c'est ce que l'acheteur recherchait. Il éviterait ainsi que son être se fasse avoir en ne perdant qu'une petite partie de son avoir et de son bien-être. Le client, en guise de juste retour des choses, apostropha alors le vendeur:

``-Bon, sérieusement, nous en étions à considérer ce modèle...

-Oui, il est absolument unique.

-Pourtant, il me semble que j'aie vu d'autres modèles fort semblables.

-Mais ce qui le rend unique, c'est son prix.

-Curieux, il me semble justement élevé.

-Un modèle avec un prix aussi élevé c'est extrêmement rare. Et puisque tout ce qui est rare est cher, ce modèle ne peut faire autrement que de coûter cher.

-Vous me faites marcher.

-Que voulez-vous, il faut faire marcher l'économie. Et puisque nous faisons tous partie de l'économie, il faut bien vous faire marcher un peu aussi.

-À ce prix là, j'espère que ça fait marcher l'économie d'ici. Est-ce un modèle importé?

-Non, C'est fabriqué ici, c'est tout ce qui importe.

-Ça s'importe ou c'est fabriqué ici, décidez-vous!

-Très drôle... c'est à vous de décider.

-Je trouve, mon cher, que c'est trop cher.''

Le vendeur tenta de tenter l'acheteur par l'illégalité:

``-Je vous proposerais bien un paiement en dessous de la table. Dommage que nous soyons limités...

-Je croyais que vous étiez enregistrés... mais si c'était le cas, vous n'oseriez pas dire de telles choses.

-Commandite vous?

-Si vous étiez en société, vous n'auriez pas dit de telles choses.

-En société? Vous voulez dire en compagnie d'autres gens.

-Oui. Payer en dessous de la table est une drôle de manière de faire marcher l'économie.''

Devant le mutisme du vendeur et surtout devant le prix rutilant du produit en vente, le client quitta le lieu d'où il était roi, en déclarant: ``Je dois vous dire qu'en tant que vendeur vendu, vous ne faites rien pour vous racheter.''

Rendez-vous chez l'optométriste, ou... Blind date

Je ne pus m'empêcher d'examiner attentivement l'optométriste qui m'examina. Je l'avoue, j'avais un oeil sur elle, et elle, les yeux sur les miens. ``Ça regarde mal!, m'annonça-t-elle, vous louchez.'' Mais elle ne se doutait pas encore que c'était elle qui me faisait loucher. ``Regardez-moi droit dans les yeux'', poursuivit-elle tandis que moi, je ne demandais pas mieux. Je la regardai pendant si longtemps que j'en fini par m'en rincer l'oeil. Voyant mes yeux devenir humides, elle me demanda: ``vous avez quelque chose dans l'oeil?'' Elle n'aurait pas du dire ``quelque chose'' mais plutôt ``quelqu'un''.

Je commençai bientôt à m'intéresser à sa vie privée. Toutefois, mes questions se firent trop directes, et sa réaction fut vive:

``-Mêlez-vous de ce qui vous regarde.

-Justement, ça fait une demi-heure que vous me regardez.

-Alors mêlez-vous plutôt de vos oignons.''

Devant mes yeux qui s'emplissaient de larmes, elle excusa sa rudesse. Je la rassurai:

``-Non ce n'est pas grave, mes oignons me font toujours cet effet.

-Vous avez vraiment de drôles de réactions, vous devriez aller vous faire examiner par un médecin.

-C'est ça, envoyez-moi donc me faire voir ailleurs!''

Voyant mon cristallin devenir amorphe sous l'effet de la déception, elle comprit toute la sensibilité que mon caractère avait peine à dissimuler par de vains artifices indignent de mes véritables valeurs les plus humaines avec lesquelles... Enfin bref, vous voyez le genre.

Une fois l'examen terminé, vint le temps de choisir une monture, et surtout, de payer le tout. Malheureusement, une facture à la main, cette optométriste perdait beaucoup de son charme.

``-Les lunettes, ça coûte les yeux de la tête!, lui dis-je.

-La vue, ça n'a pas de prix: il ne faut pas regarder la dépense.''

Tiraillé entre mon équilibre sentimental et financier, j'avais tant de mal à me concentrer, que je n'arrivais pas à retrouver le mot ``optométriste''.

-Mais, madame la voyante...

-Je ne suis pas voyante!

-Madame la... voyeuse...

-Je ne suis pas voyeuse!

-Mais madame la visuelle...

-Je ne suis pas visuelle.

-Madame l'auditive alors... ce prix en est exorbitant!

-Gardez vos yeux dans vos orbites si vous voulez profiter de vos lunettes.

-Mais regardez moi le prix de cette monture: à ce prix là, ça doit être une monture pur sang!

-Si vous voulez économiser, nous avons un spécial 2 pour 1 sur les verres de contacts.

-J'espère qu'on en donne deux verres de contacts!

-Deux paires, bien sûr.

-Ah, dans ce cas, je vais y regarder à deux fois.

-À ce prix, ça vaut le coup d'oeil, ou plutôt, le coût d'oeil.

-Non, après tout, n'essayez pas de m'en mettre plein la vue: je préfère garder mes distances et prendre des lunettes.

-Soit, faites comme vous voulez.''

Je réglai alors la facture, un peu mécontent. Je devais alors certainement lui laisser une mauvaise impression. Il était temps de montrer à nouveau mon intérêt pour elle, au risque de me faire pointer du doigt ou de me mettre le doigt dans l'oeil, ce qui, devant une optométriste, revient à peu près au même. ``Vous êtes une optométriste. Voulez-vous devenir une optoméheureuse?'' Fort encouragé par le hochement de tête et le rire de sa bouche, je poursuivis avec les questions d'usage: ``-Vous habitez chez vos parents?

-Oui et non: j'ai un appartement mais je reviens souvent voir mes parents. J'ai un double foyer!

-Vous voulez qu'on se revoie?

-Si vous voulez, on peut aller aux vues ensemble. Quel film voulez-vous voir?

-Il faudrait regarder dans le ``Voir'' (Note: Le journal...).

-Vu!''

Enfin, grâce à cette nouvelle paire de lunettes, je me suis fait une nouvelle connaissance. Ce sont, en somme, des lunettes d'approche. Les verres de ``contact'', ce sera pour plus tard...

Remerciements

Je tiens à remercier...

les membres éternels du ``Polyscope'', pour avoir continué à me publier en page deux, malgré mon haut taux d'absentéismes aux soirées de mise en page(!): Martin David, Nicolas Duchastel de Mont-Rouge, Mathieu Perreault, Alain Labelle, Olivier Touchette, Olivier Sommelet, Miguel Labrèque, Nathalie Aubé, Michèle Laframboise... (et j'en oublie probablement);

les membres quasi-éternels du ``Polyscope'', pour la même raison, mais qui sont en nombre si impressionnant qu'il me serait difficile de les nommer tous;

tous ceux qui ont relu mes textes, à chaque semaine, en quête de fautes: Marie-Josée Brabant, Marie-Claire Deschênes, Nicolas Turgeon, Annie Villandré;

ceux qui ont relu tous mes textes afin d'y corriger les dernières fautes, en vue produire ce livre: Emmanuelle Goulet, Chantal Marois;

tous ceux qui m'ont averti lorsqu'un de mes textes était mauvais;

et bien sûr, tout ceux qui ont eu le courage de lire mes articles à chaque semaine.